histoire et techniques de broderie

  • De la géométrie en art textile- 2

    Régulier-irrégulier

     

    Il semble bien que si on s'en tient sinon au textile du moins aux matières souples servant à fabriquer vêtements, tentures sacs et objets, quand on use  d'assemblages de formes venues de sources diverses-  on ait eu le choix entre mettre ensemble les pièces récupérées telles quelles ou  de les retailler pour  composer avec les chutes des géométries régulières (celles-ci présentant souvent l'avantage d'offrir des coutures droites en principe plus faciles à ajuster ), même si les motifs avec courbes régulières, bien entendu existent aussi.

    On peut aussi évidemment retailler ces morceaux dans toute autre forme souhaitée : figurative, stylisée, mais en ce cas on a  plutôt tendance à les appliquer sur un fond  surtout quand la forme devient complexe et la technique dite d'appliqué est considérée souvent  comme une forme de broderie plus que de couture (il n'y a pas à proprement parler "assemblage", ou plus exactement la jonction se fait par superposition.

    On distingue donc  dans les oeuvres en patchwork qu'elles soient anciennes ou contemporaines diverses approches de la géométrie selon  ses formes et la disposition de celles-ci.

    La géométrie irrégulière  préservant la forme des étoffes telles quelles c'est le royaume du crazy quilt. On le fait remonter à la fin du XIX° siècle, et précisément  la centennial exposition  à Philadelphie en 1876  où des vases japonais craquelés auraient donné l'idée de type de quilts. Mais je crois qu'on confond la mode du crazy  victorien, très orné, qui s'est développée à ce moment-là et la naissance de l'art de la "chute folle"; on trouve bien avant des assemblages de pièces irrégulières  ne serait-ce que par souci d'économie.(et ce dans pas mal de cultures différentes). On peut voir dans des livres d'histoire du costume des corsages reconstitués de morceaux détoffe, faits en France )

    On voit aussi dans le livre Abstract design in American quilts  déjà cité ce crazy très dépouillé qui n'a rien de victorien , mais qui est un crazy quilt au sens de formes irrégulières emboîtées et rebrodées sur les coutures.

    crazy-revival-001.jpg

    La plupart des spécialistes des quilts assimilent cependant crazy et étoffes très brodées, même si nombre d'oeuvres, même en tissus précieux sont juste ornées sur les coutures, et souvent en morceaux  réguliers. Les  caractèristiques  précieux/ brodé l'ayant emporté sur celle de morceaux irréguliers utilisés tels quels .

    .On peut voir des crazys quilts à l'ancienne sur nombre de sites en tapant antique crazy quilts dans un moteur de recherche.

    Ces formes irrégulières sont elles-mêmes souvent incluses dans des formes régulières : carrés; losanges , bandes verticales, comme je l'ai fait dans l' Arlequin fou :

     

    afou.jpg

    Mais , il arrive aussi que la surface de fond  sur laquelle les tissus sont posés au lieu d'être constituée de morceaux recousus ensuite, soit  d'un seul tenant, ce qui n'empêche  pas d'y intégrer  des formes régulières :  ici les "roues" symbolisant les hasards du mariage .

     

    rebus-4.jpg

    .Crazy quilt rébus ou l'heureux mariage

     

    Aux formes irrégulières des crazys peuvent s'ajouter celles des quilts Afro-américains des  Gee's Bend nés au XX iècle et qui sont devenus célèbres pour leur fantaisie de formes , l'équilibre des compositions et la sobriété des tissus utilisés (en tissus unis)  En revanche pas ou peu de matelassage . On peut en voir sur ce lien .

     

    - Des formes régulières diverses travaillés en ensemble   comme dans les quilts dits dahlias, les grandes étoiles notamment qui sont des "classiques" de ce type de disposition .

    L'étoile des quatre saisons réinterprétation d'un quilt de Mary-Evangeline Dillon . Ces étoiles sont presque le stéréootype du quilt américain et souvent dans les livres sur art et étoffes c'est  eux que l'on voit ...comme si l'art du quilt s'y réduisait, lui qui est si varié !

     

     

    Et4s 4

     

    La géométrie en formes identiques répétées  :  carrés, triangles, hexagones ou toute autre forme pouvant s'emboîter par tessellation.  On lit parfois que de telles surfaces seraient plus "simplistes" que les élaborations savantes à partir de géométries plus complexes , mais ce n'est pas mon avis d'autant qu'on peut par travail de pixellisation notamment reconstruire avec ces tesselles des tableaux personnels  (pas seulement des copies de photographies ) ).Les charm -quilts ces quilts comportant 999 morceaux (parfois davantage) identiques par la forme, mais tous différents par les étoffes font partie de cette catégorie.

