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  • Agnès Guillemot Les malices du fil

    Les malices du fil

    Petits démêlés sur la broderie et l'art d'orner

     Agnès Guillemot

    Transboreal  collection  "petite  philosophie du voyage"

     

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    A quoi pense une brodeuse qui réfléchit à son art serait un bon sous-titre aussi...

    Voilà un livre que toute brodeuse peut aimer à lire !   Même si et surtout  nous sommes là aux antipodes des dames qui n 'ont cessé de me dire "on fait ça sans se prendre la tête, juste pour se faire plaisir'. Il s'agit ici d'un métier. Et toute non brodeuse aussi  car somme toute il s'agit bien d'un e "phlosophie" et d'un "voyage" et l'ouvrage dépasse de beaucoup si je puis dire le cadre du métier !

    J'aime les brodeuses qui réfléchissent  sur cet acte de broder, ses gestes et sa geste, son histoire dans celle plus vaste du monde (et pas que l'histoire de l'art dont elle lest  plus souvent absente ou marginalisée) ...et je prétends en être une, même si mon parcours n'est aucunement comparable à celui  prestigieux et professionnel de  l'auteure  . Mais la vieille  dame qui s'est sentie appelée il ya bien longtemps par ce double attrait des tissus et fils et des mots se sent le droit de tenter ici une recension du livre et un rapprochement ...

    Le parcours de l'auteure-qui est aussi éditrice- est assez atypique comme on dit. 

    On peut en avoir une idée précise sur ce lien. Venue à cet art à 25 ans et avec des visées professionnelles, d'emblée,  et une formation donc exigeante.  à la réputée   Ecole Duperré et un des intérêts du livre est de nous faire partager les gestes, les émotions, les réflexions d'une brodeuse en formation puis  atelier ; la confrontation aux exigences souvent extrêmes d'un art où la virtuosité compte , mais aussi une forme d'instinct...Discipline , rigueur et imagnation.

     Mais l'auteure ne se borne pas à cela , elle nous dit son émotion devant les broderies d'autrefois vues dans les musées et ce ressenti est si exactement semblable au mien   car je  n'arrive jamais à ne regarder  que "le travail" mais imagine derrière une vie, des gestes , une époque, sans doute parce que la broderie -et plus largement les arts textiles-  sont des  arts du toucher autant que visuels, un art aussi que la connaissance technique permet d'apprécier autrement qu'en profane  J'ajouterai un art où il ya toujours à apprendre.  Et si comme le souligne   notre brodeuse, je ne considère pas comme inutile sinon de connaître "tous les points" puisqu'on "ne lira jamais tous les livres d'une bibliothèque" mais suffisamment pour se dire, j'aime à en découvrir encore,  à les combiner parce j'y vois des signes et des écritures rejoignant par là même l'auteure qui analyse fort justement la part symbolique de l'acte de broder, des motifs, et qui pas plus que moi ne les réduit à leur aspect décoratif.

    L'auteur évoque aussi des livres de littérature qui me sont très familiers    à commencer par le Rêve de Zola, mais aussi lL'Elue  de Loïs Lowry -nous avons là le même terreau littéraire si je puis dire- (nos lectures à cet égard ont été les mêmes !), mais aussi la vie de Colette qu'elle choisit pour thème de travail de ses trois années de formation à l'école Duperré  : " la broderie fut le fil qui m'a sortie d'une impasse danslaquelle l'amour seul des mots, qui croyais-je à l'époque- serait le rapport le plus heureux que j'établirai avec le monde, m'avait entraînée" 

    Tout serait à citer dans ces 89 pages si denses.  Que l'auteure évoque l'aspect langage et symbole de la broderie (qui m'est si cher ! )  : "par l'aiguille s'esquisse une véritable sémiologie insupçonnéet partiellement obscure, véritable de tour de Babel qui recueille les préoccupations, les idées et les rêveries "humaines " ou la part de l'imaginaire "l'excitation de découvrir quelque chose de profondément nouveau: pour la première fois, j'ai exprienté un moyen d'expression autre qu'intellctuel, écrit ou oral, scolaire, universitaire ou quotidien . J'ai compris qu'on pouvait considérer un sujet, décrire une émotion ou un paysage, appréhender l'univers autrement que de façon abstraite, conceptuelle, silencieuse et intériuure ou en traduisant ses pensées par des mots prononcés ou notés.Cela m'a ouvert un horizon infini"

    Mutatis mutandis , même pour moi qui ai appris à broder seule, des livres divers sur les genoux (et je continue ainsi car c'est ma manière, mon parcours, mes apprentssages) c'est ce qui s'est passé peu ou prou quand à 32ans j'ai découvert un autre art textile : le patchwork .  Broder pour moi est un acte qui a accompagné mon enfance et ma jeunesse et mon quotidien, la poésie aussi il n 'y a donc pas eu à l'âge adulte de révélation d'un art jugé à tort manuel par rapport à mon parcours plus intellectel de  professeur de Lettres Classiques.

    L'auteur examine aussi la place des femmes dans cet art : "mais que la brodeuse reste à sa place, dès qu'elle s'élève, dès que ses créations la distinguent, l'ombre dun hommene tarde pas à la faire retourner à la nuit"   évoquant notamment May Morris  occultée par son père William  (mais  qu'on redécouvre) et aussi tous les anonymes chargés d'un transmission familiale ou associative  et les difficultés de ce métier quand il en en est un,  ses  souffrances  physiques ,ses exigences en vitesse  et coût qui doit rester modéré pour tenir face à la conuirrence...et la mondialisation !

