Broderie et écriture
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 07/03/2023
- Dans opinions
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Je renvoie, tout d'abord à l'article Linéaire C , présentait un sampler de points utilisés pour les crazys quilts sous forme de livre.
J'ai commencé récemment ces "rouleaux" mue par plusieurs élans, "envidées" . Les rouleaux textiles sont à la mode en ce moment, mais on le sait des modes je prends ce que j'avais souvent envie de faire, parfois avant que tendance ça ne devienne. Revenir aux rouleaux , c'est aussi revenir aux formes achaïques de recueils de textes, les "volumina". Mais on le verra plus loin on écrivait aussi sur du tissu (nous n'avons rien inventé et prétendre innover en le faisant fait sourire.) .
Je suis fascinée depuis toujours par les écritures anciennes, les vieux parchemins, les grimoires , les langues non encore traduites ou incomplètement . Ces signes qui certes ont un sens, mais soit uniquement pour les spécialistes, soit encore caché, résistant à la traduction. Et même les messages dits chiffrés.
Ce qui m'attire c'est précisément cette part cachée de sens qui nous échappe et qui pourtant est.. C'est pourquoi aussi je ne réprouve pas les sens multiples dans mes poésies tout au contraire ce langage verbal mais non élucidé, soit volontairement codé , (l'un se déchiffre et l'autre se décrypte), existent et sont connus . Déjà lorsque dans le Textilionnaire je travaillais sur le projet grimoire", j'étais sur cette voie d'inspiration , et également quand je rapproche les motifs sur les étoffes en leurs lignes et intrications d'un langage.
Le langage on le sait n'est pas qu'une langue. Il inclut d'autres expressions .Il m'est apparu en collectionnant les livres de broderie, que les points en eux-mêmes selon la brodeuse qui les choisit , avaient sinon un sens rationnel, au moins un sens visuel et tactile. Chacune a son parcours, ses utilisations pour "dire"ou faire ressentir cela ou cela, ses "voies" et même si beaucoup restent dans l'objectif utilitaire-décoratif ce qui n'exclut pas le reste, il se dégage depuis quelques années d'autres possibilités. Les points sont souvent organisés en "dictionnaire" ou "encyclopédie" et chacune est différente de l'autre. Il m'apparaît aussi qu'alors qu'on peut en dénombrer jusquà 300 différents, beaucoup de brodeuses se bornent à une petite dizaine. Il est vrai : un des plus simples le point droit ou lancé suffit à lui tout seul à assurer la "peinture à l'aiguille" dans la mesure où le célèbre passé empitéant dont elle dérive est constitué de points droits, ainsi que le merveilles de la broderie blanche au point dit "passé"ou plumetis .
Egalement le nom des points dans une même langue varie, créant parfois une polysémie involontaire. Ainsi en anglais notre "point d'épine devient "feather stitch " point de plume: nous avons sélectionné l'agressivité qui peut s'en dégager, et nos voisins la légereté de ce point aéré. Pour les non initiés un lien vers ce point.
Et puis j'ai lu récemment l'histoire de la Momie de Zagreb et du liber linteus Zagrabiensis dont on trouve l'histoire ici . Ces bandelettes trouvées sur une momie égyptienne et écrites en étrusque sur du lin (l'étrusque reste une langue imparfaitement traduite), rencontrant celle de la mode des rouleaux textiles m'a donné envie de lignes de points en suivant le parcours d'une brodeuse que j'aime beaucoup Christen Brown , pour commencer. Je n'ai pas fait tous les points mais ceux qui justement me "parlaient" comme écriture ou signes et soyons honnête, j'ai laissé de côté quelques-uns que j'avais du mal à faire quitte à y revenir après entraînement . J'y ai adjoint des dentelles tant mécaniques que manuelles dont les dessins sont pour moi encore un langage . Le tout s'appelle : Les bandelettes de la momie coquette .
Trois rouleaux sont actuellement achevés .
Le voeu pieux habituel :
Avec le souhait que des personnes plus autorisées que moi se mettent un jour à regarder les points autrement et, en même temps que d'ouvrir la broderie à tout et parfois n'importe quo , au prétexte de la renouveler , on revienne aussi de temps à autre donc explorer aussi ce langage-là autrement qu'en nous parlant de "texture" , .Car oui chaque point parle, comme chaque tesselle de tissu par une variété de caractéristiques : sa forme (droit courbé), son orientation sur la surface, -et là on est encore dans le dessin - mais aussi et surtout par le fil qu'on va utiliser, nombre de fils, épaisseur manière dont il est filé (crucial, cela!) plein ou torsadé, mouliné, mercerisé -son épaisseur . sa brillance ou sa matité, Sa matière (lin soie coton ou tout autre chose mais ces matières-là aussi .et sans les taxer de "traditionnelles"( à ce compte un peintre est traditionnel quand il use de pigments. ), Ses éléments autres que fils : plumes boutons, pierres , perles, applications diverses - écailles de poissons, élytres d'insectes .mais n'importe quoi fixé sur n'imprte quel support est-il encore de la broderie ? De l'art je le concède quand c'en est, mais qu'on réfléchisse et au sens des mots et aux pratiques qui ont donné leur nom à cet art. Des clous plantés dans un mur sont-ils de la Broderie ? Un fakir est-il un brodeur "innovant" ? question qu'il ne faut jamais poser si on ne veut pas être taxée de ringardise ! .. J'ajouterai : il y a encore la juxtaposition, les espaces qu'on va laisser ou pas entre, les superpositions éventuelles , les hybridations, ses déformations , les combinaisons avec d'autres points , aussi . Et tout cela serait juste du joli pour décorer niaisement ? sans aucune signigication, visée , imagination originalité, prifondeur ? Je n'en croirai jamais rien !
J
Commentaires
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- 1. françoise la stéphanoise Le 18/05/2023
merci de partager vos œuvres et votre démarche artistique...
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