    Dans ce quilt Jaillissements  j'ai utilisé les tesselles carrées pour reconstituer une de mes créations numériques :

     

     

    Jailesements redjpg

    Mais j'aime aussi à en bâtir des surfaces plus classiques témoin ce Petite fleur fait pour illustrer par saturation -un peu ironique et distanciée par rapport au thème- les tissus à fleufleurs :(c'est aussi un charm-quilt aucun tissu semblable à un autre)

    Petites fleur detail

     

     

     La géométrie dite en blocs ces carrés répertoriés par les quilteuses américaines, mais qui existaient déjà en Europe avant la naissance des Etats-Unis, comme on semble trop souvent l'oublier et notamment en Europe du Nord (La Suède entre autres a un bel "héritage"et bien évidemment le Royaume-uni ) .Et même hors d'Europe comme le souligne le début de cet article .

    C'est une de mes approches favorites,  j'ai expliqué maintes fois pourquoi  : il existe des milliers de blocs et pour chacun une infinité de possibilités  de  création personnelle en étoffes en adéquation avec la géométrie choisie (à noter que tous ces carrés ne sont pas remplis de formes géométriques, mais une bonne partie) .

    On peut faire avec eux absolument tout ce que l'imagination propose et on ne voit vraiment pas pourquoi ils ont été , à une  certaine époque, assimilés à un patchwork "planplan", pépère et sans imagination. On peut bâtir sur une simple juxtaposition comme ce Melting pot :

     

     

    Melting pot 3Ou bien encore en déformant les blocs au point qu'il est difficile de les reconnaître comme  dans le Feu sacré :

    Le feu sacr jacqueline fischer art textilejpg

    Des recueils de blocs ont été constitués très tôt comme aide mémoire et propagation d'un art. Et comme en point compté ou broderies; les quilteuses ont fait parfois des "samplers" ces échantillonnages  de blocs tous diffférents et j'ai obéi à cette coutume en voulant tester les blocs les plus difficiles du logiciel Block base (déjà cité )  Le sampler délicat  :

    sampler-delicat-1-reduite.jpg

    Evidemment on ne peut oublier les compositions des Mnemonites et des Amish célèbres pour l'utilisation des étoffes unies , les formes simples et l'audace de leurs coloris ainsi que souvent un matelassage très sophistiqué. A noter que les quilts Gallois antérieurs dans le temps présentent des ressemblances . Pour ma part je n'en ai pas réalisé, les tissus unis et le matelassage n'étant pas mes modes d'expression en tissu préférés et mon but n'est pas de suivre, ni de reproduire ce qui existe déjà . Ce qui ne m'empêche pas de les admirer chez les autres. On peut voir des quilts anciens Amish sur ce site

    Les quilts  dits en médaillons construits autout d'un bloc central auquel on rajoute des rangées sur chaque côté  qui serait une spéciialité britannique. Le quilt Home sweet Home s'apparente un peu à ceux-là  :

     

    Home

     

     

     

    Les géométries jugées plus contemporaines ont souvent préféré les bandes décalées , les carrés un peu de guingois, et les livres d'art quilts regorgent d'ouvrages de la sorte .On peu aussi s'amuser à ce petit jeu (que j'ai fait) taper  geometric art quilt, puis comparer avec les oeuvre de Klee , Kandinsky, Rothko, sans oublier Vasarely et Mondrian pour voir que là l'inspiration se veut "noble" et côté Beaux-arts.

    On peut compter comme "contemporain " tout ce qui s'éloignerait des formes précédentes jugées elles traditionnelles, mais à dire vrai et je l'ai souvent montré le clivage entre le deux est souvent  très discutable. 

    La  vague des modern quilts privilégie les grandes surfaces unies avec un matelassage très élaboré (le plus souvent sur machine long arm  ) je renvoie sur ce lien où je les ai déjà présentés .

    Mon quilt Eclats de Soie s'en rapproche  :  je ne refuse pas une tendance" quand j'ai quelque chose à dire avec elle :-) non plus , il ne s'agit pas de refuser ou nier  les influences, mais de sélectionner en chaque genre ce qui convient à propre expression  :

     

    10391388 10202551594257567 8900498651140083116 n

     

     Et en conclusion rappelez-vous ces oeuvres qu'on les aime ou pas sont des surfaces abstraites, exprimant des visions géométriques de l'espace mais en   tissus parce que  le tissu a pour moi des caractéristiques que la peinture ne me donnerait pas -son toucher ses reflets, ses imprimés, son histoire . Pas  seulment de jolies couvertures. Merci de le comprendre.

