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  • Analogie ou la théorie des tas

    • Le 27/02/2016

    Texte tas 2

     

     

    Souvent quand on me demande comment je fais, comment je crée, je reste dépourvue.

     Comment je fais avec les mots, comment je fais avec les morceaux d'étoffe, comment s'élaborent mes images numériques.On attend des recettes, des procédés et  je ne peux pas en fournir.

    Pour moi c'est invinciblement, irrémédiablement entre ces trois valences le même ressenti, même si pour  quasiment tout le monde, non. Je ne peux pas empêcher les gens de cloisonner de dire : la poésie c'est "intellectuel" le patchwork " c'est  "manuel". Et les images numériques ce serait "artistique" . Je veux bien.

     

     Donc ce que je fais, c'est des sortes de tas. Des amalgames, des rencontres, des télescopages.

     Se confronter à une matière, une sorte de magma qui résiste, sans  cette force d'inertie   contre laquelle il faut lutter, commencer ne serait même pas envisageable.Des amas de mots que je dépose quand et comme ils me viennent et à ce stade surtout s'empêcher de contrôler quoi que ce soit. Des tas d'étoffes et là aussi j'en mets autant qu'il m'en  vient à la main,  je mets vraiment tout ce que je veux y mettre. Rien de plus, rien de moins. Deux étoffes ou mille.

    Tout sans frein aucun.

    Pour les tissus cela veut dire : les soies et  les étoffes simplettes, pour les mots oui même ceux qu'on peut juger vulgaires. Faire du beau avec des jolis mots que tout le monde va trouver poétiques oui, mais avec les autres aussi. Un mot ne me vient pas parce qu'il est poétique :  il vient de ce magma. User de tissus "nobles" oui -la serpillière pour faire art brut , on sait ce que  j'en pense!- mais aussi oui la toile de jute ou le jersey de coton. Pas obligatoirement l'un ou l'autre, pas obligatoirement l'un et l'autre : ce qui me vient par rapport à ce qu'à ce moment-là je ressens. Une nécessité, jamais un effet de mode ou le résultat d'un apprentissage, à ce stade, du moins.

     Et puis j'attends. Pour les textes quelques jours, pour les étoffes il peut s'agir de mois ou d'années car un textile  - on l'oublie -  c'est lent à élaborer , quand vraiment on élabore. Je ne parle  pas du vite fait bien fait et que je te  prends trois tissus assortis et que je couds et que je recoupe et que je mixe, je parle vraiment d'une élaboration qui repose sur tout ce travail qui est d'âme, d'esprit et de corps. Qui implique tout l'être, même si en ce qui concerne les   surfaces textiles on n'y voit souvent que de "jolies" choses, décoratives.

     Ensuite il y a ce moment capital où on écoute le rythme et où on regarde les visions. Ce qui parle parce qu'on a écouté, en soi et hors de soi, ce qu'on voit parce  qu'on a regardé en soi et hors de soi , aussi. Peu importe d'où c'est venu : c'est là et ça appelle, ça demande qu'on agisse pour exister.C'est le plus magique de tous  les moments car là, tout s'organise, presque sans qu'on intervienne, du moins juste assez, mais pas trop. C'est ce que  j'appelle être "exacte" ou "créer "juste". Bien entendu je ne prétends pas y parvenir.

    Savoir être en attente, en éveil, en accueil.
     A ce stade c'est vrai j'élimine beaucoup, mais je ne m'interdis pas de rajouter non plus. C'est moi qui sens parce que c'est moi qui signe le travail, le texte, l'ouvrage. Et qu'on ne me dise pas que c'est un manque d'humilité. Pour moi le manque d'humilité, ce serait de vouloir me faire chef d'une école, chercher des imitateurs pour cautionner mes choix. Comme si l'art était une religion ou parti politique, qu'il y ait une ligne unique à suivre!

     Pour moi c'est résolument entre soi et soies à ce stade. Ensuite c'est à offrir à la vue de tous ceux qui le veulent bien. Car c'est toujours tendu vers... cherchant le regard de ... et quand je le trouve c'est un moment de bonheur parfait parce qu'il est un instant au moins partagé . N'aurais-je eu "que" cela, c'est pour moi plus immense qu'une reconnaissance artificielle, mondaine et convenue, de personnes qui aiment parce qu'on leur a dit que ça vaut!

    Et parfois j'aime le dépouillement et parfois j'aime la profusion et j'aimerai qu'un diktat esthétique en vigueur  ne réduise pas son inverse à quelque chose de  forcément "mauvais" ou  de moindre valeur.

    Quand j'ai envie de blanc, de dépouillé de presque rien qui dirait tout, je le fais, mais quand j'ai envie de m'enfouir dans une profusion de couleurs  , de feuilles, de fleurs, de formes, où le regard  se perd et trouve mille chemins, je le fais. J'aime les deux, mais différemment et je ne vois vraiment pas pourquoi une partie de moi serait sans cesse obligée de renier l'autre. Et pour les mots il en est ainsi :il n'y en a pas trop ni pas assez : il y a eux qui viennent chanter sur le rythme pour traduire ce qui est à exprimer.

    La poésie pour moi n'est non plus écrite pour enjoliver la vie mais pour faire surgir  de ce magma du langage tout ce qui se refuse à se dire. Et sachant une fois pour toute que dans un cas comme dans l'autre on n'y parviendra jamais ; Il ne s'agit pas de "réussir" , de fournir un texte bien léché, mais d'arriver à un état que je considère toujours comme un "essai". Rien qui soit à mes yeux , accompli. C'est pourquoi je ne cherche aucunement la perfection. La mort seule peut achever totalement,  parfaitement  quelque chose.  Un essai qui laisse comme une attente, un espoir qui relance vers une autre envie un autre désir ce qui donnera un autre texte, un autre textile .

    Comprendre que    c'est ma chair, ma vie, mon souffle pas un divertissement pour personne âgée qui s'ennuie. Ma passion surtout pas ma patience. qu'on me pardonne mon impatience à l'égard des mots "joli travail" ou "quelle patience"devant mes ralisations rtextiles. On ne dit jamais cela à un peintre ou à un graveur , on ne ne me le dit pas non plus pour mes poésies, ni pour mes récits, même si leuor élaboration est parfois lente !. C'est voir surtout l'échafaudage quand j'aimerais  tant qu'on sente jusqu'aux fondations. Je pense écrivant à cette phrase de Brigitte Fontaine :  "je veux qu'on m'aime pour mes os"

      Il faut que je dise ici un mot du minimalisme qui semble règle en vigueur aussi bien en textile -par le biais des Modern quilts- qu 'en poésie avec la vogue des formes courtes qu'on veut denses. Le fameux "less is more" .

    Pour moi  "more is more", tout autant , seulement il faut changer ses oeillères quand on regarde, se déformater. Sinon on s'aveugle volontairement sur tout un pan de la création. Une esthétique n'a pas à phagocyter une autre, ou à la piétiner pour se rehausser,  tout peut se poser en harmonie et le contraste même violent est aussi source d'harmonie et surtout de relief.  En musique on peut aimer Mozart, le jazz et le métal etc.