    "Le monde enchanté des fées aux doigts d'or fait rêver. il est vaporisé à coups de gros plans et de ralentis maîtrisés produites pr les marques de luxe; mais derrière un respet sncère pur les méters d'art et une révérence pour celles et ceux qui les exercent s cache un impératif de valorisation économique.les conditions d'exercice de la profession ont précaires (..) p 67"

    Le mieux pour saisir cette philosophie de l'acte de broder et ce riche parcours est... de lire le livre, cette recension n 'est qu'approximative. Merci en tout cas à l'auteure , la lire pour moi a été une joie  (enfin un ouvrage qui pose un regard autre!) et  dans un  langage clair, si différent  -qu'on me pardonne le coup de griffe!-   de certains discurs d'accompagnement de mes consoeurs "branchées " art textile contemporain, et   s'appuyant sur une culture réelle   ) et vu la jeunesse de la brodeuse, un espoir ! 

     

     

     

  • Anonymous was a woman

    Anonymous was a woman

    Auteur : Mirra Banks

    1979

     en anglais

    éditeur :  St Martin Press , inc.(livre épuisé acheté d'occasion)

      Ce livre est cité dans l'ouvrage Stitching resistance dont j'ai déjà fait le compte rendu

     Lien vers Stiching Resistance

    Bien avant qu'on en prenne conscience en France (et encore de manière clivante, le plus souvent !), l'auteur s'est intéressée  aux travaux artistiques des femmes américaines dans deux domaines : peinture et travaux textiles  (broderies essentiellement tapisserie à l'aiguille et quilts , avec souvent un mélange  textile, broderie et peinture notamment (donc on n'innove pas au XXI siècle, en le faisant). Le livre est constitué de témoignages  relevés dans les journaux intimes de l'époque ou des ouvrages littéraires autobiographiques  et d'illustrations desdites oeuvres . Il est rare bien sûr qu'oeuvre et texte coïncident puisque si les artistes ne sont pas toutes anonymes,  elles sont restées inconnues, pour la plupart .

    De ces femmes  oubliées Mirra Banks écrit en présentation : (je traduis pour la commodité de la lecture )

    " Rarement conscientes d'être des artistes, ces femmes essentiellement occupées à élever des enfants, assurer l'organisation des fermes et des maisons, ces femmes ont cependant embelli chaque phase de leur expérience, depuis l'enfance jusqu'à la  vieillesse et exprimé tout ce qu'elles ont appris de la vie et de l'art  dans un travail  décoratif d'une étonnante beauté " .(à noter que décoratif ne signifie pas ici juste pour faire joli, comme chez nous!)

     Le livre suit effectivement les époques de la vie de ces femmes d'autrefois .

    La première partie évoque l'époque de l'école et l'apprentissage des samplers de broderies, mais également de l'apprentissage du patchwork -qui faisait partie de l'éducation scolaire- si on en juge par cet extrait d'un livre de Lucy Larcom  A NewEngland girlhood  : "Nous avons appris à coudre un  patchwork à l'école dans le même temps que nous apprenions l'alphabet ; et presque chaque fille grande ou petite a un   couvre lit quilté de son cru commencé avec en vue le trousseau de sa future maison . Je ne suis pas vraiment passsionnée par la couture, mais j'ai pensé qu'il valait mieux commencer le mien de bonne heure. Aussi ai-je réuni quelques carrés de calicot, et entrepris de les assembler, à ma manière habituelle qui est indépendante, sans solliciter une direction.J'aime assortir ces petits bouts de cotons imprimés , parce qu'ils sont les restes de robes que j'ai vu  porter et elles m'ont rappelé les personnes qui les portaient ."

    A noter que je pourrais signer aujourd'hui encore les deux dernières phrases et qu'elles me confirment dans l'idée qu'il y avait beaucoup plus de libre  création dans ces surfaces que de nos jours quand on copie ou interprète de très près un modèle avec un pas à pas qui vous mâche tout le travail.

     La deuxième partie concerne le mariage, et la troisième la vie quotidienne . C'est de celle-ci que j'extrais ce témoignage touchant issu d'une lettre d'une certaine Marguerite Ickins à sa grand-mère  :

    " Ce travail m'a pris plus de 20 ans, presque 25 (...)Toute ma vie est dans ce quilt (...)Toutes mes joies et tous mes chagrins sont cousus dans ces petits morceaux; Quand j'étais fière de nos garçons et quand j'étais en colère contre eux. quand les filles m'ennuyaient ou m'inspiraient un chaud sentiment de tendresse. Et John aussi .Il est cousu dans ce quilt et aussi nos trente ans de mariage. Parfois je l'aimais et parfois j'étais assise auprès de lui, le détestant, et j'assemblais les morceaux ensemble. Aussi y a -t-il tout dans ce quilt, l'amour et les craintes,mes joies et chagrins, mes amours et mes haines. Je tremble par fois en pensant à ce que ce quilt sait de moi ".

    Ce quilt nous ne savons pas à quoi il ressemble ... perdu dans la nuit des temps et c'est bien dommage. Et ce dans un pays qui a plus de considération pour cet art que nous (alors en  France, vous pensez bien !) .

