Les palettes d'une textilienne -les fils

  Le fil que j'évoquerai aussi c'est celui-ceux plutôt avec lesquels on brode, bien que ceux qui servent à assembler ne me soient pas indifférents .Et que coudre et broder puissent en bien des .... points se rejoindre, et qu'on puisse broder avec n'importe quel fil et même avec n'importe quel matériau en broderie   contemporaine ) . Je me bornerai pour cet article à ceux que j'utilise .

Chez moi ils sont répartis en trois catégories  : les boîtes où ils sont rangés soit par couleur , soit par catégories,  comme pour les tissus, j'ai oscillé toute ma vie entre ces deux types de classement selon le type d'ouvrage que je faisais (tout en considérant que je n'en ai pas qu'un en route très loin de là !!) , les écheveaux de réserve , et les fouillis de bouts  que je stocke dans poche et trousses diverses . Je dis toujours que le meilleur moment pour moi c'est celui où je choisis mes fils, quitte à changer d'avis en cours de route .

 

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 J'ajouterai les poches et boîtes où je stocke les  fournitures nécessaires pour un ouvrage .Et que j'oublie parfois de ranger une fois l'ouvrage terminé.

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Les fils c'est un monde bien spécial , c'est proche des tissus -et en même temps c'est très différent. Comme les tissus les regarder peut me mettre en route, mais j'ai moins souvent créé une broderie pour utiliser un fil que créé une surface d'assemblage pour utiliser un tissu . Deux langages différents :  assembler n'est pas déposer sur ...La broderie est plus proche pour moi d'une écriture voire parfois d'une calligraphie .Et bien sûr assemblage et broderie peuvent s'associer comme dans les crazy quilts notamment .

Le fil est porteur de tant de symboles et celui dominant de la durée d'une vie . Tout le monde connaît les expressions "filer un mauvais coton" ou bien "sa vie ne tien qu'à un fil" , sans oublier "le fil des jours" .

Jacqueline

Mes premiers fils à broder  je les ai achetés avec les piécettes que ma mère m'abandonnait des commissions .  Il  y avait au village une mercerie tenue par Madame D , une femme brune d'humeur assez peu commode. J'aimais   l'odeur  de ce magasin  : poussière, cire et quelque chose de presque  sucré issu   des fils et tissus neufs (l' amidon  peut-être) . Le plancher grinçait . J'entrais là comme à l'église  et je demandais à la grande prêtresse  du lieu des fils à broder . Pour moi le fil à broder c'était le coton mouliné . Sur les revues féminines que ma mère lisait, on recommandait le brillanté d'Alger Cartier Bresson . Mais la mercière à chaque fois me demandait  : - Du coton floche? -Je ne  savais  pas ce  que c'était . Elle   ouvrait des tiroirs vers des fils ronds et indivisibles; je répondais invariablement  : " Non du  brillanté" . Presque un rite, ce dialogue d'ouverture. Et c'est là qu'elle ouvrait les boîtes à moulinés DMC. Je vivrai mille ans que je ressentirais toujours la même émotion comme devant des  objets très précieux pliés dans du papier de soie . Il y a dans les courbes de  ces écheveaux, leur abandon, la manière dont ils se serrent les uns contre les autres quelque chose pour moi de sensuel et de volupueux. Et bien sûr l'empire des couleurs, même si la commerçante ne disposait pas des 600 et quelque  nuances de la gamme.

 

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Je faisais mon choix (souvent du vert et du rose ) parfois je proposais de venir aider à ranger et la mercière qui avait bon coeur sous des dehors rébarbatifs, m'abandonnait donc  parfois un écheveau ou deux . Vers mes dix ans j'avais un petite collection d'une  trentaine d'é'cheveaux, avec quelques couleurs favorites le vert  907 DMC  notamment (déjà le vert jaune de Jacqueline, celui que j'aimerais à glisser dans mes patchworks, pour dissoner un peu ).

'J'ai brodé avec eux mes premiers napperons , je décalquais des motifs en noir et blanc, j'improvisais avec eux compositions et je choisissais mes points évitant ceux  qui me paraissaient hors de ma compétence. J'ai longtemps eu peur du le passé empiétant . Mais je me débrouillais bien avec feston et passé plat .  J'acquis un peu plus tard le savoir  broder de u magazine Femmes d'aujurd'hui , que j'ai toujours et qui fut mon principal professeur . De  ce temps lointain il ne me reste que  quelques broderies  et deux ou trois écheveaux perdus au milieu des autres . Telle cette broderie sur un drap :

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De soie , en   revanche il n'y avait pas , à l'époque, dans ma campagne . Trop fragile, trop cher et plus trop usité puisque justement les cotons  avaient été créés pour les remplacer . La soie est entrée dans ma vie de brodeuse bien plus tard -il a fallu attendre Internet . Mes premières soies furent des Guterman pour boutonnières , et je les affectionne encore pour les broderies des crazy quilts , ce sont des fils perlés et bien ronds qui donnent relief aux coutures de surlignement.

