Réflexion-débat-questionnement
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Art textile et tissus une expérience
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 16/07/2024
- Dans opinions
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Dans l'article source graphique et modèles j'avais montré déjà combien c'est aussi le choix des étoffes valeurs couleurs motif et textures tissés qui fait la création personnelle dans un quilt ou un patchwork .
J'ai voulu démontrer un peu plus loin ...
Soit ce plan de quilt que j'ai elaboré , et bloc répertorié sous le nom d'Attic Window est utilisé de manière à s'adapter à des échantillons de différentes tailles. Il repose sur un contraste de valeur mais également sur une gradation dans la taille des carrés au centre du bloc de 2 cm à 4 cm , le bloc lui restant à 6 cm de dimension totale. Les séquences se répètent de manière progressive deux carrés de 2cm, un de 2,5 un de 3 cm,un de 3,5 deux de 4 un de 3 et on repart en inversant la progression . Le bloc mesurant 6 cm les bordures evidemment varient en largeur pour s'adapter c'est à dire ce plan est tout sauf simpliste. En lui-même peint sur une toile je parierai qu'il aurait une chance de passer pour de l'art abstrait, pourvu qu'il soit signé d'un nom masculin et connu .. (sourire) .
Je voulais quelque chose de très coloré , et le titre Facettes est un clin d'oeil à l'artiste Käffe Fassett , bien que pour cet ouvrage je ne m'en sois pas inspirée. Le quilt a paru comme modèle dans un numéro de la revue Création patchwork il y a une quinzaine d'années . Le thème du magazine était "comme un tableau" et l'ouvrage fut rapproché du cubisme par la directrice de publication . Je ne pense pas qu'il le soit (sourire) et n'étant pas peintre, mon but restait une expression par la variété des étoffes , un souci aussi de valoriser le moindre petit morceau dans une composition structurée comme une architecture. Rigueur et variété restant mes phares.
Il y a six ou sept ans, l'envie m'a prise ede réutiliser exactement ce même plan pour une surface d'une tonalité totalement différente, sur le thème de l'hiver, cette fois. je disposais d'une collection d'échantillons des années 50 -60 issus de la maison Jean -Claude frères, tissus de luxe donc , dont j'avais déjà usé pour le quilt Noblesse oblige (cf index) .J'ai élu des tonalités bleues beiges et gris réparties en zones et pour les encadrements du noir ou blanc et du blanc et noir En variant au maximum les étoffes qui comportent aussi bien du coton que des soies des soies "givrées" -introuvables - ce que j'aime dans de telles surfaces c'est que les variations subtiles sans, gâcher l'effet d'ensemble, apportent vibrations et enlèvent la monotonie du "même tissu au même endroit"(tellement pls facile au demeurant !) . Au public de dire si j' ai réussi .ces "Hivernales " qui viennent aussi s'insérer dans une série 'images numériques
à noter que si Facettes est un quilt matelassé , Hivernales est un patchwork, j'ai préféré donner le pouvoir d'expression aux tissus "nus" sans ajout . Et je revendique ce droit , en vain depuis 40 ans. Ce choix qui devrait incomber à l'artiste si on travaillait en artiste et non en couturière "disciplinée" et soumise aux diktats. . Ce qui fait que cette surface est rigoureusement inexposable puisque les patchworks DOIVENT être des quilts matelassés. Ni en art généraliste puisque c'est hors champ, ni en milieu patchwork puisque il faudrait un ajout dont je ne veux absolument pas sur cette surface-là. Je laisse à réfléchir sur le degré d'intelligence des "regards sur" et des rejets et exclusions...
Ainsi l'expérience aimerait amener à une réflexion sur la manière dont on crée ; selon l'art qu'on pratique. Au fait que le bloc n'est qu'un point de départ pas un "modèle " que chacun peut à sa guise tranformer, comme un peintre qui peint un nu ou un paysage ne va pas avoir le même résultat qu'un autre. Revenir au point de départ d'un art qui est une expression par des tissus différents assemblés our composer quelque chose. Revenir toujours à ce que les tissus peuvent dire et donner tels qu'on les recueille . En faire des univers ... des harmonies, des dissonances. Réfléchir aussi sur le fait que le plan s'il est important n'est pas tout . ... penser que cet art surtout n'est ni du dessin , ni de la peinture, mais tout autre chose . Penser que tout ce travail : recueillir des étoffes les assortir , composer avec est un art quand on crée par soi-même sans copier ou suivre ...et qu'il mérite mieux que le mépris la rélégation ou l'assimilation à la copie de modèle auquel il est trop souvent condamné . Mieux aussi que le sempiternel "quelle patience" et "quelle dexterité". .. ce n'est pas cela du tout qu'il faut au départ mais un vision de ce qu'on veut obtenir avec ces étoffes-là.Bien sûr de la technique et de la patience et de l'exactitude, il en faut comme en toute activité humaine non salopée mais il en faudrait tout autant si tous ces morceaux étaient de la même étoffe ... C'est donc que l'essentiel n'est pas là. Plus de 40 ans que je me bats pour cela, et si je me répète c'est que j'ai le sentiment de n'y être point parvenue. Ce qu'on y loue n'est TOUJOURS pas ce que j'aimerais qu'on y voie. alors j'essaie toujours j'essaie encore...