    Ce quilt n'est  donc pas de l'auteur de la lettre, mais  illustre la période "wedding quilts" ces ouvrages (ou osons le mot oeuvres )  , c'est un "sampler" aussi montrant différents "blocs" ces carrés qu'on assemble  :

     

     

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    Evidemment l'éducation des filles, à cette époque , est religieuse et domestique, et obéit à  une morale qui ferait se dresser les cheveux sur la tête à beaucoup d'entre nous, mais on constate à lire ces extraits de journaux  et de lettres que ça ne les empêche ni d'imaginer, ni de rêver. Tout au contraire. On ne peut reprocher à quelqu'un d'une époque de se conformer au "bien" et à la morale admise de cette époque-là. Que dira-t-on de la nôtre plus tard si les moeurs changent, ce qui est probable ?  Et il est infiniment dommage qu'on n'ait conservé de ces oeuvres que l'idée qu'elles étaient signe de "servage et d'obédience" alors que précisément c'était la zone d'évasion et d'imaginatioon que la société d'alors permettait . Les images en attestent, à chaque page que je ne peux montrer toutes tableaux superbement composés et dont on peut penser qu'ils ont été dessinés par les brodeuses  (certains  mélangent aquarelle et broderie ) et aussi une maîtrise de ce qu'on nomme "peinture à l'aiguille".  Cette oeuvre de Mary Green, datée de 1804 propose une composition parfaite. Un journal atteste qu'à l'école " l'ouvrage d'aiguille ormental est enseigné " :

     

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    Et justement cet acte créatif a été occulté , ce livre que j'ai eu du mal à trouver est un des rares qui évoquent ces travaux.

    Et  à présent un voeu pieu, à l'égard des millions d'anonymes ou inconnues que nous sommes ... Soyons moins modestes  et si nous créons , faisons en sorte que nos oeuvres soient dignement conservées. On sait qu'on n'aura pas  droit -ou rarement - à une recension côté grands arts, (j'ai eu  ! merci je ne dis pas cela par dépit ou frustration!) mais alors débrouillons-nous nous mêmes : écrivons aussi sur ce qui a suscité nos  créations, ce n'est pas de l'outrecuidance, comme on me le dit, c'est une juste remise en place   d'oeuvres injustement exclues de la culture artistique dite contemporaine. Nous existons dans notre siècle et dans les diversités de nos créations. Faisons savoir que nos oeuvres existent, même si tout est fauit pour nous reléguer dans notre "ghetto culturel".

    Et soyons aussi honnêtes, ce qui est pour moi la seule façon valable d'être réellement humbles et modestes : disons nos sources , si nous en avons,  et cessons de faire croire que nous sommes l'auteur du kit ou du modèle piqué à une revue , ou qu'empruntant le graphisme à un peintre abstrait du XX° siècle nous sommes des "novatrices" sublimes , plus artistes que celle qui part d'un poncif de son art. 

    Et si nous avons pouvoir à le faire, insistons pour que nos oeuvres aient le droit à la conservation  au même titre que les grands arts, elles valent bien les tas de gravats et de bûches dont les musées  d'art contemporain sont parfois  encombrés .   Si  des capsules de yaourt assemblées sont du  plus grand art textile que nos compositions  (personnelles et signifiantes tout autant )    d'étoffes pourvu qu'on les assortisse du discours congruant le prouvant, écrivons les nôtres de "discours",  je peux aider qui n'y parviendrait pas ..... Faisons des index de nos oeuvres sur nos sites , expliquons, témoignons .... Signons nos oeuvres en indiquant qui a fait quoi : designer- réalisatrice- quilteuse  nous aiderons les historiens du textile futur ;  cessons de faire "profil bas", pour ne pas être (sauf si on le souhaite) des anonymous women du XXI siècle .

     

     

    Dscf392red6On peut si on le souhaite et sur ce dernier point m'écrire sur chiffondart@aol.com

     

  • Broderie : perfection ou expression ?

    Je me suis intéressée pas mal, ces derniers temps à la peinture à l'aiguille .

     En français ce terme désigne surtout des broderies très réalistes -ou très normées-  réalisées au point de passé empiétant ou empiété (long and short stitch en anglais , parfois aussi désigné par l'expression silk shading .)

    Encore que le passé empiétant, ce soit souvent expliqué très dfféremment du long and short stich donnant un effet de relief en faux semblant dont j'ai déjà parlé dans la broderie en relief .Dans les livres et revues avec lesquels j'ai appris, enfant, les points étaient imbriqués de la façon qu'on peut voir sur ce lien par exemple :

    emprunté à  un site de brodeuse , mais on trouve ce schéma un peu partout. Toute personne qui a réalisé des  napperons "banals"  le connaît.

    Donc  une ligne de démarcation se voyait , ou bien on dépassait un peu sur le rang précédent, entre deux points  mais toujours à la même hauteur.

     Or dans la peinture  à  l'aiguille un rang mord, parfois largement, dans le précédent  et le départ des points dès le second rang s'échelonne de manière à créer justement une impression naturelle, sans démarcation . de plus, pour les oeuvres complexes, on travaille avec plusieurs aiguilles de manière à pouvoir mêler les nuances sur un même rang. Et avant de se lancer il existe un travail préalable qui consiste à prévoir l'orientation des points , la répartition des valeurs et couleurs ,  -c'est le plus difficile pour les formes complexes notamment volutes,  drapés et visages - , de celle-ci dépend l'effet  de lumière sur la surface réalisée, et le relief .

    Au passage si vous voulez un cours d'entraînement gratuit et très bien fait je vous renvoie une fois de plus sur le site de Mary  Corbet, brodeuse émérite.

     Il y a dans ce domaine de grand( e)s artistes (je vais en oublier) : les liens renvoient sur les sites respectifs. La plupart ont écrit aussi des livres .Je ne suis pas autorisée à publier des photos de leurs ouvrages , mais je vous invite à cliquer : cela en vaut l'effort !