  • La tapisserie à l'aiguille

     

    Pict0740

    Luxuriance tapisserie sur toile aïda

     

    Pour moi la tapisserie à l'aiguille, ça a longtemps été synonyme de canevas, imprimé en couleurs qu'on remplissait au  point de croix ou au demi-point en laine ou en coton retors. J'avoue que ça ne me plaisait pas trop, comme tout ce qui ne requiert aucune imagination, juste du "remplissage".Ce qui ne veut nullement dire que je méprise les personnes qui aiment à se détendre par ce loisir!

     Dans les années 70, beaucoup de personnes  de mon entourage, y compris  quelques hommes, entreprenaient pour décorer leur intérieur,  des tapisseries vaguement inspirées de Lurçat pour les plus "contemporaines", ou alors des tableaux de genre, paysages,portraits, scènes de chasse. Les journaux féminins et notamment Modes et Travaux proposaient des modèles, souvent de belle taille. Souvent elles finissaient non terminées au fond d'un tiroir. J'ai à cette époque réalisé deux petits panneaux format A4, sur le dessin original d'une amie et l'autre sur un "carton" de mon  mari.

     Autre emploi fréquent : recouvrir les fauteuils et chaises.Là aussi on trouve de nombreux modèles dans les revues, le tapissier lui devenant alors plutôt chargé d'ajuster ces réalisations sur les sièges.

     

    C'est en cherchant autour de la manière d'obtenir du relief en broderie que je suis tombée, dans les encyclopédies que je possède sur une bonne centaine d'autres points que les deux les plus usités.

     Alors l'envie m'est venue aussi d'en  savoir un peu plus en explorant à la fois du côté histoire, et du côté points et emplois de ceux-ci dans une optique de création et non de simple remplissage. Je n'ai pas encore été très loin côté réalisation des idées que j'ai engrangées, au fil de mes lectures, mais je tiens à partager ici ce voyage en tapisserie à l'aiguille.

    D'abord je me suis demandé pourquoi ce mot de tapisserie, puisque pour beaucoup la tapisserie c'est tout d'abord du tissage et qu'historiquement la tapisserie tissée a précédé celle sur canevas brodée à l'aiguille, même si l'art de la broderie est souvent jugé antérieur à celui du tissage au motif qu'on brodait déjà sur des peaux, des écorces ...Et tout tissage n'est pas tapisserie.

    D'après L'Encyclopédie Autour  du fil que je possède la première trace d'un ouvrage en tapisserie à l'aiguille  c'est la chape de Hildesheim, datant du XIII siècle, et conservée à l'Albert and Victoria Museum.

    Faisons un sort à la tapisserie de Bayeux , antérieure certes, mais brodée sur une toile sans points comptés et dont les motifs ne recouvrent pas l'ensemble de la toile, ce qui reste  les deux caractéristiques les plus courantes de la tapisserie à l'aiguille, en revanche elle n'est pas forcément réalisée sur un canevas rigide. Beaucoup de points de la broderie dite à points comptés sont utilisés en tapisserie et réciproquement, mais le point compté lui, ménage des vides des espaces dits "négatifs".


    Il  semble qu'il y ait eu un besoin d'obtenir des surfaces brodées et non tissées par  un  moyen moins onéreux en fils qu'une tapisserie ,  et aussi ne nécessitant pas le montage compliqué d'un métier à tapisser. Peut-être plus rapide aussi encore que sur ce point, cela permettait d'obtenir à un moindre coût des "copies" brodées des originaux tissés. C'est surtout à la Renaissance que cet art prend son essor, avec l'influence des tapis d'orient dont on cherche à imiter les motifs, fort prisés , avec déjà une activité professionnelle et masculine et ...une activité de loisir   plus féminine, déjà !

    La manufacture des Gobelins  fondée en 1601 en développera cette activité en parallèle avec le "vrai" tissage. Puis un peu plus tard Aubusson .Actuellement il y a des artistes spécialisés rattachés à ces deux "écoles", on vend des kits, des laines.
    Au XIX° siècle  s'est développée la broderie dite de Berlin qui a donné naissance à nos canevas modernes, exécutés cependant au point de croix et non au demi-point ou  petit point (ce qui n'est pas tout à fait la même chose ,)

    Parallèlement à cette activité de loisir et de détente, il existe de la création véritable à deux étapes : celle du carton qui s'élabore à part -et qui  peut être signé d'un peintre - et celles du choix des points à mettre en oeuvre et des fils choisis pour ce faire , ce qui constitue à proprement parler, l'art du brodeur.