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Des tissus et de l'art textile : géométrie et variété : les quilts à gabarit unique
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 11/05/2024
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I- Géométrie et variété : au-delà des "scraps quilts " et "charms quilts" : les surfaces à gabarit unique
NB : un "scrap quilt est selon la tradition américaine un quilt comportant beaucoup de tissus différents ( littéralement : un quilt de chutes); L'artiste Roberta Horton indique un mininum de 75 tissus différents . Mes quilts en comportent entre 200 et plus de 1000 , parfois. Un scrap quilt peut être composé de formes uniques, ou de carrés appelés "blocs" . Les blocs feront l'objet d'un autre article.
Un charm quilt lui comporte des tissus tous différents souvent d'une même forme , au nombre de 999 , ou plus ... ou moins !
Quand je réfléchis au rôle des tissus dans ma vie et un de mes arts, je perçois, dès l'abord , une différence entre la manière dont j'envisage mes "surfaces" et celles de beaucoup d'autres, pratiquantes et artistes. Même et surtout si on ne voit que les ressemblances. pour classer, souvent en minorant ... déclasser, donc.
Cet attrait pour le tissu que j'ai ne vient pas d'un goût pour la couture utilitaire (justement, c'est un moyen d'y échapper) donc même si j'ai commencé en faisant des couvertures pour mes enfants, je créais d'abord et avant tout une surface en assemblage de tissus disparates. Ce besoin d'harmoniser une sorte de chaos est toujours en moi 40 ans après mes débuts. Et la géométrie n'est pas pour moi un moyen de respecter la tradition , mais justement de donner cohérence à un ensemble.Une structure.
Ma joie n'était pas d'aller dans un magasin et de demander à la vendeuse (comme je l'ai vu faire tant de fois! ) d'assortir pour moi .Ou de faire chauffer ma carte bancaire à un salon dédié aux "arts d'aiguille". D'où cette "collection" de toutes sortes de textiles venus d'un peu partout temps et lieux et personnes différentes .Et des tissus dits "commerciaux" aussi. . Pas de snobisme de la recup pour faire écolo ou "arte povera" . Du spécial pour patchwork et du pas du tout fait pour cet usage, les deux, toujours sans exclure rien de ce qui me semblait nécessaire pour une surface donnée dire quelque chose de personnel avec eux. Aussi les fils et les boutons, le dentelles, les perles, voire les plumes (ce qui est commun à beaucoup de pratiquantes textiles qu'elles en usent en loisir ou en art véritable) , mais avant tout LES TISSUS et non LE TISSU comme symbole de ci ou ça. Les tissus d'abord . Et surtout les tissus imprimés. Ou structurés par un tissage particulier. Or aimer les tissus, dans leur infinie diversité, ainsi c'est se condamner à n'être pas "contemporaine" ni d'ailleurs vraiment traditionnelle selon les préjugés autour de cette étiquette car là on me tacle sur mon trop de couleurs, mes équerrages imparfaits et le fait que non je vois pas d'obligation à matelasser toutes mes surfaces ..Je fais des quilts(matelassés c'est ce que le mot veut dire) et des patchworks (pas forcément matelassés) et c'est moi moi qui décide...pas le droit coutumier qui veut que ces géométries soient obligatoirement matelassées alors qu'aux USA et plus encore en Asie on trouve dès les débuts de surfaces assemblées non matelassées.Et que les justications réelles de cette "obligation" universellement imposée par le lobby des loisirs créatifs sont donc impératif commercial, aussi . On ne peut pas le dire.. Moi , je le dis! Et je le fais. Librement. Je ne vends rien. Et je suis pas sponsorisée , non plus. Je ne postule à aucune grande "messe d'art textile" , non plus. Je ne risque pas de méconter telle ou telle décideuse ès "ce qui vaut en art textile" : c'est déjà fait et il y a un bail !
Vu de loin mes quilts géométriques ressemblent à ce que les américaines nomment "scraps quilts" ou "charm quilts" . Et certes ces voies m'ont inspirée ; c'est même mon premier charm quilt en 1991qui m'a amenée à cette "collection", conçue, je l'ai dit comme un vocabulaire textile.
Dans ce charm quilt il n'y a pratiquement pas de tissus achetés ni même de tissus dit américains, je n'ai éliminé ni la toile à matelas(visible sur la photo de détail) , ni les jerseys ... juste renforcés d'une toile à beurre et j'ai brodé sur les triangles écrus du pourtour (qui viennent de la robe d'une collègue de travail !) le nom de tous les donateurs. L'agencement des couleurs et valeurs est de moi . Je n'ai pas suivi de"modèle" . Les matières sont multiples : coton , synthétique, viscose...
Si vous comparez à ce qui se fait aujourd'hui-et à ce qui se faisait à l'époque- dans la fameuse "tradition" américaine ce sont des quilts créés à partir d'assortiments souvent pré assortis, -les tissus vont déjà ensemble, ils ont une unité et sont tous de la même époque et mode - non que ce soit laid, ni non artistique, mais ce que je voudrais (desespéremment !) faire saisir c'est que si le travail de couture est le même,la structure ressemblante, la visée est totalement autre. Là, à la suite de ma "cueillette" je me suis retrouvée avec 999 tissus qui n'avaient rien à voir entre eux. Ma joie si profonde est de les faire "chanter ensemble" alors que ce n'était pas prévu pour cet usage . Et croyez-moi ce n'est si "facile" et croyez-moi encore c'est pour moi désespérant absolument que ce travail-là ne soit pas vu et qu'on me dise à chaque fois ça ressemble à .. justement ces quilts où le choix des étoffes, la manière de les assortir n'est absolument pas la même.