     La française Jocelyne Kurc, meilleure ouvrière de France,  dont je n'ai malheureusement pas pu me procurer les livres (au passage si vous vous débarrassez des vôtres je suis preneuse!) , La sud africaine Trish Burr (à qui va ma préférence pour le côté très didactique de ses livres)., L'anglaise Helen  M. Stevens qui use d'un point sensiblement différent du passé empiétant qu'elle appelle opus plumarium   inspiré  du point de Kensington .   L'anglaise   Sarah Homphray diplômée de la Royal  needle school   qui a écrit un livre traduit en français , remarquable pour son étude des valeurs , à partir d'une photo noir et blanc du modèle couleur.Je ne cite ici que les personnes qui créent la broderie, pas celles qui exécutent leurs modèles, même si j'en salue l'exploit... dont je serai incapable, sauf à passer ce qui me reste de vie à m'y entraîner, et encore ...

    Sans oublier les chinoises qui sont maîtresses en cet art difficile  Je ne citerai  que Shao Xiaocheng et Xiao Yao qui ont écrit un livre sur le sujet  fort bien conçu .

    Différemment et proposant des sujets figuratifs on trouve des artistes comme Emily Tull : là les points échappent à la perfection normée pour montrer tout autre chose.

    Et en enfin découverte récemmment l'oeuvre impressionnante de  Cayce Zavaglia

    D'aucuns ou d'aucunes seront plus admiratives de telle manière de "peindre" humains, feuillages, animaux, paysages.

    Je rappellerai aussi  l'oeuvre de Marie Monnier qui est une véritable peinture à l'aiguille à la fois figurative et symboliste et d'une perfection ..expressive , qui échappe à elle-même, si je puis dire ...la perfection technique est oubliée derrière le rêve, la puissance émotionnelle de tels tableaux ...Il est vrai l'artiste avait  aussi une maîtrise totale du dessin d'art.

    Et on peut aussi user d'autres points que le passé empiétant pour peindre à l'aiguille témoin l'oeuvre , au point de Beauvais, de Caroline Roussel .

     Au terme de quoi je regarde mes propres broderies comme étant par comparaison totalement imparfaites. J'ai tout de même réalisé dans les années 1990  quelques broderies d'oiseaux  "passables" d'après photographies ,sans formation aucune avec maître diplômé, ni livres spécialisés, ni tutoriels sur internet, comme aujour'dhui .. ..Je ne le renie pas, même si aujourd'hui je m'y prendrais sans doute autrement pour le faire.

     

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     J'admire la perfection hyperréaliste , je sais combien de travail il faut pour tenter seulement de s'en approcher,  j'admire aussi la liberté qu'on prend dans sa propre vision de ladite réalité ou de la forme dont on part .

    Pour m' y être un peu essayé, je n'ignore pas le difficultés techniques d'une peinture à l'aiguille au passé empiétant sans défaut, mais c'est précisément le côté sans défaut qui ne me va pas ... Je pars en tirant la langue et avec l'idée  de faire quelque chose selon les normes -que je connais- et invariablement, j'introduis des irrégularités . Ainsi cet exercice sur un dessin personnel "à l'ancienne" la fleur bleue était prévue en passé empiétant droit   avec dégradé de couleurs (le silk shading) et puis tout à coup j'ai fait ce qu'on recommande de ne pas faire ... j'ai changé  brusquement la direction des points ..évidemment comme le motif est censé n'être que "décoratif" je n'y ai pas droit, aux yeux des censeurs, c'est  semble une erreur un "poor craftmanship", un niveau pas correct (à y perdre dix points de vie, au moins!)  . Et pourtant ! Est-elle plus laide, moins vivante ainsi ?Je ne parle pas des fleurs oranges pour lesquelles j'ai choisi une de mes manières préférées de remplir une surface ; le point de tige en juxtaposition de rangs. Le tout avec un fil de soie floche de la finesse d'un cheveu ...

     

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     Quand je vais dans un musée côté peinture je m'aperçois que le peintre, lui a le droit de montrer sa personnalité dans la manière dont il use de ses pinceaux  et que la recherche  de la perfection  réaliste n'est pas toute la peinture.... et que si on jugeait des grands peintres comme on en  juge des grands brodeurs  : pas un blanc surface lisse bien remplie sans anicroches ..il faudrait vider les salles de beaucoup de musées et qu'on ne me dise surtout pas "ah mais eux, ils ont droit car Beaux-arts" ! Sinon  je hurle au préjugé nobiliaire dans la minute qui suit . Si eux ont le droit au nom de leur expression et originalité, nous, brodeuses aussi et même en brodant une volute "traditionnelle". Car dans des portraits, nus ou paysages figuratifs on reconnaîtt l'artiste aussi  à sa manière de peindre ..Et même dans toutes les formes qu'il choisit de reproduire , et je repose ici la question du motif-poncif ...n'est(-il que cela ? brodé tissé imprimé c'est poncif peint ça deviendrait de 'art ? Comment pourrais-je le croire ?