     Je voudrais dire aussi que pour moi le minimalisme c'est quand on regarde ou lit  et qu'on sent un plein dans le dépouillement même. Une plénitude même. pas un vide bourré de clichés pour faire simple. On n'a pas à vouloir faire simple : simplicité ou complexité doivent d'abord s'imposer d'elles-mêmes.Partir de l'oeuvre telle qu'en soi elle existe déjà.

     Bien sûr ceci n'est pas un art poétique- artistique, c'est  un parcours, une réflexion.Une expérience pour le partage. Pour qui en veut .

  • pourquoi je reste amateur

    J'aimerais expliquer ici que je considère pas le moins du monde mes activités de création comme un loisir ou un moyen d'occuper le temps de ma retraite - choses que je m'entends souvent dire- je suis  quasiment forcée   de rester amateur, avec cette connotation d'amateurisme, si péjorative.

     D'abord  en France on fonctionne au diplôme, et même si je me voulais artisan d'art, je n'aurais pas le droit de décider que je le suis, même si je suis capable de créer des oeuvres ainsi,

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    pour une revue de Broderie d'art , notamment. Il me faudrait une formation certfiée, diplôme etc . Il n'est pas question, sachant tenir une aiguille et broder depuis que j'ai sept ans, que j'aille repasser des examens ...  De plus je brode comme je couds non en  vue d'une perfection technique normée et évaluable, mais comme un peintre peint pour m'exprimer avec des matières. Et cela, à mon avis ne s'évalue pas; professeur, je refusais de noter les poèmes de mes élèves. L'art et la poésie sont des langages non rationnels, qui ne se  jugent pas  sur de tels critères., même si tout ne se vaut pas ! Du reste, il n'existe pas de diplôme de poète ou d'écrivain. Et pour moi, broder, assembler et écrire sont expressions multilples d'une  même inspiration. Que les lois , moeurs et coutumes des hommes les rangent sous telle ou telle étiquette : je me sens profondément en marge de tout cela, c'est une des conditions de ma liberté de créatrice.

    Je passe aussi sur le coût d'une formation reconnue en école privée  comprenant celui d'un hébergement éventuel loin de chez moi,  ou de stages "prestigieux" avec artistes reconnus. Je n'en ai ni le temps, ni le goût, ni les moyens et surtout j'apprends mieux seule un livre ouvert ou plusieurs et expérimentant, mêlant, me trompant et  découvrant plus dans certaines de mes erreurs, qui ne sont qu'expérimentations et errances, essais, que dans une soi-disant discipline imposée de l'extérieur par quelqu'un qui a sa propre vision des choses.ne coïncidant pas forcément avec les miennes propres. et sauf à me prouver que les miennes vaudraient moins , elles sont essentielles pour moi. Si souvent j'ai eu l'impression qu'on me demandait pour me "former" d'être autre que ce que je suis et de me conformer à !

    Quant à mes compétences côté   assemblage de tissus et patchwork, j'ai appris en autodidacte, mais à partir d'une formation de couture que les femmes de ma génération ont toutes suivie à l'école, renforcée par le fait qu'étant issue de ce qu'on nommerait aujourd'hui un milieu défavorisé, je cousais moi-même ma garde-robe et souvent, dans des tissus de récupération! . C'était peut-être sexiste d'apprendre aux filles à coudre, mais plutôt que de ne plus  le leur apprendre, au nom de ce féminisme mal compris  que ne cautionnerai jamais, on aurait mieux fait d'étendre cet apprentissage aussi aux garçons.Tant qu'on considérera que  les  domaines où les femmes excellaient (déjà en  prétendues amateurs!) ne valent que pipeau ou pipette, on n'avancera pas d'un  iota dans une véritable égalité.   Là encore un CAP de couture ne me servirait à rien : pour moi, le patchwork, tel que je le pratique, n'est pas essentiellement de la couture mais de l'assemblage :  je revendique depuis les débuts le droit de le faire échapper aux diktats des dames qui justement y viennent parce qu'elles aiment coudre et ne savent pas à quoi employer leur temps libre.  Leur manière de procéder n'est pas la mienne, je la respecte , mais j'aimerais bien qu'on comprenne que je ne ferai jamais comme cela.J'ai su faire des robes , et je l'ai déjà dit, je n'applique la norme de finition qu'aux ouvrages utilitaires. Quand on me demande un gilet il est réversible et doublé dans les règles de l'art -ce qui est loin d'être facile! , mais je n'ai pas envie de passer ma vie à cela.

     

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    Je n'ai pas fait les Beaux-arts, mes arts à moi n'étant pas nobles  et du reste peu enseignés en dehors d'une optique pratique ou d'arts dits appliqués -ce que je discute comme on le sait- (même celle prestigieuse de broder ou d'assembler pour la Haute-Couture je me suis formée par le regard, et le coeur en observant les oeuvres des autres, et partout formes, couleurs et matières , ce que j'admire : c'est là mon école. Ce n'est guère suffisant même si depuis des années j'observe,je réfléchis, je collectionne, j'annote, je compose. Mes  carnets en attestent.

    .Je travaille sur mes arts -et j'y compte la littérature , entre cinq et huit heures par jour, quand je le puis. Mais je ne  suis qu'amateur!
    Le grand problème on l'aura compris c'est aussi l'argent : tout ce qui ne saurait en rapporter est jugé nul et non avenu. Triste façon de considérer une oeuvre ! Oui triste pour ceux dont le regard est obscurci par ce préjugé !

     Ensuite si d'aventure on voulait bien m'accepter, côté administratif,  comme "amateur ayant le droit de vendre occasionnnellement"  , je devrais au minimum tenir -me dit-on un registre comptable avec mes fournitures  dépenses et recettes - comment fais-je pour un quilt qui comporte parfois pas moins de 600 à 2000 tissus différents ?   Je compte comment ? PourR certains achetés certes, mais pour beaucoup échangés ou récupérés chez des brocanteurs qui ne fournissent pas de facture  pour quelques  vieux chiffons dont il se débarrassent -mais qui ne sont pas gratuits pour moi, cependant.  Si on admettait des frais estimés , côté impôts, ce serait possible, mais las nous sommes en France  pays tâtillon s'il en est, à cet égard. les factures font seule foi .. Je veux bien que ce soit pour contrôler an cas d'abus.. Et je comprends aussi que mon cas est trop particulier pour être pris en compte , un peu comme si j'avais une maladie d'artiste orpheline ! Il faut faire nombre ,pour faire bloc , et je suis seule. Je ne m'en plains pas : je veux l'être, c'est aussi une condition de ma liberté.