Quand je regarde le quilt de quelqu'un d'autre je regarde cela : comment la personne a choisi et agencé les tissus dans leurs différences , comment elle les a choisis, pour dire quoi. Pas que le dessin, la composition ou le jeu des valeurs-couleurs qui sont des critères certes importants, mais qui effacent celui qui fonde un art d'ssemblage du disparate. .Et c'est cela que j'aime à lire sur les blogs de patchwork-quilt, pas des conseils de couture qu'on peut trouver partout. Ni le quilt de la revue Machin chose refait en vert au lieu de bleu. L'art est dans ce rapport singulier que chacune peut avoir avec cette matière, si ces choix échappent au conditionnement des modes et tendances , et ce même si on part d'une source dite traditionnelle. On ne voit que la ressemblance de structure. C'est comme dire qu'un paysage d'un peintre c'est ressemblant à celui d'un autre même si l'un est hyperrréaliste et l'autre impressionniste et un autre frôlant l'abstraction parce que ce sont deux paysages. Je ne crois pas non plus qu'on dise aux peintres qu'ils font du traditionnel quand ils font du figuratif par exemple. Du moins pas si systématiquement ...
Autre manière d'aborder la variété de étoffes le monochrome, toujours avec une forme de base "unique" . Ce quilt Blues est aussi un charm quilt pas deux tissus semblables. Le dessin porte le nom d'Inner city block , et si vous cherchez sous ce nom vous trouverez maints tutoriels où les trois valeurs sont opposées (clair moyen foncé ) , souvent le bleu, comme dans ce quilt mais on met toujours les mêmes tissus ou des tissus rrès ressemblants; là encore j'ai recueilli tous les tissus bleus que je pouvais et pas des "tout bleus" mais à dominante bleue, ce qui est dfférent . Tissus américains, hollandais récupération de vêtements, et matières diverses toujours mêlées . La vue de détail vous permet de voir en quoi ce quilt est différent des autres qui lui ressemblent , ce qui est ma touche personnelle , j'ai assorti deux à deux des tissus ressemblants et ce fut une joie de créer ces unités de "faux jumeaux" plus ou moins hétérozygotes ; Et pour ceux qui comportaient d'autres couleurs que du bleu de placer ces notes "dissidentes" de manière à faire pour le regard des rappels et de échos ( cela chez moi se fait d' instinct, pas de calcul, c'est après coup que je peux expliquer la composition ) .
il m'est arrivé même n'user que de blanc. ,L'alpha et l'omega. Un jour de détresse intense , le motif du cercueil (coffin) cet hexagone allongé dont on faisait aux Usa les quilts de deuil '(Mourning quilts) s'est imposé et la couleur blanche ; j'assmilais dans mon esprit les morts d'espoirs avortés,de portes entrouvertes qu'on vous claque au nez, d'amitiés trahies ou d'abandons précoces parce qu'on lasse soudain, à des morts d'enfants (des choses mortes en leur enfance, avant qu'on ait pu en jouir complètement) . L'hexagone noir est unique et d'un symbolisme facile à élucider .
Le quilt Le Conservatoire qui est présenté ici est encore une autre "aventure" d'assortisseuse; Il s'inspire des ouvrages de l'artiste Deirdre Amsden à laquelle j'ai emprunté le procédé de dégradé de valeurs. Il s'agissait de présenter ma collection sans exclure grand chose. Les étoffes que j'avais différaient fondamentalement de de celles de Deirdre, je devais donc trouver mes pistes moi même , ce fut d'ailleurs un si grand plaisir et défi à la fois ...
Dans le quilt Jaillissements je suis partie de cette image numérique reprise en impression pour la doublure) : et là j'ai usé volontairement de tissus unis ou faux unis :
L'image initiale
On peut voir aussi dans l'index le quilt Pure Mosaïque qui lui aussi part d'une image numérique pixellisé et traitée en tissus marbrés et faux unis appelant la céramique.
Là il faudrait faire une pause .
Bien sûr je pourrais dire qu'entre le charm quilt de mes débuts et celui intitulé Jaillissement il ya eu une évolution vers le "plus contemporain" selon les critères actuels. Pourtant les deux surfaces obéissent exactement au même rapport aux tissus : le désir de varier à l'intérieur d'une zone mes étoffes le plus possible pour donner une sorte de vibration et de nuançage différenttout à fait de celui de la peinture et qui est propre à mon medium (cf photo de détail j'aurais pu mettre le même tissu gris .. ) ; j'ajouterai au niveau de "l'assortissage" expressif les deux premiers quilts ont été plus difficiles à créer . Car assembler des unis ou assimilés c' est toujours moins casse-gueule que de se "battre" avec x imprimés et motifs coupés qui partent dans tous les sens font "incohérents" de nature et comportent des couleurs additionnelles. Seulement l'uni ça ressemble forcément plus à un tableau de peintre abstrait, qui eux ont leur lettres de noblesse. L'imprimé, je le crains fait prolétaire au mauvais sens du terme et aussi " trop patchwork" le mot restant irrémédiablement entaché d'une sorte d'aura de médiocrité. . J'ai tout entendu dire au tournant de l'an 2000 par des amies "branchées" qui ne juraient plus que par l'uni et le teint arisanal voire la peinture sur tissu (annexons donc tous les peintres qui peignent sur toile à l'art textile : c'est la même démarche puisque le tissu là devient un support ) Moi je veux faire des choses qui ne se peignent pas ...ou très difficilement. Dans Jaillissement, le travail principal artistique est venu de l'image (que j'ai créée ) tandis que dans les deux pemiers quilts il vient des tissus et de leur agencement. Même si le nuançage des zones rétablit ce travail essentiel pour moi . sinon autant grder l'image telle quelle ; il est vrai la faire imprimer sur tissu suffit pour la caution textile de l'oeuvre- J'entends mon art des tissus tout autrementn et on m'accoera qu'avec plus de 4000 images numériques imprimables, j'aurais de quoi faire une oeuvre jugée contemporaine ... juste que : ce n'est pas ce que je veux faire, je n'y aurais aucun plaisir, mais qu'on comprenne que j'en ai les moyens côté "imagination" graphique et que je ne fais pas du patchwork pour me cdélasser à côté de cette "vraie" c réation... tellement plus noble etc.
