Les rogatons

 Le patchwork est -mais pas seulement - un art d'accommoder les restes.

Les restes d'étoffes qu'on ne veut pas perdre , soit par souci d'économie, soit pour le souvenir , soit pour leur intérêt historique, et même osons le mot artistique. Soit tout simplement parce qu'on les aime  ou qu'on quelque chose à dire avec ceux-là ainsi reliés assemblés. . Le  Dorica castra de l'article précédent , ou bien les tableaux de la série les Beaux restes (cf l'index)  en sont un bon exemple. Ou bien encore les séries : Petits accommodements avec la vie -ainsi appelés car plus appréciés que des élaborations plus...profondes  (sourire) ou les tableaux de la série "entre-deux".

Même si les patchworks d'aujourd'hui sont plutôt faits de tissus neufs et souvent conçus pour un usage "pratique" . Lavables notamment .

Et puis nous avons toutes dans nos tiroirs des restes de quilts commencés dans un grand élan d'enthousiasme et abandonnés parce que le "jus" pour le faire n'était plus là -il ne s'agit pas de suivre un modèle mais de mener à bien un projet qu'on crée - ou bien qu'on était dans une autre période d'inspiration (-pour moi, cause la plus fréquente) .

Le merveilleux avec le patchwork c'est que ce n'est pas comme un pull inachevé (qui peut aussi finir, certes, en objet d'art textile ) ou une broderie abandonnée : on peut toujours en créer autre chose.

Il existe des solutions pratiques simples : on fait un coussin, un set de table , une manique, un sac., des pochettes.

 Seulement ça fonctionne si on reste dans une optique pratique-décorative et objet d'usage (et pourquoi pas) .Quoique je sois persuadée qu'un objet d'usage, s'il est unique et bien de soi , puisse être aussi une oeuvre d'art expressive et personnelle(et ce pas seulement si signé d'un grand nom qui sanctifie le moindre carré d'étoffe touché!)  . Mais qui dit objet d'usage dit usure et donc disparition à plus ou moins brève échéance ou bien objet abîmé par lessives etc . On n'a pas toujours envie que cela le soit .

On peut tout simplement rester dans l'optique tableau exprimant quelque chose, mais en diminuant juste la surface. On avait prévu un plaid, on se retrouve avec un petit panneau 4 blocs au lieu de 12 ... Mais pour certaines surfaces où il y avait un placement des couleurs et des valeurs bien particuliers, ce n'est pas possible  il faut,reconstruire autre chose, autrement .

J'ai tendance pour ma part à partir sur des bases 1 mètre 50 sur 1 mètre 50 ... et à me retrouver avec trois à cinq blocs traînant comme ça en deshérence  pendant des années. Autre source, chez moi abondante , les blocs restant d'ouvrages finis, j'en couds toujours plus pour éliminer au moment de la construction finale .  Il faut vraiment s'habituer à les reconsidérer, les regarder autrement que l'idée qu'on avait de la surface initiale et ce n'est pas si facile .

Un livre m'a aidée à considérer mes blocs d'un autre oeil c'est le livre de Mary Kerr intitulé  A quilt block challenge vintage revisited , un challenge entre artistes à qui on donne le même bloc le plus souvent trés  traditionnel , avec tous les droits sur le bloc y compris de le déconstruire  , de peindre ou écrire dessus .. Liberté totale.

Les résultats sont assez époustouflants et c'est plein non de modèles à copier, mais de pistes à adapter  (ce que je préfère) .

  Ce peut d'ailleurs être une solution pour celles qui travaillent en groupes mais je suppose qu'elles ne m'ont pas attendu pour y songer toutes seules et si d'aventure une passant par ici  peut me faire part de sa propre expérience (je suis très intéressée par ce genre de "challenge" mais ..pour les autres )

Il ya deux  ans j'ai donc commencé à vider mes innombrables sachets d'ouvrages en souffrance , et à les reconsidérer d'un oeil neuf en n'excluant aucune possibilité de la housse de coussins classique au tableau recomposé .