    Un  motif d'étoffe peint par Klimt et par Matisse est-ce tout à fait pareil ?   Et par un impressionniste ?Alors rendu par un brodeur ce même motif serait tenu au perfectionnisme rigoureux sans bavures ? C'est un point sur lequel je n'ai guère vu d'interrogation puisque la broderie à partir de motifs traditionnels est classée artisanat et non art, et c'est là tout le problème .  Pourquoi donc les brodeurs  eux-mêmes tiennent absolument à ce degré de perfection et de maîtrise dans les formes dites décoratives alors que le seul moyen de les faire s'échapper vers une expression personnelle, et de les sortir du "joli-décoratif- poncif" c'est précisiment de permettre à l'aiguille comme au pinceau d'y apposer sa marque ? Donc forcément l'irrégularité , si elle est voulue, ou marque d'un tempérament  ... ...La régularité c'est précisément  le contraire  : des points qui vont ressembler à s'y tromper à la fois à ceux d'une machine , et à ceux d'une autre personne maîtrisant le geste de façon quasi mécanique . Le résultat certes est époustouflant ... on peut aller jusqu'à dire que c 'est le summum d'une conception de l'art que de s'effacer ainsi derrière la réalisation parfaite  pour rendre le "vivant"  . Je l'accepte : pour les autres, si c'est leur choix ! On peut avoir d'autres approches .

     

    Lorsque je brode  à partir de mes propres dessins ou photos j'aime, par exemple  qu'il y ait de la texture du relief de la "pâte" , de la "patte" aussi le tout lisse de la peinture à l'aiguille à un fil de coton ou de soie n'est pas mon choix , forcément. Tout simplement parce que pour moi l'art textile n'est pas fait que pour le regard , mais aussi pour le toucher. J'y reviens toujours .

    Ainsi dans le tableau abstrait nommé Coulures j'ai usé de points qui évidemment peuvent paraître grossiers en considération  de ces merveilles faites à la loupe et calculées au millimètre près  ..pour une surface sans défaut, sans aspérité, sans rien qui accroche..

     

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    et le triptyque aux pavots qui a été publié par Brodere d'art , est aussi une autre manière de peindre à l'aiguille :

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    Et il faudrait que la broderie, comme le patchwork, accepte cette liberté-là  du "coup d'aiguille" et même pour les motifs classiques sans hurler à la maladresse ou au niveau médiocre. La médiocrité est à mon sens aussi et tout autant  dans la manière étriquée et conventionnelle des critères d'appréciation  Lesquels motifs peuvent être vus comme des écritures, des symboles... ou des formes expressives qui précisément ne peuvent l'être qu'en s'évadant du "normé".

     

    Je m'explique : , si je calligraphie un texte je choisis d'effacer la personnalité de mon écriture pour des pleins et des déliés  normés aussi parfaits que possibles ressemblant à d'autres pleins et déliés . J'obtiendrai une écriture sans marque de ma pmersonnalité, normée, parfaite. C'est un art,et diffcile techniquement ,  certes le même que celui de la brodeuse qui réalise une volute en peinture à l'aiguiille avec points rendant pile point le mouvement et le volume .Ce texte s'il est de moi fait que je suis aussi écrivaine (mais ça n'influencera pas forcément  la calligraphie normée  qui est indépendante du sens, donc de l'expression).  Je peux aussi l'écrire de ma propre écriture, celle qui révéle ma personnalité . Ainsi devrait-on faire avec les  motifs de broderie qui non ne sont pas que jolis-décoratifs, mais ont porté souvent des symboles, à travers les siècles  et ne pas obliger à la "calligaphie" obligatoire avec eux, qui a pour visée tout autre chose, sinon, ce serait une "incapacité " technique . Certaines brodeuses sont, métaphoriquement s'entend, callligraphes admirables , d'autres écrivaines à l'aide de motifs . Si on veut voir  les motifs juste comme du parfait à "chiader" en les interprétant ou si on les considère comme un moyen de dire, de se dire : tout est là . On peut être les deux, calligraphe et écrivaine mais cela devrait demeurer un choix et pas une façon d'évaluer, d'exclure ...Une oeuvre s'apprécie ou devrait s'apprécier aussi  à sa visée .. car exiger de la perfection technique de qui précisément veut y échapper, c'est condamner sans comprendre et surtout sans ressentir ... c 'est une fois de plus regarder une oeuvre comme on pense qu'elle doit être et non pas comme elle a été conçue..C'est sur ce point que j'invite à une réflexion ...

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  • Mille manières de créer

     

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    TItre: Mille Manières de créer

    Auteur : Françoise-Tellier Loumagne

    éditions de La Martinière 2010

    Toutes celles qui ont approché l'art textile en ses mouvances actuelles ont entendu parler de l'auteur, professeur émérite et artiste reconnue. Je dirai même sans la connaître, rien qu'à l'avoir lue : artiste généreuse comme celle de l'article précédent  mais différemment . J'espère qu'il ne paraîtra pas outrecuidant que la petite  main que je suis se permette d'avoir une opinion sur le livre d'une grande , et grande à très juste titre. Les livres sont faits pour être lus et commentés et de plus la préface invite au débat.

    Ce qui frappe d'abord dans ce livre, ce sont les photographies, points de départ de l'inspiration , comme  dans Broderies du même auteur que je possède aussi. Le fil conducteur de ce livre est le thème des  cailloux et d'image en image, de réflexion en réflexion on parcourt, en petit poucet, tout un cheminement de création vivante, débouchant sur des ouvrages qu'on peut "refaire".
    Les photographies en elles-mêmes peuvent donner envie de prendre son appareil pour chercher des points de départ .. mais on explore aussi d'autres manières de se mettre en route. Il est  noter que les tissus que l'artiste pourtant "sait" en  experte , n'interviennent pas à ce niveau , mais ensuite. C'est pourquoi celles qui comme moi ont l'habitude de partir des étoffes pour ce faire auront du mal peut-être à entrer dans le mouvement inverse : de la réalité à la photo, de la photo à une réalisation qui vise au réalisme plastique ... mais se confronter à ce dont on n'a pas l'habitude fait partie des conseils judicieux de l'auteur.