    Quant aux images numériques, nous sommes là dans quelque chose qui paraît encore nouveau -ne l'étant pas tout à fait- . je passe sur tous ceux qui y voient une facilité. Soyons francs, c'est vrai, les logiciels peuvent compenser mes incapacités  en dessin dit d'art -surtout si ce dessin se réduit à l'imitation exacte de la réalité - mais maîtriser un logiciel et en user de manière à s'exprimer avec ses nombreux paramètres, demande aussi des heures d'investigation, de recherche de travail . Ce n'est pas de "l'automatisme" à preuve j'ai rarement vu  deux artistes  numériques produire des oeuvres vraiment ressemblantes, tant justement les possibilités d'expression sont avec cet autre outil, variées .Je pars d'un écran blanc les matrices que j'utilise, pour les métamorphoser sont les miennes. Il arrive que des pros me demandent mes "trucs" mais je ne suis qu' amateur. C'est peut-être le seul domaine où je pourrais (peut-être) avoir existence officielle : là je peux tenir une comptabilité sans trop de mal . Mais je me refuse à n'exister que partiellement, amputée de mes autres valences . Pour moi, cela n'aurait pas de sens.

     

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     Retraitée- partielle!-  je ne peux m'inscrire officiellement  comme si j'étais artiste essentiellement et en faisant mon gagne-pain et cotisant pour une retraite future. Un artiste n'est du reste jamais à la retraite : il crée jusqu'à son dernier souffle de vie, tant qu'il le peut.

    De plus  si j'ai commencé mon "plein temps" artistique à l'âge de 52 ans, c'est bien avant que je créais .En fait, depuis toujours. Certes dans certains domaines, je suis artiste récente -mais déjà frappée de  "sénilité". Sexisme et âgisme  sont aussi souvent mon lot quotidien.Evidemment pas de la part de tous. Reconnaissance à mes amis hommes et femmes souvent  artistes d'arts semblables ou différents qui veulent bien me tenir pour une des leurs. Pour moi c'est immense ! c'est ce que je nomme ma bouffée d'oxygène.

    J'ouvre ici une parenthèse : je n'ai pas de jalousie, ni même d'envie envers les artistes qui eux peuvent se déclarer et fonctionner "légalement' . Je ne méprise pas leur formation. Au contraire . Mais je rappelle  qu' il en est d'autres, la mienne j'ai expliqué comment elle s'est faite," l'école d'art "pour moi continue tous les jours via livres, rencontres, discussions , interrogations;. Ce n'est ni mieux, ni moins bien, c'est autre chose.

    En littérature c'est encore mieux; je suis professeur de Lettres, mais figurez-vous c'est un handicap, face aux modes actuelles qui voudraient que forcément un ex-professeur  écrive uniquement conditionné par l'Université ... et mon écriture manquerait de spontanéité -forcément je serais scolaire (tout ça affirmé , le plus souvent, sans m'avoir lue bien sûr!) . J'ai écrit bien avant d'être professeur et quand je fais quelque chose, j'y mets toujours toute mon ardeur, mes exigences à l'égard de la vision que j'en ai et que je n'atteins jamais .

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    Enfin je ne crée pas essentiellement pour vendre . Je comprends que d'autres le choisissent :  un artiste ne vit pas de l'air du temps! Mais j'ai mené ma vie selon ce choix : me réserver en fin de vie une période dont j'ignore la durée, et qui serait réservée à mes vocations vitales sans dépe,dre financièrement de cette activité.

     C'est pourquoi je dis que je construis  une oeuvre et pas une carrière. je veux créer, et non produire.

    Ce que je saisis mal, c'est pourquoi ce choix-un peu forcé aussi par les circonstances et les réglementations en vigueur- dévaloriserait ce que je fais.

    Si c'était officiel et professionnalisé serait-ce mieux ? Pour ma part j'en doute.  Je ne regrette pas mon choix, je regrette le regard habituel sur les "amateurs" toujours un peu méprisant ou condescendant.

    Alors voilà  :je suis amateur mais pas dilettante. Mon oeuvre c'est plusieurs centaines de pages d' écrits, des centaines d'oeuvres textiles et d'images numériques tout cela créé sur plus de quarante ans. La quantité ne fait pas forcément la qualité, mais sur ce site, on peut quand même en juger sur quelques pièces! Et j'ai obtenu comme on dit des "retours" . Comme une pro !   Mais je reste un rien complétement négligeable,  parce que je  ne veux et ne peux légalement suivre les voies dites normales de "promotion- exposition- vente" etc. Un rien, appartenant déjà et avant moi à la nuit de l'oubli et du temps. Partageable difficilement, au compte-gouttes -mais chaque goutte est pour moi nectar !
     Ce n'est pas un regret,  c'est une explication,un témoignage,  une constatation d'un état de faits. Dont je suis en partie responsable, par mes choix. Si tant est que j'ai choisi d'être inspirée de cette façon-là !Mais qui d'un autre côté m'est imposé : il faudrait que je renie ce que je suis et ce qui fait le sens même de mon travail pour qu'il en soit autrement.

     

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  • La tapisserie à l'aiguille

     

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    Luxuriance tapisserie sur toile aïda

     

    Pour moi la tapisserie à l'aiguille, ça a longtemps été synonyme de canevas, imprimé en couleurs qu'on remplissait au  point de croix ou au demi-point en laine ou en coton retors. J'avoue que ça ne me plaisait pas trop, comme tout ce qui ne requiert aucune imagination, juste du "remplissage".Ce qui ne veut nullement dire que je méprise les personnes qui aiment à se détendre par ce loisir!

     Dans les années 70, beaucoup de personnes  de mon entourage, y compris  quelques hommes, entreprenaient pour décorer leur intérieur,  des tapisseries vaguement inspirées de Lurçat pour les plus "contemporaines", ou alors des tableaux de genre, paysages,portraits, scènes de chasse. Les journaux féminins et notamment Modes et Travaux proposaient des modèles, souvent de belle taille. Souvent elles finissaient non terminées au fond d'un tiroir. J'ai à cette époque réalisé deux petits panneaux format A4, sur le dessin original d'une amie et l'autre sur un "carton" de mon  mari.

     Autre emploi fréquent : recouvrir les fauteuils et chaises.Là aussi on trouve de nombreux modèles dans les revues, le tapissier lui devenant alors plutôt chargé d'ajuster ces réalisations sur les sièges.

     

    C'est en cherchant autour de la manière d'obtenir du relief en broderie que je suis tombée, dans les encyclopédies que je possède sur une bonne centaine d'autres points que les deux les plus usités.

     Alors l'envie m'est venue aussi d'en  savoir un peu plus en explorant à la fois du côté histoire, et du côté points et emplois de ceux-ci dans une optique de création et non de simple remplissage. Je n'ai pas encore été très loin côté réalisation des idées que j'ai engrangées, au fil de mes lectures, mais je tiens à partager ici ce voyage en tapisserie à l'aiguille.

    D'abord je me suis demandé pourquoi ce mot de tapisserie, puisque pour beaucoup la tapisserie c'est tout d'abord du tissage et qu'historiquement la tapisserie tissée a précédé celle sur canevas brodée à l'aiguille, même si l'art de la broderie est souvent jugé antérieur à celui du tissage au motif qu'on brodait déjà sur des peaux, des écorces ...Et tout tissage n'est pas tapisserie.