     Plus encore que l'histoire de cette broderie, ce sont donc  les points différents qu'on peut y mettre en oeuvre que j'ai découverts, au fil de mes lectures dans revues et livres spécialisés .Au départ bien sûr l'idée étant d'imiter un aspect tissé on comprend qu'on ait surtout développé ce qui l'imitait le plus(le point Gobelin en st un bel exemple entre autres) . La revue Stitch déjà propose assez souvent des ouvrages sur canevas dans un  style que je vais affirmer "contemporain" même si ,me dit-on, la" tapisserie" contemporaine c'est tout autre chose encore ! En anglais on trouve pour désigner la tapisserie à l'aiguille les termes needle point, ou canvas work. Canvas c'est aussi la toile du peintre.

    On peut   donc broder sur canevas et il en existe différents types de tissages. Certains livres indiquent monofil ou Pénélope et il n'est pas indifférent de le savoir.Surtout pour les points complexes . Mais tout support tissé qui peut laisser passer des fils constituant des points peut-être considéré comme de la tapisserie à l'aiguille. Ce support donc peut-être de toile à tissage plus ou moins régulier, de toile de jute, de métal, de tissages de fils qu'on coud soi-même à la machine etc... Le point compté s'apparente sous beaucoup  d'aspects à cette tapisserie à l'aiguille - beaucoup de points dont le point de croix sont communs -  dont la particularité est sans doute  au départ, d'user d'un support plus rigide.  La visée était d'éviter aussi les déformations, d'où l'emploi conjoint d'un métier, surtout pour une pièce de grande taille.

    Je possède plusieurs livres  à cet égard

     

    Tapisserie aiguille

     

     New canwas work de Jill Carter Basford 2007 , en anglais est celui qui offre le plus de regards et d'ouvertures vers des pratiques modernes de cet art . Canevasn points,supports de toutes sortes, un nouveau regard sur des techniques adaptées de la tradition comme Hardanger et jours, perlages , ou bien encore utilisation des points décorarifs machine en préparation du canevas ou au dessus. Pas de modèles à suivre, et c'est un bien, à mes yeux!

    The Needle point  book de Jo Ippolito Christiensen  1997 -en anglais,  est de loin de plus fouillé, ardu et complet. D'un aspect austère , en noir et blanc, si on excepte les planches du milieu conscrées aux oeuvres-  il est cependant très clair et quasiment exhaustif si on veut tout savoir des qualités des toiles, fibres , et avoir des explications quasi scientifiques sur le sujet c'est le livre idéal.On y explique aussi des techniques diffciles à trouver ailleurs comme appliquer un canevas de texture différente sur un autre (un plus fin par exemple pour rendre des détails dans une zone précise)  les points sont nombreux et s'y ajoutent ceux de la broderie traditionnelle, qu'on peut tout à fait utiliser sur  ce support ou en surépaisseur. on peut évidemment créer en 3 D.

    La tapisserie à l'aiguille  de Rachel Doyle traduit en français (éditions de Saxe), 2013 .L'auteur a été formée à la Royal Needle School et c'est un gage de perfection technique !  C'est un excellent livre pour apprendre à composer, nuancer -ombrer les zones-  et ainsi bâtir soi-mêmes ses tableaux, souvent figuratifs dans le livre, et également l'ordre à suivre pour exécuter sa composition de manière à obtenir une surface nette. Le meilleur de ceux que j'ai lus pour le nuançage des fils, notamment .

     J'ai eu un coup de coeur pour 71 carrés de tapisserie aux points insolites de Dominique Siegler Lathrop et Jeannette Mougenot Editions Tutti Frutti 2013 : même pour moi qui n'aime pas refaire, on le sait , ils sont si beaux que j' ai   envie  au moins de les adapter en d'autres couleurs par exemple... . au delà les points sont très bien expliqués et c'est une mine d'idées pour bâtir des surfaces géométriques ou non. Et il est conseillé de créer ses carrés soi-même ou unités  en re-mélangeant des points. Des combinaisons qu'on trouve rarement ailleurs.