My tailor is rich est fondé lui sur la forme dite "dé à coudre", et là encore c'était le désir d'user de petits morceaux de soie et de tissus en précieux lamés que j'avais récupérés ( petites chutes de la collection Abraham) , j'ai imaginé un "mouvement" avec les tons chauds alliés aux dorés et les froids aux argentés, il est évident que matelasset de telles étoffes me semblait une hérésie j'ai donc brodé à la main les lignes horizontales , comme des étagères où serait posée cette collection de dés.
Comme c'est souvent en faisant une surface que l'envie et l'idée me viennent d'une autre toujours en explorant les "gabarits uniques" je me suis attaquée à une forme avec courbes , ainsi est né cet Avenir radieux comme je voulais la réaliser cette fois avec des soies et des velours , j'ai utilisé la méthode d'assemblage dite "anglaise" où on bâtit les pièces sur des papiers et on les assemble ensuite par surjet ; l'ensemble et fixé sur sur une flanelle et chaque pourtour est rebrodé au point de chaînette torse .. Les motifs qui constituent des sortes d'étoiles courbes (spinning star en anglais) Au centre pour cacher l'assemblage qui, avec ces tissus, ces formes et cette technique ne pouvait être impeccable, j'ai appliqué de petites étoiles (le motif en réduction) brodées main. La bordure est aussi ornée d'étoiles appliquées et brodées un peu plus grande Tout cela reste "imparfait" au plan du nickel chrome si prisé dans ma discipline, mais ce fut un tel plaisir de création et de toucher !
Et comme je n'ai pas renoncé au plaisir de ces surfaces à gabarit unique, (ne me voulant pas "contemporaine" ni "traditionnelle" mais intemporelle au meilleur cas -sourire) mais à tissus très variés, venus de partout et harmonisés à ma manière, il y aura probablement dans cette catégorie, des ajouts. Il y existe aussi d'autres comme Dentelles décalées à voir dans l'index .
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Apprentissages première partie
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 03/09/2023
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Rappeler comment on a appris-et comment on apprend encore. En insistant sur le fait qu'aucune manière ne devrait être déconsidérée si elle amène à une création authentique... et personnelle , singulière. Marquée du sceau d'une personnalité. Ce que j'espère sinon avoir atteint, au moins avoir tenté!
Comment a-t-on appris ces gestes des arts du fil,lesquels, pourquoi de cette façon, et dans quelle visée ? Quelles furent nos écoles et nos maîtres, car nul n'apprend de rien-ni de personne et le terme "autodidacte" serait à reconsidérer.Un livre dont on use est écrit par un auteur, un tuto est fait par quelqu'un!
La première chose à poser, me concernant c'est qu'un apprentissage n'est pour moi en quelque domaine que ce soit jamais terminé+outre ce que j'oublie -et que je dois réapprendre car la mémoire quand on vieillit joue des tours! - ce qu'on découvre (il existe tant de techniques!et même à l'intérieur d'un "genre" -je songe à la broderie blanche ou à la tapisserie à l'aiguille notamment- ) ce qu'on redécouvre aussi ... pour moi je ne suis jamais arrivée à un niveau qui me semblerait "suffisant" , et j'ai soif de tout le reste ! Non pas dans un désir de "tout" savoir, c'est impossible mais de diversifier mes approches . Sans doute parce qu'en moi reste fixé ce parallèle avec les mots , les textes, l'écriture. Et que je vis l'acte de créer comme un chemin d'errance.
Dans la France de l'après-guerre, où j'ai grandi, les femmes pour la plupart avaient appris à coudre à l'école ou en famille. c'était quasi une nécessité, surtout pour celles d'un milieu social qu'on dira défavorisé. Ce qui me veut pas dire que toutes aimaient cela, ni que toutes étaient douées pour ce faire. Il existait déjà et j'ai deux cahiers qui en témoignent des enseignements professionnels très pointus pour celles qui désiraient en faire leur gagne-pain Pour les autres on apprenait souvent à l'âge dit de raison à enfiler et tenir une aiguille et à tricoter voire crocheter et même des rudiments de tissage -en ce qui me concerne sur un métier jouet marque Tssanova-, broder venait souvent en même temps pour les points basiques; point de croix en tête . A l'école on faisait des alphabets sur du canevas, mais c'est au lycée pour moi que les choses sérieuses ont commencé sous l'égide d'un professeur si sévère qu'elle nous terrrorisait - en ce cas même si j'apprends , je me sens trop contrainte pour aimer ce que je fais, je me borne au strict nécessaire mon imagination est repliée ! . En fait j'ai eu quelques bases de cette manière, mais c'est en expérimentant par moi-même et avec les conseils maternels,et surtout les "leçons" des magazines féminins que j'ai appris.