    D'après L'Encyclopédie Autour  du fil que je possède la première trace d'un ouvrage en tapisserie à l'aiguille  c'est la chape de Hildesheim, datant du XIII siècle, et conservée à l'Albert and Victoria Museum.

    Faisons un sort à la tapisserie de Bayeux , antérieure certes, mais brodée sur une toile sans points comptés et dont les motifs ne recouvrent pas l'ensemble de la toile, ce qui reste  les deux caractéristiques les plus courantes de la tapisserie à l'aiguille, en revanche elle n'est pas forcément réalisée sur un canevas rigide. Beaucoup de points de la broderie dite à points comptés sont utilisés en tapisserie et réciproquement, mais le point compté lui, ménage des vides des espaces dits "négatifs".


    Il  semble qu'il y ait eu un besoin d'obtenir des surfaces brodées et non tissées par  un  moyen moins onéreux en fils qu'une tapisserie ,  et aussi ne nécessitant pas le montage compliqué d'un métier à tapisser. Peut-être plus rapide aussi encore que sur ce point, cela permettait d'obtenir à un moindre coût des "copies" brodées des originaux tissés. C'est surtout à la Renaissance que cet art prend son essor, avec l'influence des tapis d'orient dont on cherche à imiter les motifs, fort prisés , avec déjà une activité professionnelle et masculine et ...une activité de loisir   plus féminine, déjà !

    La manufacture des Gobelins  fondée en 1601 en développera cette activité en parallèle avec le "vrai" tissage. Puis un peu plus tard Aubusson .Actuellement il y a des artistes spécialisés rattachés à ces deux "écoles", on vend des kits, des laines.
    Au XIX° siècle  s'est développée la broderie dite de Berlin qui a donné naissance à nos canevas modernes, exécutés cependant au point de croix et non au demi-point ou  petit point (ce qui n'est pas tout à fait la même chose ,)

    Parallèlement à cette activité de loisir et de détente, il existe de la création véritable à deux étapes : celle du carton qui s'élabore à part -et qui  peut être signé d'un peintre - et celles du choix des points à mettre en oeuvre et des fils choisis pour ce faire , ce qui constitue à proprement parler, l'art du brodeur.

     Plus encore que l'histoire de cette broderie, ce sont donc  les points différents qu'on peut y mettre en oeuvre que j'ai découverts, au fil de mes lectures dans revues et livres spécialisés .Au départ bien sûr l'idée étant d'imiter un aspect tissé on comprend qu'on ait surtout développé ce qui l'imitait le plus(le point Gobelin en st un bel exemple entre autres) . La revue Stitch déjà propose assez souvent des ouvrages sur canevas dans un  style que je vais affirmer "contemporain" même si ,me dit-on, la" tapisserie" contemporaine c'est tout autre chose encore ! En anglais on trouve pour désigner la tapisserie à l'aiguille les termes needle point, ou canvas work. Canvas c'est aussi la toile du peintre.

    On peut   donc broder sur canevas et il en existe différents types de tissages. Certains livres indiquent monofil ou Pénélope et il n'est pas indifférent de le savoir.Surtout pour les points complexes . Mais tout support tissé qui peut laisser passer des fils constituant des points peut-être considéré comme de la tapisserie à l'aiguille. Ce support donc peut-être de toile à tissage plus ou moins régulier, de toile de jute, de métal, de tissages de fils qu'on coud soi-même à la machine etc... Le point compté s'apparente sous beaucoup  d'aspects à cette tapisserie à l'aiguille - beaucoup de points dont le point de croix sont communs -  dont la particularité est sans doute  au départ, d'user d'un support plus rigide.  La visée était d'éviter aussi les déformations, d'où l'emploi conjoint d'un métier, surtout pour une pièce de grande taille.

    Je possède plusieurs livres  à cet égard

     

    Tapisserie aiguille

     

     New canwas work de Jill Carter Basford 2007 , en anglais est celui qui offre le plus de regards et d'ouvertures vers des pratiques modernes de cet art . Canevasn points,supports de toutes sortes, un nouveau regard sur des techniques adaptées de la tradition comme Hardanger et jours, perlages , ou bien encore utilisation des points décorarifs machine en préparation du canevas ou au dessus. Pas de modèles à suivre, et c'est un bien, à mes yeux!

    The Needle point  book de Jo Ippolito Christiensen  1997 -en anglais,  est de loin de plus fouillé, ardu et complet. D'un aspect austère , en noir et blanc, si on excepte les planches du milieu conscrées aux oeuvres-  il est cependant très clair et quasiment exhaustif si on veut tout savoir des qualités des toiles, fibres , et avoir des explications quasi scientifiques sur le sujet c'est le livre idéal.On y explique aussi des techniques diffciles à trouver ailleurs comme appliquer un canevas de texture différente sur un autre (un plus fin par exemple pour rendre des détails dans une zone précise)  les points sont nombreux et s'y ajoutent ceux de la broderie traditionnelle, qu'on peut tout à fait utiliser sur  ce support ou en surépaisseur. on peut évidemment créer en 3 D.

    La tapisserie à l'aiguille  de Rachel Doyle traduit en français (éditions de Saxe), 2013 .L'auteur a été formée à la Royal Needle School et c'est un gage de perfection technique !  C'est un excellent livre pour apprendre à composer, nuancer -ombrer les zones-  et ainsi bâtir soi-mêmes ses tableaux, souvent figuratifs dans le livre, et également l'ordre à suivre pour exécuter sa composition de manière à obtenir une surface nette. Le meilleur de ceux que j'ai lus pour le nuançage des fils, notamment .

     J'ai eu un coup de coeur pour 71 carrés de tapisserie aux points insolites de Dominique Siegler Lathrop et Jeannette Mougenot Editions Tutti Frutti 2013 : même pour moi qui n'aime pas refaire, on le sait , ils sont si beaux que j' ai   envie  au moins de les adapter en d'autres couleurs par exemple... . au delà les points sont très bien expliqués et c'est une mine d'idées pour bâtir des surfaces géométriques ou non. Et il est conseillé de créer ses carrés soi-même ou unités  en re-mélangeant des points. Des combinaisons qu'on trouve rarement ailleurs.

    Les auteurs ont un site qu'on peut visiter et où on peut acheter les fournitures nécessaires à l'exécution de ces carrés.

     Pour ma part, la tapisserie à l'aiguille reste un art que j'ai assez peu exploré (je n'aime pas compter les fils... ) mais il n'est pas exclu que je m'y mette!

     

  • Art textile (?) contemporain (suite)

     Je continue à observer ce qu'on affirme être de l'art textile contemporain.

     D'abord le  redire; je ne mets nullement en cause ces artistes dont je vais décrire lle travail. J'ai mon appréciation sur ces oeuvres, elle n'est pas forcément négative, mais ce n'est pas ce qui est en cause.  Faute d'avoir le droit d'en montrer les photos, je les décris. .( en privé je le peux à qui me le demandera).

    Qu'elles soient de tel ou tel artiste ici ne m'intéresse pas, ici. C'est la manière dont on les classe textiles qui est l'objet  de mon questionnement.