Je pose au préalable que les modèles de départ quand ils sont montrés étaient les miens, pas ceux de revues. Pour moi la différence est capitale , même si on peut finalement se servir de cette façon de terminer les "leftovers" et autres UFOS de cette manière pour un ouvrage non créé .Justement : là on échappera au modèle, pour construire quelque chose de personnel .

C'est ainsi qu'est née la série les Rogatons .

Travaux d'impatience plutôt que de patience et volonté de construire même sur un échec .

Pour le moment quatre ouvrages . Mais bien plus de prévus. Le premier est issu de l'abandon d'un quilt en médaillon .  L'abandon est venu pour diverses raisons : c'était long et assez monotone à faire ; les couleurs en harmonie arc-en ciel étaient très tendance et je me sentais trop "sous influence" pas assez dans mes propres harmonies . Enfin le bloc dit  noeud de l'amitié est difficile à monter -du moins pour moi . .

J'ai donc sélectionné les trois blocs noeuds de l'amitié terminés et je les ai montés verticalement, rebrodés sur les bords en dissimulant les imperfections . Un matelassage main très simple et quelques boutons et voilà comment on a un petit panneau qui certes ne se veut pas la Joconde du patchwork, mais est regardable .

les rogatons-1

 

Le deuxième petit panneau est parti d'un reste de blocs d'un ouvrage intitulé Strelitzia , retracé à ma façon  début des années 90 d'après un quilt contemporain du festival de San Diego . Avec evidemment mes tissus , mes couleurs. L'abandon est venu du fait que justement je n'accrochais ni aux formes, ni aux couleurs . Là le plus gros travail a été de trouver le bon tissu de fond (ici un orangé faux uni), et en ce cas je conseille "d'auditionner" beaucoup de tissus différents . Et aussi de placer les blocs restants de manière équilibrée . J'ai choisi de pas matelasser pour moi il n'y a aucune obligation, ce n'est pas une couverture ! - J'aurais pu, pour lui donner un aspect très Modern quilt mais les modes et moi ...

 

rogatons-2 1

 

Le panneau 3 est issu d'un travail en courbes en chemin de l'ivrogne modifié , et là c'est de coudre des courbes qui m'a bloquée . Pas les couleurs une harmonie de bruns et de turquoise avec laquelle je me sens encore en accord, alors que ce quilt a été conçu au début des années 90 .J'ai redistribué les blocs à ma façon en incluant des tissus en harmonie , et une bordure beige et bleu avec un imprimé discret .

les rogatons-3

 

Le quatrième c'était un des projets conçus parès 98 quand j'ai acquis le logiciel quilt- pro , dans un grand élan d'enthousiasme , j'ai crée des dizaines de quilts  virtuels et parfois je faisais quelques blocs pour  voir ... ce quilt se nommait Galaxie titre qu'il a gardé et si j'aimais beaucoup le fond clair et les quarts de cercles de couleurs, je l'ai assez vite abandonné pour d'autres surfaces sans doute plus porteuses . J'avais acheté déjà un tissu destiné à sa bordure , que j'ai réutilisé pour le fond . Tel quel et en petites dimensions il me plaît bien :

rogatons galaxie

Au delà de l'idée de sauver un inachevé , de faire avec ce que d'aucunes nommeront "un petit objet sympa", je me suis aperçue que ce travail de reconsidérer une surface en tenant compte de sa propre évolution était une sorte d'exercice d'introspection textile . Pourquoi ai-je aimé ces formes-là à ce moment-là, mais pas assez pour aller au bout, pourquoi aujourd'hui certaines sont accord en harmonie avec ce que je suis,  d'autres non ? Comment soit respecter la vision de départ , soit  métamorphoser ? Voire totalement "défigurer" -ce que je n'ai pas encore tenté .

Une autre solution sera peut-être de mixer pluseurs restes ouvrages dans un quilt dit d'orphelins plus "classique" si tant est que de tels ouvrages le soient. Il ya deux surfaces de la sorte en cours leur défaut c'est d'être d'assez grands formats et j'ai moins d'énergie que jadis pour mener à bien de tels projets .

 

présentation ouvrages

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