    Les auteurs ont un site qu'on peut visiter et où on peut acheter les fournitures nécessaires à l'exécution de ces carrés.

     Pour ma part, la tapisserie à l'aiguille reste un art que j'ai assez peu exploré (je n'aime pas compter les fils... ) mais il n'est pas exclu que je m'y mette!

     

  • Les broderies en relief

    Lisant dans un blog , à propos de l’exposition des broderies Shams à l' Aiguille en fête  2015 que ce serait une "invention" de la broderie en relief, j'ai envie de dire ce que j'ai appris au fil des ans sur les broderies reliefées et la broderie en relief.

    IL va de soi que je suis preneuse de tout commentaire de personnes qui sur le sujet en sauraient plus que moi. Ou  sauraient autre chose que j'ignore . Ce n'est pas trop difficile, je ne suis pas  spécialiste en histoire de la broderie mais je possède des ouvrages de référence dont l'encyclopédie Autour du Fil  entre autres ..

     

    L'ouvrage  en question précise fort justement que toute broderie par ajout de quelque chose sur un support est forcément "en relief" mais qu'on a coutume d'employer le terme lorsque les points sont posés sur un "renfort" : carton, bois, fils, feutre sont les plus couramment utilisés. Et ce depuis fort longtemps et dans diverses techniques .

    On pourra aussi consulter ce site

     J'élargirai pour ma part aux autres types de reliéf, jusqu'à ceux de la broderie contemporaine. Pour voir des réalisations dans le respect du droit (je n'ai pas le droit de publier des photos d'ouvrages qui ne sont pas les miens sans autorisation ...et le temps d'obtenir une réponse positive éventuelle !) le plus simple est de faire une recherche d'images en entrant le nom de la technique de broderie sur un moteur de recherche. J'avais préalablement mis cette recherche en lien mais ça ne fonctionne pas .

    D'autre part et bien qu'ayant travaillé pour la revue Broderie  d'art en tant que  "créatrice -réalisatrice" -et non simple exécutante- , je m'estime en broderie "amateur éclairé" et non vraiment professionnelle , donc si un(e) pro passe par là et estime que je me trompe ( l'oeil :-) , qu'elle  me le dise (ou peut compléter, rectifier ...

     

     Faisons d'abord un sort aux dites broderies Shams  qui sont certes magnifiques et d'un style de dessins,  couleurs et matières  particuliers mais le procédé qui consiste à rembourrer avec des fils de coton meilleur marché que la soie (ou l'or!) et de rebroder dessus ne date pas de l’avènement de ces broderies. On le trouve bien evidemment dans nos broderies d'or et de soie médiévales où il était un des procédés de "rehaussage" du motif. Le site de Mary Corbet que j'ai donné en lien précédemment  montre comment l'artiste a restauré une broderie d'or médiévale et refait ce reliéfage ...

    On peut constater  que dans la broderie Haute-Couture du style François Lesage que j'ai un peu pratiquée (en amateur!) il existe un procédé de reliéfage sur coton retors  tout à fait analogue. Donc l'invention n'est pas dans le relief , mais dans les résultats et le style de cette broderie particulière.

    Le  procédé existe dans d'autres broderies reliéfées par exemple dans la broderie dite Casalguidi on travaille sur un faisceau de brins de cotons  qu'on recouvre ensuite de point de tige.

    Lien vers un tutoriel de Casalguidi

    On peut reliéfer tout simplement en superposant plusieurs épaisseurs de fils, ce qui se fait couramment en peinture à l'aiguille quand on veut donner du relief à un endroit. On peut voir des exemples sur ce lien  ou en tapant peinture à l'aiguille ou shaded silk dans un moteur de recherche. Outre  que le procédé d'ombrage en lui-même peut donner l'illusion d'un relief parfois d'un réalisme criant de vérité, en trompe-l'oeil .

     On peut aussi et les brodeuses de blanc le savent bien, reliéfer en remplissant de petits points la surface à broder. Le point dit de plumetis un passé plat rembourré est réalisé ainsi .

    Le relief peut d'ailleurs sans renfort être obtenu par le point lui-même et le fil employé, ainsi la broderie en relief dite brésilienne par exemple ou les points de poste et de cast on stich (une sorte de séries  de mailles montées sur l'aiguille comme pour un tricot), de  picot sont couramment employés.

    lien vers un tutoriel de  broderie brésilienne

     

    Et puis il y a le célèbre stumpwork , chéri au Royaume-Uni, qui a connu un retour de faveur dans les années 2000, qui lui, utilise toutes sortes de moyens de reliéfage : des points  tenant au support pour le départ mais traités en liberté pour le reste, des  perles ou autres supports recouverts de points, des ajouts en trois dimensions brodés élément par elément... c'est tout un monde !On y trouve même des figures détachables en trois D , ce sont de véritables sculptures en broderies alliant le bas relief pour ce qui reste lié au fond et la ronde-bosse pour certaines figures détachables .