    Une première oeuvre qui s'intitule tapisserie  il s'agit de fibres optiques juxtaposées, sur lesquelles joue une lumière couleur arc-en- ciel. Bien sûr le mot "fibre" suffit à assurer la caution "textile" .Pourquoi n'est ce pas de l'art optique ;   valence sons et lumières? Pourquoi ce mot de tapisserie qui correspond à tout autre chose ? La tapisserie  présuppose qu'on tisse ou qu'on brode quelque chose sur un support. Là bien sûr on me dira c'est la lumière qui est déposée sur des fibres . Alors quand la lumière joue dans les brindilles ou des cheveux c'est aussi du textile via le fiber art ?

    En élargissant cette notion de tapisserie au sens de n'importe quoi de déposé sur n'importe quel support qui , lui,  aura toujours une texture ou pourra se scinder en molécules , ou sera constitué de fibres  c'est du textile ?

    Je peux peindre sur mes flocons d'avoine , c'es de la fibre ce  sera de la tapisserie ou de l'art textile ? c'est une question, pas seulement une ironie.

    .A ce compte tatouage et maquillage  sont de l'art textile (support   plus quelque chose dessus !) . Somme la peau est un tissu  vivant, ce serait plus logique si cela n'a pas déjà été fait.
    et la peinture, les toiles des peintres, pourquoi alors ce n'est pas de l'art textile, à ce compte? une toile c'est tissé que je sache ... ah me dit-on mais c'est la peinture le medium . certes  je l'entends bien, mais alors dans l'art textile le medium c'est le textile ! ce n'est pas un simple support !!

     Une deuxième oeuvre est constituée  une paire de chaussures vraisemblablement en cuir d'où émergent précisément des sortes de brindilles. Là je présuppose que la caution textile vient du fil nécessaire pour assembler la chaussure et qui ne l'a pas été par l'artiste (peu importe me dira-t-on) et que les branchages peuvent représenter la fibre.ou le fil (je le répète mon assiette de spaghettis au gruyère aussi)  et puis il est vrai là il y a du concept derrière (je n'ai pas cherché lequel , mais sûr il y en a !). 

    Une troisième oeuvre montre  un plan blanc vraisemblablement en polystyrène  sur lequel des  épingles sont plantées, des épingles à tête de couleur noire et blanche  Entre certaines de ces épingles on a fait circuler un fil noir . Là c'est évident : nous sommes dans le minimalisme, j'avais bien saisi  C'est ce type de "broderie" oùon  pique quelque chose sur un support , ce qui va évidemment plus vite aussi que de broder vraiment , mais passons. c'est de l'art du fil, incontestablement et l'épingle ça fait couture, soit.

    Je pourrais, dans cet "esprit" qu'on m'en permette un peu de mauvais au passage , exposer ma propre  pelote d'épingles car au fond elle retrace dans le temps les marques d'un travail qui lui restera occulté ... et on peut aussi y trouver un concept plus approfondi côté rapport au temps et au fil. le temps est un concept commode, comme le fil on peut tout lui faire dire !

    Ma question est toujours la même : en quoi est-ce textile ?

    En quoi est-ce aussi,  plus contemporain que ce qu'on fait côté vraies étoffes tissées, brodées?

    Ah oui la nouveauté du matériau, le concept au kilomètre, en veux-tu en voilà. Je reste très sceptique sur la valeur de ces arguments. Très.


    Pourquoi ces oeuvres ont le phare de la renommée braquées sur elles en tant que summum de l'art textile ? et contemporain ?
    Pourquoi ont-elles  la faveur en tant que "textile" des musées et galeries d'art, alors qu'on nous dit à nous "surtout pas de tissu" ou "surtout pas de patchwork". Depuis quand un tissu n'est-il plus textile ? 

    Les artistes non suiveurs de modes ou courants hors-école sont-ils donc moins contemporains que leurs contemporains ? Et là nous rejoignons un problème fondamental  de l'art de notre époque.
     

     Pourquoi s'octroyer une étiquette qui ne correspond pas ?   . Suis-je donc la seule à sentir ce courant ainsi ? Je ne le refuse pas en tant qu'art, je m'insurge contre une place "textile" qui est usurpée alors que,  pendant ce temps-là les mosaïques textiles , broderies sur étoffes sont ignorées ou déclassées comme "arts mineurs" . Une promotion au stade "grand art"  est incidentelle,  après on les remet côté patrimoine-folklore (et encore en France sur la conservation des oeuvres textiles et leur mise en valeur il y aurait à dire, beaucoup. Et  à faire encore davantage.
    Pourquoi suis-je, semble-til devant le silence radio qui me répond la seule à poser la question en termes d'histoire de l'art, de la signification des mots auxquels on ne peut quand même pas faire tout dire et n'importe quoi ... même si on appelle cela" ouverture".Un peu de rigueur et d'honnêteté intellectuelle seraient très bien venues.

  • Musée des tissus de Lyon

    • Le 19/12/2015

    Au retour d'un voyage à Lyon, j'appprends que le magnifique musée des tissus et de l'art décoratif est menacé de fermeture. c'est pourtant un lieu remarquable ,  utile tant aux artistes textiles, aux métiers du textile et de la mode, aux étudiants sur ce sujet  qu'à toutes les personnes qui sont sensibles, juste, à la beauté des étoffes comme oeuvres d'art.

    Si vous voulez le défendre, une pétition est  en cours sur Change.org.

  • art -textile illustration d'un art obscur

    Quand Boris Eloi Dutilleul de Lèse art m'a demandé d'écrire cette plaquette pour répondre à des artistes de sa connaissance prétendant que l'art textile est un art mineur, vous pensez bien que j'ai sauté sur l'occasion. C'est ainsi que j'entends illustrer  l'art textile, en allant le poser à côté des grands arts, et non en fonctionnant seulement en circuit fermé.

    Pour rappel :

     En 1971 Jonathan Holstein, un collectionneur passsionné de quilts, ces surfaces textiles en étoffes assemblées et matelassées cousues par des femmes, tenta de faire reconnaître certaines pièces de sa collection comme œuvres d’art à part entière et pour ce faire il obtint les murs d’un des musées les plus prestigieux de New York, le Whitney Museum. L’exposition portait le titre suivant: Abstract Design in American quilts.Elle remporta un succès considérable, fit le tour du monde. En 1972 on put la voir à Paris mais ... au musée des Arts Décoratifs, ce qui souligne déjà une différence de considération. Dans un livre relatant l’histoire de cette exposition, Jonathan Holstein note avec humour que la France ignore les patchwork-quilts et n’a aucune culture à cet égard.
    à partir de là il y eut un peu partout un engouement pour les quilts et le patchwork, qui évolua différemment selon les pays.
    En 2015, on ne connaît toujours pas mieux cette partie de l’art textile concernant l’assemblage d’étoffes.  Avec la broderie, c’est celle que depuis 30 ans et en plus de 300 oeuvres, j’ai tenté d’illustrer.
     Or ce qu’on ignore c’est que de telles surfaces existaient aussi en France , on en découvre dans plusieurs collections spécialisées(voit l'article Mosaïques d'étoffes)  mais hélas confidentielles,  chez les antiquaires.  Il y a donc bien eu chez nous des oeuvres, que je me refuse à appeler ouvrages,  créées par des femmes avec des tissus, des surfaces uniques et dont certaines peuvent et devraient, tout comme les abstractions du Whitney être considérées comme des oeuvres d’art, expressif et non seulement décoratif. Rien ne l’empêche sauf le préjugé qui selon Einstein est plus difficile à détruire qu’un atome .
     Tentons donc cet impossible ...

    lien vers la plaquette art textile-illustration d'un art obscur

     

     

  • Art textile contemporain suite .

