Les phrases qui tuent

Les phrases qui tuent ...ou toujours méchante jamais contente ..

En annexe des questions de vocabulaire

Ces petites phrases dites- je le sais bien- sans intention de blesser mais à force l'incompréhension, la méconnaissance de  ce qu'on fait ....ça use! A la façon de la goutte d'eau qui creusant  la pierre peut aussi faire déborder le vase !

Quand on a fini un ouvrage,  dont on assume la "paternité" , j'entends par là que même si personne ne crée ex nihilo, on a trouvé  l'idée de départ, la composition et le comment réaliser aussi ,etc ..on a quand même mis de soi dedans ...on entend illico :

  - Tu l'as trouvé où, le modèle ?

Désolée, les modèles ont leur utilité mais au bout de quarante ans de pratique  du patchwork, j'ai tellement bien appris à m'en passer que j'en crée pour les autres...Cependant ça nempêche pas le mépris et l'incompréhension totale des dites "autres" .

Cette assimilation de l'oeuvre copiée à l'original  a culminé récemment quand une relation m'a affirmé très sérieusement qu'elle ne voyait aucune différence entre ceci  :

Roses blanches d un corps fou2

qui a nécessité tout de même un peu d'élaboration personnelle et ce que j'ose nommer une idée originale (au sens de personnelle) avec  le travail pré mâché de la dame qui utilise le carré de base intitulé crazy rose ou log cabin irrégulier  en adaptant un "modèle déjà composé" . Or si je me suis inspirée pour la pose de plusieurs tableaux et photgraphies (j'ai hélas l'honnêteté de le reconnaître!) l'idée de  ce corps  reconstitué  d'un carré jugé traditionnel, dans une composition qui elle, ne l'est absolument pas , le choix symbolique des roses blanches, le jeu de mots sur la chanson "roses blanches de Corfou"  redesssiné et inclus dans un série (celle d'over rose) est bien personnelle et m'appartient donc en propre.  La personne en question était de plus très étonnée que je me sente offensée de son assertion :  ainsi va le petit monde -parfois vraiment très petit, en effet !- du patchwork quilt. Je veux bien qu'on me dise qu'on n'aime pas, que   c'est  moche que mon tableau est raté, mais me dire que c'est comme l'imitation d'un modèle non jamais, je n'accepterai cela ! Et si ce n'était qu'une fois, je ne soulignerais pas ce fait .C'est quasi constant .On me dit qu'il vaut mieux en rire oui mais chacun a des limites à son humour et la mienne est là . Je veux bien rire du rdicule d'une telle assertion après coup, mais dans l'instant ça me met en colère et en révolte car ce type de mesquinerie je m'y heurte aussi depuis 40 ans . Et c'est long !

ou encore, j'entends:

" ça ressemble à du (ici nom d'artiste textile célèbre )..."

ou encore

"Ah oui c'est un peu comme un quilt de (ici nom d'artiste textile célèbre)"

Il va de soi qu'on est tenu de trouver la comparaison flatteuse , quoi :  on vous compare à un(e) grand(e) et vous n'êtes pas encore contente! Un peu d'humilité que diable ! Pourtant :

 Ne l'étant pas vous -même, pauvre tache, vous  ne sauriez rien faire sans coller aux basques d'un(e) grand (e). Même si  au bout de tant d'années de pratique, vous estimez savoir ce que  vous avez envie de faire, toute seule comme une grande , justement. Non sans avoir admiré les œuvres des autres grands ou petits ..d'ailleurs pourvu qu'elle émeuvent quelque chose en vous. Bien ou mal mais, seule, avec sans doute inspiration et réminiscence, imprégnations diverses de personne qui connaît et apprécie et son art et ses artistes, mais seule,  c'est à dire, sans le bouquin de Trucmuche qui est si génial(e) puisqu'on en parle tant,  sous le nez. Ou sans avoir pris le graphisme à Chose ,   les couleurs à Bidule et la bordure à Machin. Non !