    L'encyclopédie Autour du fil à la rubrique relief note que l' apogée du stumpwork  date du XVII siècle, et qu'au XVIII on serait revenu, là, comme partout à plus de "simplicité" -relative.

    lien  vers un tutoriel entre mille autres....

    Proche du stumpwork sont les broderies de l'australienne Helan Pierce dont je possède deux livres, j'ai réalisé ces feuilles perlées  avec armature métallique  non en suivant ses modèles, mais sa technique -ce qui pour moi est différent !-

     

    Feuilles perlees 001

    Un des reliefages les plus connus (et à mon avis un des plus faciles à maîtriser ) c'est la broderie aux rubans de soie dite autrefois "rococo" , celle -ci est abondamment illustrée dans moult tutoriels, et sites. Le reliéfage, pour un effet naturel doit laisser assez de liberté au ruban et une bonne brodeuse arrive à le modeler de manière à lui donner un aspect naturel et vivant  . Les fleurs que j'ai réalisées  sur des modèles de Lesage sont faites sur ce principe pour beaucoup mais avec aussi ajouts de perles, de raphia etc ...On pourra citer l'artiste Die van Nierkerk

    Ci dessous un jardin fait selon ses techniques mais encore une fois la création est personnelle, sur une photo de Michèle Lefebvre, que j'ai auparavant retravaillée en art numérique de manière à lui donner l'aspect d'une aquarelle.

     

    jardin-a-Madererefaitrecadrepour-site.jpg

     

    Ce qui nous amène evidemment à la broderie de perles qui peut-être de perles pures  sans rien d'autre, être sur un tissu uni ou associée à un imprimé , et aussi  se mêler aux autres types de reliéfage par exemple le quilting ou matelassage.. Je citerai encore le Brodeur François Lesage , mais cette photo est une composition création personnelle en ruban de soies et perles sur écharpe, réalisée pour la revue Broderie d'art .

     

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    Il faut évidemment faire un  sort au reliefage style "capiton" à savoir boutis, trapunto et..matelassage . Ce ne sont à proprement parler des broderies au sens de fixer quelque chose sur un support, mais ils s'y rattachent par l'emploi des points (le point devant ou avant , parfois de piqûre ou les piqûres machine en piqué libre) . A noter que le tissu dit "piqué" est une sorte d'imitation de ces matelassages.

    Dans cette rubrique on peut ranger les trapuntos embellis de Martine House, qui sont à la fois broderie et rembourrage .Le livre existe encore aux éditions de SAXE .

    qui m'ont inspiré cet ouvrage (toujours  création personnelle d'après une technique "inventée" par une autre artiste )

     

    Souvenir d un ancien monde 2

     

    Et bien sûr il faudrait ajouter les smocks, les manières de plisser et texturer les étoffes, tout ce qui dans l'art textile contemporain comporte de rajouts de matériaux divers (coquillages, mais aussi objets trouvés, épaisseurs de tissus superposées, mélanges de matières non textiles ( , d'inventions chimiques actuelles le célèbre tyvek -il m'est arrivé de le travailler-  et autres moyens de reliéfer "modernes" qu n'ont plus grand chose à voir avec la définition stricte de la broderie en relief .... ni même parfois de la broderie tout court (et qui est souvent art de mixed media: peinture, plastique, papier, bois verre  tout ça mêlé à un peu de fil et de tissu pour la caution textile et parfois-souvent!-  pour le plaisir de nos yeux, mais avec hélas souvent aussi une sorte d'arrogance par rappport à l'imagination dans les œuvres fondées sur des techniques et matériaux plus anciens. Comme si l’imagination dépendait de la mode et de la nouveauté du  matériau utilisé, de sa "modernité" ...

    Je citerai sur ce sujet le livre de Maggie Grey Raising  the surface with machine embroidery . Resterait aussi à aborder le feutrage qui naturellement rembourre et se rebrode .... On voit qu'on n'en aurait jamais fini !

     

    Pict0302

     

     

    Feutrage et broderie armée sur broderie anglaise dans ce tableau Coquelicot