    Le débat évoqué précédemment a eu un prolongement , dont il ressort que je suis "agressive" -ce n'est pas faux, je le reconnais, devant des ukases assénés sans exemple pour les fonder et présentés  comme des vérités indiscutables ,-c'est le catéchisme de l'art textile dit contemporain officiel!-  c'est vrai que j'ai tendance à manier l'ironie. C'est toujours dans l'espoir de faire sortir l'autre de ses certitudes assénées comme des préceptes, mais sans exemples.à ne pas démentir. D'inciter aussi à lire autre chose que les blogs des amies art textile qui pensent comme vous, font comme vous, ont la même conception de l'art textile "contemporain" que vous. On pose une question presque rhétorique, alors, si on  attend les réponses bien-pensantes et convenues !!

    Autre chose : il est impossible -une fois de plus- de discuter avec une personne qui confond un fait et une opinion un fait ne se discute pas , il s'établit , certes on peut le nier mais ça ne l'empêchera pas d'exister.
    Or la manière dont le mot "contemporain" est utilisé dans les milieux art textile et ce, depuis les années 90 et hors milieux arts textiles  ce n'est pas une opinion : c'est un fait il suffit de lire comme je l'ai fait pas mal de livres et d'articles. Je les tiens à disposition et déjà on peut en lire des citations et en voir des exemples dans mon article le Bonheur en lisière .Je me fonde sur des expositions qui ont eu lieu et surtout je regarde les oeuvres .et les "discours"  qui les accompagnent .

    Il y a eu des définitions successives du contemporain en art textile .

     D'abord il s'est défini au sein même de l'activité patchwork,qui l'a accueilli   comme une utilisation  prétendûment  innovante et   différente des formes et des étoffes : abandon notamment des blocs répétitifs pour une abstraction plus improvisée, abandon aussi des tissus spécifiques -les fleufleurssi décriées!- pour préférer l'uni ou le teint artisanalement plus proche de l'aspect peinture .. Cela donnait de fort belles oeuvres,  mais là où le bât blesse c'est quand on met en regard d'une part les peintres abstraits du début du XX° siècle,on s'aperçoit de ressemblances certaines ,de "à la manière de" non déclarés   d'autre part  qu'on relève les propos méprisants ou condescendants  au sujet de ce qu'on nomme déjà le "traditionnel. ce faux respect du travail et de la patience .Car dès le début le quilt dit contemporain s'est voulu plus artistique que celui inspiré de  la tradition  souvent caricaturée , simplifiée et mal connue dans sa prodigieuse diversité .D'où le terme d'art quilts venus des USA. cette scission traditionnel- contemporain puis art textile n'existe bien que chez nous , les textiliennes. Les autres artistes disposant d'histoires de l'art , de critiques , et d'innombrables mouvements d'art auxquels se rattacher, ne peuvent entrer dans cette optique réductrice. Nous nous n'avons place que dans des études patrimoniales, historiques  non esthétiques  De plus les artistes en ces domaines sous-évalués sont anonymes, ou inconnues aujourd'hui à de très rares exceptions près .à une époque où le nom fait la gloire, partout ! ou au mieux connues en milieu spécialisé -ce qui leur suffit, mais n'arrange rien à la relégation de leur art en général- 

    Faire reconnaître nos mosaïques d'étoffes, quand elles sont bien une émanation de nous , de nos émotions, de nos imaginations par le choix personnel des étoffes et des formes n'a jamais été fait ou si peu de temps. et dès les débuts, on a allègrement mélangé copie de revue, démarque, et création.

    Pourtant les expositions  d'alors-des années 90-  montrent que la structure en blocs est très loin d'être abandonnée,  et si répéter des bandes en les mettant un peu de travers pour faire contemporain,ou faire du Vasarely en tissus,c'était alors le fin du fin de la contemporanéité .. on comprendra que j'ai eu des doutes. Je n'ai pas suivi.Je n'admets pas qu'il y ait une géométrie artistique parce qu'ultilsée par des peintres après les quilteuses "premières"  et ensuite par les "contemporaines" -  à peu de frais!- je n'admets pas  des formes peintes soient jugées supérieures parce que peintes  par des hommes.

    Ensuite vers les années 2000 sont venues les oeuvres en 3 D et le plus souvent en mixed media avec un peu de fil ou de textile . Entre nous soit dit le  mixed media en peinture était déjà utilisé depuis belle lurette ,  encore une fois et en allant plus loin puisque certains peintres  sont allés jusqu'à user d' excréments. Je trouve nos novatrices textiliennes  françaises  bien timides. C'est là qu'on a parlé de texture ce mot si commode ! Le tissu, lui, matière première   n'en aurait pas assez, de texture,  à lui tout seul.  J'ai signalé déjà cet intitulé assez surréaliste de concours invitant à quitter le "carcan de la fibre" pour faire du mélange de matières, tellement plus artistique et contemporain, lui que le mélange d'étoffes.Mon tableau Réflexions est une protestation contre cette absurdité que tout le monde a gobé côté contemporaines ou surtout suiveuses de modes . On devrait se souvenir que Claude Fauque a écrit Le patchwork ou la désobéissance mais qui oserait désobéir quand la seule possibilité d'être exposée et reconnue tient au jugement  des expertes. Il ne fait  pas bon leur désobéir, et avoir de son art une autre vision que l'officielle.Fondée sur quelles connaissances ? On l'ignore un diplôme Beaux-arts ne me convainc pas dans la mesure où côté Beaux-arts, le patchwork demeure inconnu  puisque méprisé (ou l'inverse).

    D'autre part il faut savoir que côté Grands arts, les disciplines classiques  Beaux-arts et notamment dessin et peinture commençaient à passer sérieusement pour ringardes Et  ce,  dès les années 90..IL suffit d'ouvrir des livres d'histoire de l'art ou même d'écouter encore maintenant les artistes  peintres qui se plaignent que le contemporain (entendez par là le conceptuel, tout ce qui est là pour faire "penser" .). prend toute la place et  leur ôte tout subside officiel . Que dirions-nous, alors ? Nous qui n'existons même pas !!

