Patchwork et art textile...encore
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 11/12/2016
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Le patchwork qui serait un art textile mais pas de l'art textile, voire pas de l'art du tout, une idée difficile à déboulonner ...
Me promenant sur les sites et les blogs, je trouve sur la page d'accueil de l'un d'entre eux, que j'aime pourtant beaucoup pour son honnêteté (citation des sources) cette affirmation certes habituelle pour moi qui fréquente ces milieux depuis si longtemps, mais qui me fait toujours autant tiquer, selon laquelle le patchwork serait juste fondé sur la capacité de " tirer parti au mieux du moindre bout d'étoffe.. " comme si ce n'était que cela ! et que c'était certes, on le concède, un art textile mais que ce n'était pas de l'art textile.
Que les artistes d'autres arts, qui me lisent parfois , ou le public non initié ne croient pas que je délire, c'est juste qu'ils ignorent -pour cause- l'histoire de notre art et la manière dont s'est institué ce distinguo que je qualifierai pas de subtil, mais d'absurde. Même si, mea culpa, j'avoue l'utiliser intra corporation pour me faire entendre ...car oui on en est toujours et plus que jamais là !
Je rappelle l'article que j'ai écrit en 2009 sur la question : Qui a peur du mot patchwork : il a beaucoup circulé. Certes, les choses ont sans doute évolué, mais pas autant que je l'aimerais. Donc je récidive!
Pour comprendre en images : quand je fais ceci , c'est de l'art textile (ou presque. Trop de tissus encore : un effort à fournir avec quelques fils de fer en lieu et place des fils de laine, cela le serait bien davantage, aux yeux des décideuses en art textile ... pour sortir comme il me fut dit "du carcan de la fibre" -sic! )
Stigmates : ceci est de l'art textile
ou bien ceci :
La chimère apprivoisée : là on me dit que c'est "de la peinture en étoffes" pour moi ce sont des étoffes assemblées et non de la peinture ...
mais quand je créé ceci :
Mon harmonie- ce patchwork quilt qui est "un art textile mais pas de l'art textile ...."
Là tout d'un coup mes capacités d'artiste textile s'évanouiraient et ce ne serait que de l'artisanat traditionnel - il faut que je m'en excuse presque, que j'admette que c'est "traditionnel" "artisanal' "non contemporain" et "décoratif" -autant de coups de griffe dévalorisant cette surface. Or je n'ai pas voulu perpétuer une tradition, mais utiliser des formes géométriques régulières pour m'exprimer tout comme le font encore certains peintres célèbres, à la différence près qu'en peinture on ne sait pourquoi et bien qu'on ait commencé il y a plus d'un siècle, ça semble encore une audace de peindre des rectangles de couleurs juxtaposés,et c'est toujours génial puisque c'est fait par des génies :-) tandis qu'en tissus où ça se fait depuis la nuit des temps, ce serait juste de la routine, de la couture basique, de la "tradition" sans imagination, où le travail et la patience sont les seules qualités à louer ... puisqu'on ne veut pas y voir le reste !
Observons donc de plus près je suis partie dans le premier cas d'un dessin de femme et dans l'autre d'un dessin abstrait élaboré en image numérique, et pour le dernier de simples carrés qui sont repertoriés dans la nomenclature amécicaine comme une variante du "four pach"- quatre carrés .
Les deux premiers seraient de l'art parce que par le dessin ils ressemblent à des oeuvres d'art "majeur" qu'on peut voir dans les galeries d'art tandis que le second aux yeux de la plupart des gens : c'est juste un joli plaid à poser dans son salon . Mais sur un mur.... quelle différence ?
IL est à noter que ces mêmes carrés pourvu qu'ils soient irréguliers ou décentrés, là tout à coup deviennent de l'art comme dans ce petit tableau jeux de carrés, la petite dimension -qui évite qu'on le prenne pour une couverture- et la couture à bords vifs qui donnent de la texture -le mot qui sauve!- suffit pour qu'on trouve cela plus "artistique" :
Mais les quatre SONT DU PATCHWORK !!! Même si seul le troisième aura droit à ce terme en tant que symbole d'une "réduction". La femme du tableau Stigmates est constituée de morceaux d'étoffes, récupérés, qui plus est à la fois du précieux et du "déchet" d'industrie.. La chimère apprivoisée est faite de restes ébouriffés et fixés par des broderies machines , mais pour le troisième j'ai préféré que les tissus soient lisibles comme les pages d'un carnet ... d'où ce choix, délibéré et non traditionnel, d'une structure géométrique classique, comme est classique le découpage d'une poésie en vers ou d'un roman en chapitres, même si le contenu peut en être novateur, contemporain, fantaisiste, voire déjanté ! . Dans les quatre cas c'est une création à partir de morceaux d'étoffes avec lesquelles j'avais quelque chose à exprimer, de cette façon-là adaptée et à ma visée et aux étoffes telles qu'en tant que langage textile , elles me guidaient vers cette surface-là, avec ces formes-là, ces couleurs-là et surtout surtout : ces étoffes-là car oui je suis artiste par les tissus assemblés de manière signifiante et sensible. Les quatre sont des surfaces créées ... aucune n'est l'imitation d'un modèle existant , et le fait que l'une ait un point de départ jugé "traditionnel" n'infère pas que son utilisation en étoffes le soit. Et même, encore bien le serait-ce, c'est une création, c'est textile et si le reste peut porter le nom d'art textile, alors cette surface-là aussi. Sinon, qu'on me le justifie de manière convaincante ... Je n'y croirai pas avec les arguments "ordinaires" ... qui ne reposent que sur des a priori véhiculés depuis des décennies sans plus ample informé.
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