Ensuite j'ai découvert pas mal de sortes  et notamment les soies d'Alger que j'affectionne et utilise encore beaucoup . J'ai longtemps été cliente de  Victoria Clayton une américaine  qui teignait des fils et rubans de soie et mes boîtes contiennent encore beaucoup de fils issus de ces gammes. Hélas souvent les créatiuces artisanales disparaissent et le réassortiment est impossible- ce qui mène à mixer avec autres choses car,  comme ailleurs, j'aime le mélange et jouer avec épaisseurrs et textures comme dans ce pavot :

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Et  justement le coton perlé je l'utilisais peu jusqu'en 2005 où je décidais de m'offrir la gamme complète des Ispe -nullement épuisée 15 ans plus tard . Et  eux c'était pour rendre mes images numériques en broderie  de "texture"  comme pour peindre mais d'un trait plus  épais  que les fines broderies fil à fil de ce  que les anglo saxonnes appellent silk shading et nous, peinture à l'aiguille  .C'est aussi plus rapide et moins fatigant pour les yeux, moins lisse surtout, même si j'aime  retrouver les soies  floches et ou retordues pour des fleurs un peu à l'ancienne comme dans ce panneau d'Archives du Nord:Archives du nord5 det jacqueline fischer

 

Mes apprenttissages me firent constater pas mal de choses . A savoir que le même point n'a pas du tout la même apparence selon le fil utilisé , le nombre de brins , le tissu de dessous .Et que dans la même gamme certains coloris sont plus ternes que d'autres et moins couvrants . D'où cette habitude que j'ai prise de tester avant de me lancer dans un  projet  important (à mes yeux s'entend).,Et lorsque je travaillais pour des revues bien bien plus tard , systématiquement jusqu'à faire parfois x versions du motif avant de décider de la bonne !Ou bien parfois des pages d'essai comme celle-ci, consacrée aux différents aspects d'une forme en passé plat  sur toile de lin :

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Je ferai une mention spéciale pari tous ces fils pour le retors à broder DMC destiné à la tapisserie à laiguille mais qu'on peut tout à fait utiliser à autre chose, liés pour moi au souvenir des cours de travail manuel où on nous faisait broder du gros point de croix sur grosse toile avec ce coton , je détestais !

Au  début de mon mariage et de ma vie professionnelle qui coÏncidèrent (!) ,  je brodais encore et j'ai fait une première incursion dans la tapisserie à l'aiguille au demi-point  et au point de Hongrie , et j'ai redécouvert le retors . Et aujourd'hui du fait que j'ai hérité  du stock d'une amie je m'y suis remise avec plaisir , pourvu  que je crée la surface moi-même et j'adore faire des samplers de points avec ce fil  :

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Il faudrait aussi faire une mention des fils métalliques (réputés diffciles à broder) . Non pas la vraie broderie d'or avec cannetille et jaseron -que je n'ai jamais pratiquée mais l'usage des fils  métalliques  auxquels on adjoint souvent des perles pour des broderies très précieuses. Gail Marsh dans so livre sur la broderie au XVIII° siècle note que les brodeuses aux fils et pierres précieuses étaient mieux rémunérées que les autres  .

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Restent les laines à broder  sur toile ou tapisserie qui sont le domaine de la broderie dite crewel . J'en ai peu fait , mais j'ai découvert grâce  à une amie suédoise ces broderies venues des pays nordiques dont j'ai fait un coussin  pour la revue Broderie d'art .

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Aux fils fabriqués pour brder s'ajoute tous ceux qui ont éé créés pour un autre usage et détournés, notamment les fils de laines fantaisies . Pour moi c'est le domaine du fil dit "couché c'est à dire fixé sur la toile de fond par des points . Ainsi est né ce "fertilité "

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 Le fil, et  c'est ce qui le rapproche du tissu -varie selon ses couleurs, la manière dont il est filé -je ne ferai pas un cours là dessus, mais quand on brode c'est comme pour les tissus il vaut mieux connaître un peu ce qu'on utilise , sa brillance , sa couvrance, sa tenue au lavage (si on  veut  laver ) .Fils points et support réunis constituent en eux-même un langage avec lequel une expression personnelle est tout à fait possible sans pour autant être virtuose de tout. Je ne le suis pas . Je regrette souvent , exactement comme pour les tissus, que la variété immense de fils "'classiques" dont nous disposons incite si peu à explorer ce qu'on pourrait bien dire de PERSONNEL avec cela. Ils nous donnent des touchers différents, des brillances , des reliefs -selon les points choisis et jouer avec tout cela est un art comme nn autre . On peut considérer que la virtuosité "reproductrice" de kits ou modèles en est un aussi puisque, las ,le souci de posséder une belle chose permet de montrrer son savoir-faire prime depuis toujours l'imagination ; le brodeur-et surtout la brodeuse!-  n'étant perçu  souvent que comme exécutant -comme si ce n'était rien déjà d'interpréter un dessin en points fils et couleurs ,qu'il soit de soi ou d'un autre .  Sauf à imiter une fois de plus les peintres , dans les sujets comme les matières  mais qui cherche avec ce que  les fils a  de "bien à  eux " qui précisément les distingue des "grands" arts et du mixed media , c'est exactement comme en patchwork : voué à l'incompréhension et la méprise engendrant le mépris inconscient ( art mineur, ce n'est pas du contemporain de plus qui sauverait la mise, , alors tout est dit!) . Sauf à y adjoindre des matériaux tendances  ou pris aux autres arts ; peinture, plastiques , tyvek, colles fils de fer bref faire du mixed media avec un peu de fil pour la caution textile . Que ce soit intéressant je n'en doute pas, que ça puisse donner des chefs d'oeuvre non plus. Juste que qui joue sur la variété du matériel habituel  est à peu près sûr d'être dévalué soit parce qu'on l'assimile illico à celles qui copient les modèles , soit parce qu'on l'assassinera d'u  "pfft joli décoratif " etc . Je sais les écueils et les blessures et je sais aussi ce  que je veux faire. Et je le fais .avec bonheur qu'on se rassure et si je souligne, une fois de plus les incompréhensions c'est toujours dans cet espoir de changer un peu les regards sur ces arts .

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NB Si vous voulez tout savoir sur le brilanté, le mouliné et la soie  d'Alger, je vous envoie sur  l'excellent site Ouvrages de dames et sur le fin du  fin  matière d'utiliser les fils dans une technique parfaite sur celui de Mary Corbet .

 

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