    Résultat certain(e)s transfuges des arts plastiques sont gentiment venus nous squatter , nous expliquant au passage que les vrais artistes textiles cétait eux -et surtout elles . La création  de divers mouvements ou on s'emparaît en plus dans une sorte de kidnapping et des mots art et des mots textile l'art textile se posant en opposition aux valencs jugées ringardes ..  aussi c'était dire que nous n'étions pas des "artistes" - en marqua le début en France  , aux USA evidemment c'était avant ...On nous disait bien respecter le patchwork , comme  un stade à dépasser en somme, car  enfin avec ça "on ne pouvait rien faire ni d'artistique , ni de contemporain ".  Péremptoire ... Même l'assemblage de tissus jugé contemporain la décennie d'avant s'est trouvé relégué sous l'étiquette "classique" .J'ai lu des refus au concours justifiés par  ces simples mots "trop classique" . Il y a de la musique classique contemporaine ! mais chez nous, non !!

    J'aimerais qu'on interrroge vraiment le sens des mots par rapport aux pratiques artistiques, j'espérais que la question posée le ferait, mais la réponse qui m' est donnée prouve que même si cette question ne comporte pas de jugement de valeur, elle entérine les clivages ordinaires de la corporation "art textile" . C'est de ce fait une question quasi oratoire , puisque mon avis est considéré comme  disant le contraire de ce qu'on attend.C'est normal si contemporain veut dire pour mon interlocutrice "qui n'est pas dans la représentation" . -sic- Même l'abstrait, dans cette optique  représente  quelque chose . Mais tout ce que je vois, moi dans les installations contemporaines textiles  c'est souvent de l'abstrait passé en 3 D. On change,   on passe de la surface à la sculpture pour "innover" . J'ai dénoncé maintes fois ce  procédé pour  accéder à la cour des grands arts dès que ce qu'on fait  perd de sa valeur ou considération ,  hop, on change ! On appelle cela évolution ou ouverture. Admettons que demain sous un effet de mode conceptuelle, un cerveau génial et novateur impose l'idée  que ces fragmentations d'étoffes  nommées patchwork sont une tentative pour recoudre un monde à feu et à sang , ou quelque chose de plus abstrait ou abscons ; que cent galeries d'art le montrent comme étant le fin du fin et le nouveau de chez nouveau :  je vous parie qu'un bon pourcentage de nos contemporaines actuelles referaient du "classique" ou du  "traditionnel 'pour dames  des ouvroirs" comme il a été écrit !.

    Le discours conceptuel cautionne le mot  contemporain, le fil ou la fibre cautionne le mot "textile" . On en reste là en surface., même si on prétend faire en relief !  Planquées derrière les étiquettes qui magnifient tout et protègent !

     Or tant qu'on ne s'attaquera pas au sens des mots au sein de notre art  et en liaison avec les autres disciplines, on peut débattre à l'infini : on ne fait qu'entériner un malentendu, une méprise. Une exclusion.

     

    Mon interlocutrice conclut en disant "il ya de la place pour tout le monde" là, mille fois non . Il y a de la place dans les galeries d'art , revues d'art  pour tout ce qui a choisi de ressembler aux grands arts anciens (peinture sculpture-là le tissu sert de caution nouveauté et comme on l'a placé à côté du patchwork pour l'évincer  dans son essence même : celle d'un langage par les tissus assemblés- ou moderne (suspensions installations, performances ).

    Certes j'admire  sincèrement  certaines oeuvres, mais parfois je me dis que si on avait mis par  exemple du bois ou du métal ou de l'osier  à la place du tissu , le tissu n'étant là que pour que cet art se dise textile, l'oeuvre n'aurait pas changé fondamentalement .Son intérêt essentiel ne réside pas dans l'usage du textile ou de la fibre mais dans ses formes, et dans le discours conceptuel qui souvent l'accompagne. Tandis que ce que je fais (moi et d'autres assembleuses) ne peut  se dire qu'en tissus assemblés .Ces tissus-là et pas d'autres . Un texte se dit avec des mots, ces mots-là et pas d'autres. , si on remplace les mots par autre chose est-ce encore un texte ?

      Il faut savoir aussi que l'art contemporain officiel va bien plus loin que que ne le feront jamais nos textiliennes dans le vent du "ce qui se fait et le fait" ..Que pourrait par exemple une artiste qui tricoterait des foetus en laine-probable que ça s'est fait !-  contre la performance qui a réellement été montrée de dévorer des foetus réels... Si on veut s'inscrire dans cette course au " m'as tu vu c'est du jamais vu  "  forcené , on part forcément battues, à moins d'avaler des écheveaux de laine en public,  si on est à court d'idées  : m'écrire ce n'est pas  ce qui me manque . .Il est dans mes projets de montrer que si je ne mange pas de ces fibres-là, je peux pondre du concept de la sorte au kilomètre ; c'est une tournure d'esprit qui n'est pas si difficile à prendre .J'ai fait plus compliqué en matière de brain storming !. J'appellerai  cela oeuvre probatoire, j'écrirai tout cela sur un bout d'étoffe pour la caution textile et j'espère qu'ensuite, on considérera que ce n'est pas par  indigence artistique à accomplir  ce genre de prouesse  géniale et contemporaine  que j'ai choisi d'assembler des étoffes de toutes les manières qui me plaisent pour m'exprimer, mais par choix artistique délibéré.

     Ce qui me manque c'est l'envie de le faire, et la place aussi. et puis je n'ai pas envie d'encombrer le monde de  créations avec lesquelles je ne serai ni en accord, ni en harmonie.  

    Qu'on ne me reproche pas mon ironie, je n'en use que contre les outrecuidantes et les condescendantes.ou  celles  qui ne questionnent jamais leur art que dans leur cercle de bien-pensance contemporaine !  . Et comme elles ne me lisent pas, ça ne risque  guère de les blesser. Je connais d'ailleurs leurs oeuvres, J'en apprécie certaines. La réciproque n'est evidemment pas vraie Ce n'est pour elles que du traditionnel sans intérêt et imagnation.   L'effort de connaître et de comprendre ne marche que dans un sens.Et on parle d'ouverture!

    Cela me serait égal si on ne confisquait pas les mots "art" "textile" et contemporain à son seul profit. Et c'est le cas, le plus souvent .Voir aussi l'article l'art textile les mots confisqués qui reste fondé aujourd'hui encore .

     

     

    Les beaux restes 1 red detail art textile jacqueline foscher

    D

  • Art textile contemporain -un sondage

    Je viens de répondre à une demande émanant d'un collectif d'art textile "contemporain"

    Voici la question posée :

    « Vous êtes artiste textile et vous vous situez dans une démarche contemporaine? En quoi pensez vous que votre travail entre dans le champ de l'art contemporain? Réponse à (...)
    Attention c'est une véritable "colle"! Ce qui parait évident devant un visuel est véritablement difficile à traduire en mot! Il ne s'agit pas de dire: ça a été créé en 2015 donc c'est du contemporain! C'est faux bien sûr.. il ne s'agit pas d'évaluer votre démarche, mais d'arriver à définir par des mots ce qui différencie l'art textile contemporain d'un art textile plus traditionnel en partant de votre propre pratique! à vos méninges! »

     

    Voici ma réponse, sans utliser  mes méninges mais mes synpases .