Passé l'âge des torchons et mouchoirs à ourler (main puis machine) j'ai confectionné mes premières robes. La toute première à 14 ans,c'est celle du poème "Citron vert" dans le recueil Le Cahier débrouillé avec un tissu dont je raconterai l'histoire. On travaillait avec les patrons des magazines j'aimais beaucoup ceux de Femmes d'Aujourd'hui( que j'ai gardés) " . Apprendre à couper en respectant le sens du fil, ce qui n'était pas toujours évident dans un tissu issu d'un autre vêtement, couper, bâtir, essayer (ouille les épingles!) retoucher, monter ... Je me débrouillais honorablement, mais sans les qualités de finisseuse des vraies professionnelle.s Ma mère nous disait "fouturières".
La machine était une Singer achetée par ma mère en Afrique, électrique, mais nous avions choisi de la tourner à la manivelle à la main, ce qui permettait d'adapter la vitesse, même si nous n'avions plus qu'une main pour guider. J'ai toujours une timidité envers les machines à coudre, même si celle-là je savais la réparer ....Familière, comme le chat de la maison.
J'y ai cousu des dizaines de robes pour moi et parfois pour ma soeur quand elle travaillait et même un manteau avec poches et boutonnières passepoilées! . Et parfois je créais même entièrement le vêtement , patron compris, tel cet ensemble pour la plage en 1970, avec lequel je pose, en frimant un peu , pour rire!
C'est paradoxalemet la découverte du patchwork qui m'a éloignée de la couture des vêtements. Mais c'est la couture utilitaire qui m'a donné le goût des étoffes et les restes de vêtements de ma jeunesse (voire de celle de ma mère) constituent toujours une partie de ma collection de ce que je nomme mon vocabulaire textile.
Broder fut une autre aventure. Vers mes sept ans j'ai appris outre le point de croix le point de tige , j'ai raconté dans l'article les palettes d'une textilienne les fils ma passion de collectionneuse déjà pour eux (qui incluait les fils à tricoter) . C'était l'époque des napperons et les mêmes magazines fournissaient des motifs en noir et blanc. Puis au lycée des tabliers à carreaux rose et blanc sur lesquels il fallait broder nom et prénom en entier et pour moi c'était long !
Pour nous bodeuses dites domestiques" apprendre à broder c'était donc apprendre des points. A l'école je n'ai pas souvenir d'en avoir appris beaucoup sauf le point devant (ou avant), le point arrière, le point lancé basique .. outre les explications des magazines, mon maître fut le Savoir Broder des femmes d'aujourd'hui. je l'ai toujours et je m'en sers toujours. Quand je fus créatrice de modèles je trouvais pratique d'avoir des carnets d'entraînement ou d'échantillons:
Chaque brodeuse a ses points de prédilection et ceux qu'elle redoute voire déteste faire ( au début j'évitais le passé empiétant ...) C'est dans ce manuel que j'ai découvert un de mes grands favoris : le point de Palestrina , celui qui a bordé bien plus tard les blocs de mon crazy L'arlequin fou.
en lisière de dentelle ledit point de Palestrina
Aujourd'hui encore il reste un me mes favoris. j'ai découvert d'autres points "noués" liés , ce qui permet justement d'obtenir des textures analogues et nuancées. Le point de chausson aussi et le point d'épine ... et le feston .. Vers mes 17 ans je maîtrisais suffisamment passé plat plumetis et point de bourdon pour faire quelques initiales en broderie blanche . J'ai perdu la main et surtout l'acuité visuelle. Je brodais avec deux fils de mouliné DMC quand on en préconisait trois, ce qui rendait mon travail plus fin. Je brodais, à l'ancienne mon trousseau (je n'ai jamais hésité à paraître démodée!) galons sur serviettes de toilettes, bouquets sur draps, nappes )
Nappe années 70
Les outils étaient réduits au strict minimum pas de tambour (et qu'on ne hurle pas si on sait que beaucoup de broderies perlées de Bretagne notamment ont été faites ainsi (cf le livre de Odile Le Goïc Le Guyader Manuel de broderien°1 : le perlage ) en tendant le tissu entre ses deux mains ce que fait aussi parfois la brodeuse Christen Brown. Depuis j'en use pour certains points et d'autres non résolument . J'ai noté que si je l'avoue on pointe aussi sec son nez ur une éventuelle imperfection. Mes soeurs brodeuses, débarrassez-vous donc de vos préjugés . Cette libellule a été faite sans tambour. Est-elle salopée ?
En revanche j'ai utilisé un tambour pour le passé plat de ce coussin :
C'est selon et pour la même broderie il m'arrive de faire certains points avec tambour et d'autres sans comme ce tableau Elégance :
Avec et sans tambour...