     Il est impossible de recenser ici toutes les "ouvertures" . Je dirai qu'on propose des pîstes   sous la forme : un chemin a toujours deux sens  au moins.. et des bas côtés ! Mieux que de pistes donc des carrefours. Cela peut décontenancer les personnes qui ont l’habitude qu'on pense et décide pour elles et qui ont besoin d'une guidance qu'on dira autoritaire.

     Ce livre est un livre qui se lit presque comme un traité de philosophie de la création et je crois qu'un artiste d'une autre discipline y trouverait tout autant son profit. Les conseils sont présentés à l'infinitif... c'est pédagogique, certes. un peu injonctif peut-être pour qui invite  à trouver ses propres voix .. Exercice difficile qui consiste à guider sans enfermer ... j'aime bien les passages où l'auteur s'exprime à la première personne,  ...même si nous sommes dans un pays où le  "moi est haïssable ".

     Pour les ouvrages proposés , il ne s'agit évidemment pas d'ouvrages conventionnels à reproduire ...quelques explications sont fournies , parfois détaillées, parfois plus succinctes, mais qu'on ne s'attende pas à des pas à pas" à l'américaine" où on vous tient la main à chaque étape et de ce fait, je crois sincèrement que si on veut vraiment refaire ce qui est proposé, il vaut mieux avoir des  bases sérieuses en art textile : et un certain  nombre de matériaux adéquats, surtout si on reste dans une perspective d'imitation ou d'adaptation.

    C'est un peu ce qui me gêne dans ce livre où , si   je suis éminemment d'accord avec presque toutes les phrases, les réflexions sur la création et les invites à s'y lancer , je trouve que ces exercices, si on les suit, mènent à l'exact contraire de ce qui est énoncé...puisqu'il s'agit de trouver ses propres voies.  Comment trouver ses propres voies en refaisant la même chose que l'auteur de la même façon sauf à titre d'entraînement pratique ? J'entends par là : on n'a pas forcément envie de partir de photos de minéraux.  Ce qui est fait sur les cailloux évidement peut s'appliquer à l'herbe ou au  à tout autre élément naturel ou non de notre environnement, mais les ouvrages eux, alors seront difficilement faisables avec les mêmes techniques et si on doit trouver les siennes propres, alors ces exercices me semblent moins utiles.

     C'est à ce niveau une façon de créer déclinée en mille facettes et variantes , plutôt que mille façons de créer puisque la source graphique est unique (la nature, les cailloux), ce qu'on peut observer réellement .. par exemple si on  a des visions intérieures et qu'on part de ses rêves colorés , de ses émotions  mises en abstractions, ou d'un texte poétique ...et non de la réalité  tangible et observable, ou tout simplement des tissus, et de leurs motifs, c'est plus difficilement applicable.

    Pourtant ,  dans ces mille facettes, il à peu près impossible de pas trouver une réflexion, une piste recoupant ses propres cheminements créatifs.

     Je signalerai les développements sur la perfection aussi qui est entendue autrement que comme les points toujours égaux et sagement alignés , plutôt  une sorte d'exigence par rapport à ce qu'on désire obtenir (sachant toutefois y renoncer ), ce qu'elle dit des erreurs qui sont des ouvertures , de la fantaisie , de la révolte contre les sempiternels thèmes des revues de loisirs créatifs,  je ne puis qu'y adhérer de toute mon âme, si j'ose dire.

    En résumé utile pour méditer, réfléchir sur ses propres pratiques , s'emplir les yeux de beauté,  certaines réalisations coupent littéralement le souffle .. mais pas un livre à démarquer et copier, ce qui pour moi reste une qualité  et non une critique et pas non plus un livre pour débutantes au niveau technique s'entend. En revanche j'en  recommanderai la lecture à toute personne qui a envie de se précipiter dans un  club de loisirs  dits créatifs pour apprendre  trop souvent (pas toujours !) ...à faire ce qui se fait parce qu'on a appris qu'il "fallait " faire comme ça.

    lien vers le site de l'auteur

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  • the complete photo guide to art quilting

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    Titre : The complete Photo guide

    to Art Quilting

    Auteur : Susan Stein

    editeur creative publishing international

    2012

    en anglais

    Parmi tous les livres sur les techniques récentes ou présentées comme telles, celui-ci est un de ceux que je préfère, parce qu 'il est intellectuellement honnête et ne repose pas seulement sur  une série de recettes qui garantissent de vous transformer en artiste. De plus il reste proche du textile, même s'il intègre l'ajout d'autres matériaux .

    Après une préface de Robert Shaw le spécialiste bien connu des art quilts , l 'Introduction déjà annonce la couleur, si j'ose dire, puisque l'auteur tente de répondre à la difficile question: "qu'est  ce qu'un art quilt ?", éliminant d'entrée la réponse "c'est un quilt qui n'est pas traditionnel", pour  proposer d'autres pistes : un quilt qui serait destiné non à être mis sur un lit, mais exposé sur un mur, un quilt qui pourrait avoir de petites dimensions, et qui n'étant pas destiné à être lavé peut intégrer des matériaux autres que des tissus lavables.