Plus gênant  encore le "je fais comme toi".... dit sans doute par gentillesse et pour se rapprocher de vous. Et là on vous déballe des quilts où vous ne voyez  vraiment  pas  ce qu'ils ont de commun avec les vôtres à part d'être des quilts . Ce qui ne veut nullement dire qu'ils sont moins bien . A cela j'ai toujours envie de répondre : " tu fais selon toi, ce que tu es, et moi selon moi et ce que je suis". On peut faire de fait des quilts qui ressemblent aux miens, comme je peux faire des quilts qui ressembleraient à ceux des grands dont je parlais ci-dessus. : deux quilts à dominante rouge se ressemblent ou deux quilts avec beaucoup de couleurs et de tissus se ressemblent, deux quilts avec des tissus fleuris se ressemblen, certes par leur point de  concomitance. Mais ils ne sont  nullement faits l'un comme l'autre s'ils ont vraiment été créés par deux personnes différentes avec des âmes différentes, des visées différentes...Et ce qui importe, c'est plutôt ce qu'ils ont chacun de singulier qui fait qu'on se sent le droit de le signer et d'y reconnaître sa création.

 Quand on sort des milieux autorisés la phrase qu'on entend le plus souvent c'est : "ça vous occupe". Oui, si on parle d'une occupation de style militaire, de quelque chose qui prend dans votre vie l'essentiel de l'espace. Non s'il s'agit d’un passe-temps. Évidemment on ne dirait pas cela à un peintre ou à un écrivain (encore que s'il n'est pas célèbre on en revient toujours là il ne pourrait  exercer qu'en amateur qui se distrait ...) , mais le patchwork ça ne peut être qu'un loisir pour vieille dame à la retraite qui a du temps libre à meubler.

ça peut être cela oui,tout comme la peinture et l'écriture citée ci dessus, mais désolée ce n'est pas mon cas. J'écris depuis mon adolescence  et je fais du patchwork depuis l'âge de 32 ans. Je brode depuis l'âge de sept ans. Je me suis arrêtée de travailler il y a vingt ans déjà pour me consacrer à ces activités qui ne sont nullement un loisir , mais une nécessité intérieure. Si vous préférez en langage cru je crée comme je respire et parce que je me sens poussée aux fesses par quelque chose d'impérieux, pas pour avoir un  joli couvre-lit , même si ce que  je fais peut servir de couvre-lit parfois.

Je passe sur les phrases inévitables sur la patience qu'il faudrait ..le travail que cela représente derrière la louange on sent poindre   ce  que je nomme  "l'effet ghetto" il n'y a donc que de la patience et du travail à voir  ? Pas l'ombre d'une vision, d'un désir, d'une émotion , d'un vertige ? Rien que le temps et l'exactitude qu'il a fallu pour donner corps à tout cela?

 Il en faut, mais ce n'est certes pas la patience qui me guide mais la passion et c'est toujours souligner (avec les phrases qui ne louangent que le travail ...) le côté besogneux et sans imagination  de l'activité ...Pour ma part j'aimerais mieux qu'on admire le résultat de la patience  et du travail plutôt que la patience et le travail  seulement sans regarder à quoi ils aboutissent. Réflexion qu'on  réserve essentiellement  aux quilteuses  dites traditionnelles puisqu'on a beau expliquer(voir questions de vocabulaire 3)  on vous colle cette étiquette d'office dès qu'on use de géométrie régulière, quel que soit l’aspect de ce qu'on crée avec . Ce n'est ni du respect ,ni de l'admiration :  c'est regarder avec des œillères et sans vouloir voir ce qu'il pourrait y avoir d'autre,  dit avec des étoffes par exemple. "Que  nous  disent et font ressentir  ces tissus différents ainsi agencés dans cette surface ? " serait un assez bon abord ...Mais non : on classe d'abord ensuite on regarde ...alors forcément , on ne voit pas ce qu'il y a  voir !

Autre sujet d'agacement la manière de regarder les couleurs : sur le trop de couleurs ou le pas assez ou celle-ci qui ferait mieux .. etc .La profusion a ses raisons d'être comme la sobriété et il n'est écrit nulle part que l'une valait mieux que l'autre ce sont deux expressions artistiques différentes et on n'est pas obligé d'assassiner l'une d'une petite phrase parce qu'on aime mieux l'autre. Par exemple dire d'un quilt avec beaucoup de tissus et de couleurs qu'il est surchargé ou dire d'une composition sobre qu'elle est pauvre ou monotone . Profusion et dépouillement ont leurs raisons d'être. Il  ne s'agit pas pour quelqu'un qui crée de faire de la décoration d'intérieur ou du bien léché qui ne heurte pas le bon goût. Ensuite on a le droit de ne pas aimer, mais à mon avis si on essaie d'entrer dans les émotions suggérées par ce qu'on voit sans s'encombrer de préjugés, on  donne une chance à l’œuvre d'être appréciée pour ce qu'elle est  et non pour ce qu'on voudrait qu'elle soit.