Apprendre c'est aussi se dégager des diktats tracer ses voies personnelles y compris ans les gestes techniques.. Je n'aurais pas créé toutes ces broderies si je m'étais obligée à user d'outils qui ne me convenaient pas, j'ai adapté mes gestes en gardant le plaisir de faire qui chez moi vient d'un sorte de "corps à corps" avec les matières. Brodeuses mes soeurs prenez vos distances avec les conseils péremptoires. Voyez ce qui vous permet de réussir sans prendre l'activité en dégoût. Il n'est qu'une mauvaise méthode : celle qui empêche d'avancer, d'expérimenter, qui inhibe. Non ce n'est pas vrai que l'entraînement 'normé" vient à bout de tout (et quel profit à perdre des heures selon une méthode, quand une autre fonctionnerait mieux pour vous ? ) . Les anciens livres d'apprentissage signés cousine Claire dont je possède un exemplaire conseillent de remplacer le tambour par un morceau de moleskine et pourtant Cousine Claire était vraiment une virtuose! Certaines dentelles à l'aiguille sont faites sur cartons... Au lycée nous brodions aussi sans tambour (il ya aussi sans doute quelque pression commerciale des fabricants d'accessoires, sait-on ?) . Quant au métier , il faut de la place pour l'installer .. Certes ça vous pose en spécialiste .. mais aucun outil ne donne ni la maîtrise, ni l'imagination créatrice et même certains contribuent chez certaines à décourager et donc à abandonner, alors qu'on peut tester d'autres moyens. . L'idée que seule la contrainte dépassée permettrait "l'excellence" est sans doute défendable, mais ce n'est pas la mienne et ça ne m'a nullement empêchée de créer des modèles pour des revues. J'espère que les broderies ci-dessus et ci -dessous et le fait que j'ai travaillé pour des magazines vous persuaderont que d'autres méthodes sont possibles et permettant un résultat convenable . Testez et oubliez les "c'est obligatoire" . Je ne connais que deux cas où un tambour ou métier sont obligatoires : le punch needle et le point de Beauvais (ou le Lunéville) là impossible de faire autrement.
De même jamais de dé. (mais parfois un sparadrap) , j'ai de très petits doigts. En revanche des aiguilles appropriées ...De bons ciseaux . Des épingles. du fil à bâtir. Aucun gadget pour "faire gagner du temps", j'aime prendre le mien...et ce, même quand je devais respecter des délais, à titre professionnel.Cela posé, je continue à apprendre... de diverses manières. Je ne trouve pas inutile de découvrir de nouveaux points , de nouveaux genres de "broderie" aussi et si ma vue ne me permet plus de tout essayer-sinon réussir ! je puis au moins admirer... Mes maîtres ce sont donc le auteurs des livres, passé et présent mêlés . Je les collectionne et même si on y rerouve les mêmes points,le explications varient chaque brodeuse ou brodeur a sa manière d'expliquer, de classer voire son style . Outre les livres il ya les sites celui de Mary Corbet si souvent cité, celui de Sharon Boggon . Je passe sur les innombrables tutoriels ..en videos. J'aime cette variété d'abords et de parcours. Sur les livres de broderie avec lesquels j'ai appris on peut lire sur ce lien quels sont mes favoris.
Je n'ai pas baucoup en revanche, pratiqué la broderie machine sauf pour un usage des points décoratifs, j'en parlerai dans l'article suivant consacré au patchwork.
Un souhait pour finir -voeu pieux s'il en est- : que le fait de ne pas savoir coudre ni broder ne soit pas considéré comme une forme supériorité en art textile. on vous expliquera soit qu'il faut savoir surtout dessiner graver et peindre pour exceller en textile , ou bien encore qu'il faut désapprendre ci ou ça . Pour moi - j'estime qu'aucune ignorance n'est utile et que toute technique sert à mon expression et étant une artiste textile dans le sens où fils et tissus sont mes matériaux de base, absolument fondamentaux, et nécessaires autant que suffisants , je ne vois pas en quoi la maîtrise de de ce qui permet de créer avec ces matières serait une moins value, d'autant qu'elle est mutltiple, variée et qu'au bout de 40 ans rien que dans ce domaine-là il me reste encore et toujours à apprendre. ..Or si on considère ce qui est primé, exposé, les discours autour de cet art, ce qui a le vent en poupe, est coté on s'aperoit que si ce n'est pas une moins value avouée, c'en est une insidieuse(evidemment savoir coudre , ça ne fait pas contemporain !Sauf à e acompagner cettt humble geste de beaux discours conceptuels ! J'ajoute que j'admire les savoirs autres qui permettent de magnifiques mixed media. om suvent dessin ou photographie dient l'essentiel, meme si on y cherche parfois ce que justement le textile y dit . Pour beaucoup je les ressens certes comme de l'art, mais pas textile suffisamment à mes yeux et je m'insurge toujours cntre le fait que ce soit présenté comme étant supérieur ou même encore cela marquerait la imite entre art et artisanat etc. . Et j'ai toujours senti à l'égard de mon "tout fils tout tissu" comme une sorte de condescendante réticence.qui par miracle s'atténue quand je montre ma polyvalence, (je ne prêche donc pas pro domo !) . Je parle appuyée sur une longue expérience de la manière dont les créations sont regardées, reçues, valorisées par tel ou tel "milieu". de la possibilté qu'elles ont ou pas d'être montrées à un public , recensées ou exclues de l'art officiel .. Etudier tout cela fait aussi partie de mes apprentissages. Et de mes luttes !
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Echouez-mieux...