    J'aime bien la petite phrase au début d'un chapitre qui suggère qu'on ne se lève pas un beau matin en décidant qu'on  va faire un art quilt ... et personnellement je ne crois pas  non plus que changer sa façon de faire, peindre un tissu au lieu d'en assembler plusieurs suffise à une telle métamorphose ...

     Le livre se décompose en plusieurs chapitres où sont explorées à peu près toutes les techniques, les aspects de la démarche, du rangement de son "studio" aux finitions et ajouts en passant par la composition, le choix des étoffes, des techniques, des matières...

    Ce que j'aime : les pistes sont variées , par exemple le fameux sketch  book sans lequel on n'oserait se dire artiste "textile" est présenté comme un moyen, mais pas plusque les autres façons de créer (et notamment les dessins par ordinateur ) , les techniques sont expliquées à partir d'oeuvres d'artistes différents . On n'échappe pas aux modèles à réaliser à l'identique comme entraînement ...mais ce n'est certes pas pour moi la partie la plus inspirante du livre.

    Le livre se termine par les photos d'un challenge à partir d'un thème et il faut avouer  que les réalisations dans leur variété,  tant de techniques que de compositions,  sont un plaisir pour les yeux...

    J'ajoute que je me pose toujours la question pourtant  une fois ce type de livres refermés de l'obligation des trois épaisseurs matelassées pour des surfaces textiles auxquelles le matelassage n'apporte pas toujours grand chose, parfois même, à mon avis il brouille l'image qui se suffisait à elle-même. Mais le concept de quilt est sacro saint ...outre- Atlantique.

    Et devant  certaines réalisations quand même assez ...minimalistes- si on les met en regard avec des créations beaucoup plus  anciennes , et tout aussi "originales" on se demande où il y a le plus de profondeur, de recherche, de signification ... bref d'art ... Enfin si c'est juste une question de position comme expliqué dans l'introduction  : mettons tout à la verticale, le problème n'existera plus !

  • Contemporary quilts, heritage inspiration

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    Titre / the Quilters' Guild Collection , contemporary quilts , Heritage inspiration

    edited by Bridget Long

     Editeurs David and Charles 2008 (réédition)

    en anglais

     

    Le but de ce livre est de mettre en parallèle un (ou des) quilts anciens et leur interprétation par une artiste contemporaine.

    Après une introduction par Bridget Long qui présente le projet, la première partie intitulée 400 years quilts retrace l'histoire des quilts au Royaume-Uni de manière succincte avec de fort belles illustrations de détails et des explications historiques tout à fait passionnantes.Il s'en dégage une série de styles, donnés comme spécifiquement britanniques, notamment les médaillons quilts .

    La troisième parie et plus importante consacre un chapitre à chaque interprétation . Le quilt de départ est présenté,la démarche de l'artiste détaillée (ce qu'elle a gardé du quilt original, les raisons des transformations) et évidemment le résultat.

     J'ai noté qu'on retrouvait les constantes de l'art contemporain des quilts : c'est à dire l'abandon quasi total des tissus imprimés, qui donnent pourtant tant de charme aux pièces de départ (comme si les tissus imprimés  ne servaient plus à notre époque !), une stylisation des formes -qui à mon avis appauvrit parfois plus qu'elle n'épure - et surtout le recours presque obligatoire au sketch book (carnet d'esquisses ) avec peintures  qui est en lui-même une oeuvre d'art .. de peintre et non forcément d'artiste textile.  Admirable en soi mais à mon avis la réflexion sur et à partir des étoffes en est un peu absente, puisqu'on privilégie le côté  "Beaux arts" plus prestigieux certes, mais pas à mon avis dans l'esprit du medium "tissu" du moins comme je l'entends!

    Cela me gêne toujours un peu que ce soit présenté comme une étape  "obligatoire" du style ou des styles  contemporains.

    J'avoue avoir apprécié certaines interprétations mais être restée dubitative devant d'autres , je ne vois pas toujours les innovations comme étant nécessaires c'est à dire enrichissant l'oeuvre de départ par un regard nouveau , je ressens parfois comme de la nouveauté collée là pour faire nouveau. ..  Notamment j'avoue ne pas trop aimer  cette grande fracture blanche sur le crazy de couverture même si Fracture en est le titre :  j'y vois une sorte de papier blanc plié qui zizague de façon surnuméraire, il heurte mon regard , je ne vois plus que lui et il m'empêche d'entrer dans l'oeuvre mais quelqu'un d'autre le ressentira peut-être autrement.

     En tout cas l'inititative m'a paru tout à fait intéressante.

  • 500 Art Quilts

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    Titre : 500 Art Quilts

    Auteur : Collectif

    Editeur : Lark Craft

    Date : 2010

    Intoduction de Karey Patterson Bresenham

     

    Si j'avais mauvais esprit (et chacun  sait que j'ai mauvais esprit! ) je dirais que ce livre est exactement ce qu'il faut posséder dans sa bibliothèque si on veut  créer dans les tendances actuelles, celles qui ont déjà traversé l'Atlantique et celles qui ne vont pas tarder à envahir les expositions.

    Mais comme je n'ai pas que mauvais esprit, je dirai que dans ces tendances on peut aussi et surtout voir se dessiner l'évolution de notre art, avec des oeuvres parfois (souvent!) à tomber à la renverse...d'admiration.