    Une fois de plus à mon avis l’art textile , qui est d’autant plus art qu’il s’éloigne parfois du textile, rattrape en route les querelles sur le « contemporain en art » .

    Là vous devriez vous demander plutôt si nous sommes ou non « post-moderne » , car « contemporain » figurez-vous ça commence à faire démodé ! car enfin l’art contemporain , les historiens de l’art le font le plus souvent débuter en 1945 .

    Je blague à peine. Mais puisque vous y invitez je grimpe au marronnier, une fois de plus !

    Car enfin si on a vidé ce mot de son sens c’est à dessein d’exclure, de se démarquer de ce qu’on a appelé abusivement  traditionnel .

    . Ce mot « contemporain », il n’a rien à voir avec une pratique sincère , authentique de la création, telle que moi je la conçois et vis.  Ni même avec son actualité, on a l’impression vu de l’extérieur d’une sorte de secte à laquelle il faudrait avoir été initié (e). Des codes en tout cas qu’il faut respecter .

     En art textile j’ai vécu son arrivée ainsi. dans les années 1990, on s’est mis à opposer le patchwork dit traditionnel au patchwork dit contemporain , lequel contemporain peinait à se définir (et pour cause !) , et beaucoup de ses œuvres étaient des « à la manière de » Klee,  Kandinsky, Vasarely et quelques autres  . Pour une personne qui ignorait tout de ‘histoire de l’art, ça pouvait passer pour une innovation, mais pas pour moi qui m’y connaissais un peu. J’aimais aussi et tout autant l’abstraction des quilts dits traditionnels (une tradition, mais laquelle ?)  et j’ai donc continué à m’en, servir comme source graphique et non comme modèle.. Je noterai qu’on m’a couvent demandé- dans les années 2000, notamment de faire   partie d’un  groupe d’art textile contemporain, j’ai refusé , parce qu’on refusait que j’ intègre mes patchworks géométriques jugés automatiquement « traditionnels » . J’ai vécu cette exclusion de l’arrivée du contemporain , puis de l’art textile., quand il a fallu là faire du mixed media avec caution vaguement textile ….ou tomber dans la marmite du conceptuel .C’est à dire au fond imiter les Beaux-Arts .Avec retard, comme je l’ai signalé.

     

    Je me bats pour le contraire  pour un art textile unifié qui cesse d’être jugé selon la date de la source d’inspiration qu’on a choisie  ,et le genre de travail qu’on choisit . Un peintre qui fait un nu à la peinture à l’huile n’est pas qualifié automatiquement de  « plus traditionnel », le mot d’ailleurs n’existe que chez nous.

    Et j’étaie ma lutte sur un savoir que je ne cesse de compléter et où je ne cesse de découvrir.  Le passé m’intéresse autant que le présent Je mets  l’art textile dit  contemporain et l’histoire de l’art textile en regard .C’est parlant !  Un peu long à expliquer ici mais mon site et mon blog développe Je vous mets quelques liens en fin de lettre.

    Je suis  écrivain, artiste en tissus assemblés, brodeuse, et artistes en images numériques. Je m’exprime dans ces valences, n’y faisant pas carrière, mais une œuvre dont je me moque absolument qu’elle soit jugée contemporaine et à voir ce que certains font sous ce vocable je dirai très franchement que ça m’ennuierait plutôt. Je déteste le bluff, la frime et les pseudo innovations. Je déteste le snobisme aussi . Je ne suis pas convaincue non plus par les personnes qui se paient de grands mots pour faire savant. puisque pour être contemporaine au sens de « conceptuelle » il faudrait avoir une démarche…  Les mots c’est mon autre valence . et bien avant que ce ne soit tendance de relier textes et textiles. Je ne suis pas dupe des phrases creuses et ronflantes que je lis ça et là .

     Je ne tiens pas non plus à ce qu’on :me colle une étiquette de « traditionnelle »  Je ne reproduis pas des modèles anciens j’utilise des sources multiples dont certaines sont anciennes.. Or constamment dans mon parcours textile je me suis vue scindée en deux : contemporaine si je sors de la géométrie du patchwork , je redeviendrais traditionnelle dès que  j’assemble les étoffes autrement. C’est absurde . Mon œuvre n’est pas du saucisson qu’on tronçonne on me prend tout entière avec toutes mes valences ou on ne me prend pas (c’est la deuxième solution qui a prévalu je dérange, tel un ornithorynque qu’on ne sait où classer)

    J’ai constaté que les artistes hors sérail textile  que je fréquente depuis quelques années  n’ont pas du tout la même façon de voir. Déjà ils ne se laissent pas prendre aux étiquettes et pour la plupart font comme moi ..  Les peintres savent bien qu’on n’est pas forcément traditionnel en utilisant un nu qui est un de leurs « poncifs » ou un « paysage » ;ils savent que c e qui compte ce n’est pas les classifications que d’autres après coup vont appliquer à ce qu’on fait . Autrement  dit, d’être on non contemporain ils s’en moquent , on ne parle jamais de cela, mais de nos œuvres, de nos manières de manipuler nos matières , d’accéder à la création . C’est un milieu  ou on ne vous pose jamais la fameuse question dont on ne sort pas depuis plus de trente ans : en art textile : « alors tu fais du traditionnel du contemporain  ou de l’art textile » -car c’est ainsi que l’histoire s’est déroulée chez nous : ne me dites pas le contraire j’y suis depuis 1986. Inféodée à personne et hors clan , mais j’y suis. En observatrice critique, lucide et attentive. Admirative de  ce que  je ne saurais créer quand du moins cela suscite en moi une véritable émotion, mais dubitative souvent.

    A noter que lorsqu’une revue d’art a publié mon portrait d’artiste on ne m’a pas demandé si j’étais traditionnelle ou contemporaine et pas non plus quand j’ai exposé en 2004 en galerie d’art  . Non on m’a demandé comment je travaillais, on y est allé voir  … on a regardé vraiment et sans formatage .Un vrai regard que je n’ai jamais, ou si rarement trouvé en milieu art textile et surtout pas « contemporain »  au sens où les textiliennes actuelles l’entendent

     

     

    IL m'est répondu qu'on n'est pas de mon avis (je m'en serais doutée!), et qu'on n'a pas le temps de répondre On sous-entend que c'est trop long.

     

    Que je suis hors sujet en enfin que les artistes d'autres disciplines qui ne me demandent pas si je fais du traditionnel ou du contemporain , mes braves, c'est qu'ils sont tous traditionnels puisque l'abstraction et la figuration c'est du 'traditionnel" .-sic-   . Bref tout ce qui n'est pas contemporain étant traditionnel si on préfère la tautologie pourquoi donc poser la question ? Et comment se situer dans l'art contemprain sans connaître un peu les opinions et la pratique des artistes des autres arts ? Les mouvements si nombreux de  ce XX siècle ?? Mystère . Mais puiisqu'on n'a pas le temps ...Dommage , j'aurais essayé , mais comment discuter avec quelqu'un qui sait déjà tout !