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 20/02/2023
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"Être artiste veut dire ne pas calculer, ne pas compter, mûrir tel un arbre qui ne presse pas sa sève, et qui, confiant, se dresse dans les tempêtes printanières sans craindre que l'été puisse ne pas venir. Lettres à un jeune poète de Rainer Maria Rilke "
Il ya quelques années , j'ai reçu , dans les innombrables mails commerciaux tentant de me persuader de payer quelqu'un pour me promouvoir,ou des murs pour exposer mes chiffons d'art -ou les deux - cette liste de judicieux anti-conseils, qui du reste, si on veut "faire carrière" sont souvent parfaitement valables en prenant naturellement le contrepied de ces affirmations , ou tout simplement si on trouve nécessaire de vendre ses oeuvres, j'entends par là qu'on a vraiment besoin pour vivre ou que tout simplement on pense que tout travail mérite salaire. On dira que c'est une "chance" que ce ne soit pas mon cas . (je rappelle toutefois que ce devrait être un choix et non une obligation pour "compter" dans le monde de l'art ) .
Je ne VEUX PAS, je n'ai jamais voulu faire une CARRIERE mais une OEUVRE et je vous rassure, là, sur mon dessein essentiel j'ai parfaitement réussi en échouant, donc . C'est à dire que ces conseils ironiques je les ai suivis d'instinct quasi tous, à la lettre.
Mais si vous voulez, vous, faire carrière,ou tout au moins vous faire "reconnaître " (pour moi la reconnaissance a un autre sens) c'est tout différent. Il n'est pas indécent de vouloir exposer, avoir un CV de compétition ( mais l'art est-il du sport ?) ;vendre , ni même de rêver qu'on est le Picasso ou le Léonard de Vinci ddu XXI° siècle en sa discipline. . On a le droit de rêver à la gloire et on ne vit pas d'amour de l'art et d'eau fraîche, mais l'important c'est de savoir ce qu'on veut et de déjouer les pièges -ceux de la vanité ne sont pas les moindres. Je n'entends pas comme vanité la légitime fierté du travail accompli .
A vous de choisir! moi c'est fait et je peux chanter comme Edith Piaf : non, je ne regrette rien ...ce fut au prix du mépris et de l'indifférence des milieux "où ça compte" mais on ne peut tout avoir,non plus.
Je comprends parfaitement un parcours inverse et des opinions, à cet égard , diamétralement opposées aux miennes. La preuve : il m'arrive d'acheter aux artistes qui vendent; et je trouve normal de payer alors leur oeuvre au prix qu'ils en demandent et si ce n'est pas dans mes moyens il me reste la joie gratuite de les avoir admirées.
J'ajoute certes, je le peux mais pas parce que je suis une nantie, j'ai "acheté" ce droit en quelque sorte et ce n'est pas sans contrepartie ni renoncements.
NB Je ne rappelle plus le nom de l'auteur qu'il me pardonne, je reçois énormément de courriels tentant de me "commercialiser" et promouvoir contre rétribution, donc j'ai oublié de qui il émanait, mais s'il se reconnaît et veut que je cite son nom ou qu'offensé il préfère que j'enlève cet article, je le ferai volontiers.
Or donc, voici la chose :
Comment échouer en tant qu'artiste -
.1-Croire que les artistes ne gagnent jamais leur vie.
Jeffs Koons, si très bien , merci . Soyons sérieux.
Je connais des dizaines d'artistes, beaucoup arrivent à exposer, se disent ou se présentent comme "pros" mais aucun à ma connaissance ne vit uniquement de son art, sauf à donner des cours, organiser des stages de "créativité", voire en art textile vendre du matériel, des kits etc. J'ai moi-même vendu des modèles, un moment, je ne juge donc pas cela comme un crime ! Certains m'ont avoué aussi faire des "petits trucs" qui se vendent , eux, bien, alors que par désir profond ils n'adhèrent pas à ce genre de "création", pour faire bouillir la marmite. Si c'est "vivre de son art" je veux bien . Pour moi ce n'est pas ça. .Soyons honnêtes et réalistes, une oeuvre d'art a une cote qui dépend de la notoriété. Or les vraiment cotés suffisamment pour en vivre sont rarissimes. Je rappellerai aussi que la valeur financière(en l'époque où l'artiste vit !) et la valeur artistique, non mille fois non, ça n'a rien à voir.
Deuxième objection : on fait quoi si on exerce un art qui n'en est pas un ?Un dont les galeristes vous disent "ah non surtout pas de patchwork!" . On fait comment si on en exerce trois en les reliant ? Bref si on est un sujet artiste non identifiable d'un art relégué ?
2-Avoir un book de présentation mal préparer(sic) avec des photos de mauvaise qualité.
NB - Mettre la bonne orthographe est aussi un plus , pour un commercial. Bon il peut s'agir d'une étourderie .Mais j'ai publié un excellent livre à ce sujet (je ris!)
Objection : Là , si vous n'avez pas les moyens de vous payer les services d'un pro, vous êtes voué à l'échec. On me l'a faite celle-là quand j'ai voulu publier mes livres sur le patchwork. Cela revenait à dépenser des sommes très importantes pour un droit d'auteur des plus réduits et seulement en cas de vente. Bref si vous voulez être artiste, soyez riches d'abord (ou trouvez-vous un mécène ). Faut banquer, pour tout ça ! Sans garantie aucune de récupérer la mise. on dira c'est le sens du risque.. Voire ... on peut concevoir le risque autrement, aussi .
C'est vrai il vaut mieux que l'emballage soit "cadeau" et donc qu'une bonne présentation est indéniablement un plus, on le voit en matière d'accrochage, notamment.. Mais si la valeur de l'oeuvre se juge à la qualité de la photo, c'est le photographe qui est l'artiste !
D'autre part si votre photo met en valeur un peu trop une oeuvre qui décevra de visu ... il y a comme un hic ! on ne vend pas une apparence, mais l'oeuvre dans sa réalité ....