    La production est variée mais on peut discerner les courants, et par rapport à la précédente édition de ce livre que je possède aussi ce qui se poursuit (par exemple le goût pour les fameux carrés dans le carré irréguliers , on ne l'évite pas ,dès les pages de présentation , page 8 par exemple. Qu'on y voie plus d'originalité que dans certaines mosaïques dites traditionnelles me laisse toujours autant sceptique ! )

     Le figuratif revient en masse et force et c'est normal, pour qui suit l'histoire des mouvements de peinture  mais de même que les premiers art quilts étaient de l'op art un peu à retardement, on peut continuer à retrouver dans notre art un peu trop souvent à mon goût l'histoire de la peinture en différé.

    Non que ces œuvres ne soient pas  belles, émouvantes, artistiques, certes elles le sont, mais il est permis, par exemple, de préférer un portrait où le tissu est utilisé pour signifier quelque chose plutôt qu'une oeuvre peinte où il ne sert que de support. Les œuvres de Marylin Belford, de Tammie Browser sont à cet égard des réalisations  où le tissu prend toute sa signification de medium pour rendre les visages et notamment les regards.

    Lien vers le site de Marylin Belford

    Dans le figuratif une tendance au gigantisme : de grandes fleurs, de grands visages , c'est souvent beau, parfois témoin d'une virtuosité technique remarquable, surtout spectaculaire et ce n'est pas forcément ce qui génère le plus d'émotion , laquelle vient parfois aussi de ce qui ne saute pas presque agressivement aux yeux. Je dirai que pour moi ça manque un  peu de profondeur et surtout de mystère: c'est de l'art qui s'expose et qui veut tirer l'œil sur lui. C'est beau, mais il n'y a pas cette petite musique douce des surfaces où on entre sans savoir ce qu'on va y trouver.

    Des paysages, des natures mortes , pas mal de détails traités de façon hyperréaliste soit en peinture à l'aiguille, soit teintes, parfois en photos altérées  plus rarement réalisées en étoffes, ce qui me semble tout de même plus intéressant au point de vue textile de l'art que nous sommes censées pratiquer.

     En fait on s'aperçoit que jouant sur les  valences du mot quilt et du mot patchwork, pourvu qu'il y ait soit tissu, soit matelassage tout ou à peu près peut devenir un art quilt pourvu qu'il évite de ressembler à un patchwork mosaïque (et c'est bien dans cette exclusion que pour moi le bât blesse, pas dans le refus d'admirer des œuvres qui m'ont réellement fait rêver pour la plupart): une image digitale matelassée machine est un quilt. La sérigraphie imprimée et matelassée ou brodée,  c'est un quilt, le tissu peint et quilté,  c'est un quilt, et même comme  la page 331 une image numérique imprimée sur un tissu en grand format et non quiltée  et qui n'est donc ni un patchwork, ni un quilt est un art quilt ..(là je me suis dit que j'avais de quoi faire en tant qu'artiste en image numérique ...même si c'est immodeste de le penser je préfère cela à l'hypocrisie de convenance et de conformisme ).

    A noter que le mot patchwork permet, lui,de glisser vers l'assemblage de tout autre chose que du tissu ainsi le très curieux quilt réalisé avec des cartes de crédit d'Amy Orr page 414.

    La géométrie a pourtant encore la part belle et même la répétition, pourvu qu'on n'use pas des deux à la fois. Et encore on peut à condition d'user de tissus teints ou peints et surtout pas de nos petits imprimés dits classiques qui comme on le sait font beaucoup trop "patchwork" au sens péjoratif du terme... et sont, n'est ce pas, si faciles à assortir et impuissants à rendre  nos émotions ...puisque les juges Outre Atlantique en ont décidé ainsi depuis plus de vingt ans.

    Mais je ne bouderai pas mon plaisir : sur ces 500 "quilts" dont tous n'en sont pourtant pas,  si je devais dire celui que je préfère, je serais bien en peine et il y en a beaucoup que j'aime et qui me parlent à des titres divers. .Alors je citerai un coup de coeur : un visage d'enfant fait en yoyos par l'artiste Shin-hee Chin  et qui semble sortir du tableau, comme on dit (réaliser cela avec des yoyos, faut le faire !).

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  • Visite guidée de ma bibliothèque d'art textile

    Bonjour à vous qui passez là!

    En plus de mon site qui est une présentation plus "statique", j'aimerais ici ouvrir une série d'articles pour présenter des livres d'art textile que je possède et qui ont nourri mon imagination.

     Je précise qu'il ne s'agit pas d'articles publicitaires ou de promotion : je suis libre de cette sorte d'attache et tiens à le rester. Bien sûr, c'est subjectif et c'est l'intérêt de l'entreprise. C'est ma réaction de lectrice "pratiquante" face à tel ou tel ouvrage que je viens partager avec vous, elle n'engage que moi, par conséquent.

    La démarche des autres artistes et surtout des artistes textiles m'a toujours fascinée, mais également les livres sur l''histoire des arts textiles, donc l'échantillonnage des ouvrages présentés ira de livres humbles et pratiques (sans technique on ne construit rien) à d'autres beaucoup plus savants, en passant par tous ceux que j'ai acquis non pour imiter, pour copier mais pour rencontrer d'autres oeuvres, m'emplir les yeux ...

    Pour moi il est inenvisageable de créer sans me questionner, réfléchir et bien sûr en ce domaine comme dans  beaucoup d'autres la lecture m' aide, non à progresser -on n'est pas à l'école !- mais à évoluer, ce qui est tout différent.

    Vos commentaires sont les bienvenus surtout si vous avez,vous aussi, lu le livre et que votre approche est différente de la mienne. Qui aime le patchwork vénère la variété des avis et respecte les divergences.

    Le premier article sur le premier livre est pour bientôt...