3- Rédiger une présentation vague, décousue, que personne ne comprend et dans laquelle on apparaît prétentieux.
Ben là, j'avoue, les bras m'en tombent ! Le vague et le décousu, OK , je veux bien. Quand je lis les "discours" qui accompagnent les oeuvres très cotées ou en vue de certains artistes conceptuels j'avoue que je ne suis pas du tout d'accord. Quand c'est clairement documenté, appuyé sur une connaissance des arts qu'on exerce , c'est là qu'on a toutes les chances d'échouer( c'est honnête et ennuyeux! ).
Un certain public adore ne pas comprendre, qu'on lui jette de la poudre aux yeux,, du moins celui des snobs des intelligentsias qui régentent le monde de l'art. Il faut un baratin et si possible bourré de mots abstraits et abscons auquel nos snobinards de service, n'y comprenant rien -vu que ça ne veut réellement rien dire!- s'exclameront : "Mon Dieu que c'est profond!" C'est même un des rares cas où on rencontre des humains se sentant intelligents plus que les autres parce qu'ils n'y comprennent rien. J'ajouterai qu' en art textile, quand c'est venu nous envahir on a atteint des sommets dans l'abscons prétentieux . Et qui plus est péremptoire. Voir notamment L'art textile : les mots confisqués.
4-Attendre la dernière minute pour répondre aux appels de candidatures ou envoyer vos demandes de stand.
Là rien à dire . Juste qu'en général ces demandes de stand sont payantes et qu'on dit aussi qu'un vrai artiste ne paie jamais des murs où quoi que ce soit pour exposer. Et même un amateur comme moi : quand j'ai exposé en galerie d'art, c'était gratuit. et pas d'appel de vendeurs de prestations mais ... l'heureux hasard des rencontres et affinités. Appel oui mais pas "commercial" Ce que je faisais plaisait on me l'a demandé. Tant pis si ça paraît "prétentieux" de le dire , c'est la vérité des faits.
5-Ne pas répondre aux appels téléphoniques ou aux messages.
Lesquels ? Les commerciaux ? Parce qu'un vrai galeriste ne va pas venir chez vous vous prier à genoux de bien vouloir condescendre à exposer chez lui ... après avoir vu une de vos oeuvres sur un réseau social. Ne rêvez pas: ce n'est pas leur façon de faire , et nous sommes des millions en lice . (pour moi la lice se borne aux fils du tissage, je ne m'inscris dans aucune course à l'échalote ou au yoyo en bois du Japon..).
6-Ne pas s’occuper des visiteurs lors d’expositions ou de salons – rester à l’écart et distant !
Là je suis d'accord. Et l'échange avec le public, répondre à ses questions est un moment émouvant, même pour l'amateur indécrottable que je reste farouchement ! Justement quand on n'est pas mû par le désir de se vendre on peut parler de ce qu'on fait si librement, sans peur de déplaire à un client éventuel . On doit, même amateur, avoir le respect de son public et le premier respect c'est d'être sincère, et authentique dans ce qu'on crée, pas de servir de l'esbrouffe et de la frime pour impressionner le chaland! Honnête aussi sur ses sources et filiations, le cas échéant.
4- Ne pas mettre à jour votre blog ou site et avoir les dernières infos qui datent d’un an ou plus !
Là d'accord aussi ; cependant vous comprenez nous sommes dans une conception de l'art où on veut des perdreaux de l'année , les oeuvres ayant comme les yaourts une date. de péremption, puisqu'elles suivent les modes tendances et goût du jour (consolez-vous si vous vivez assez lontemps, vous pourrez les vendre comme vieilleries vaguement patrimoniales d'ici 40 à 50 ans ) . De plus vous vous devez de tout le temps créer et si possible du nouveau -même si ce nouveau est une exploitation de votre "ancien" ad libitum comme ad nauseam si vous tenez un filon bon sang exploitez-le jusque ce que ça ne soit plus le bon(vérifiez de temps à autre si vous êtes toujours dans le 'ce qui se fait" c'est importantissime ! ) L'art conçu comme un produit ordinaire. C'est ça qu'il faut faire... Produit donc, pas créé.Est-ce encore de l'art, à ce compte ? c'est une question qu'il vaut mieux ne pas (se) poser.
6-Sous estimez (sic) le prix de ses œuvres.
7-Surévaluer le prix de ses œuvres.
Je commenterai ces deux dernières tout ensemble. pour les arts cotés et notamment la peinture , il existe des barêmes; mais s'évaluer justement demeure mission impossible sauf pour les cotés officiellement . Pour le reste ,le vulgum pecus qui ne l'est pas, coté, moi qui suis aussi - quand je le peux - acheteuse d'oeuvres- je vois bien que le prix c'est un peu au hasard Balthazar . Et j'achète selon mon budget et mes coups de coeur .Je me fous de la notoriété, la mienne comme celle des autres. Je l'ai dit mille fois : c'est une affaire d'amour pas de spéculation. On devrait TOUJOURS acheter une oeuvre parce qu'on l'aime la choisir comme on choisit un ami. C'est ce que je fais. Il est vrai je ne choisis pas non plus parce que ça va bien avec la couleur des murs de telle ou telle pièce de ma maison ..Tant d'artistes m'ont raconté le coup du "tu peux pas me faire le même en bleu ? parce qu'en vert, chez moi ça jurerait ..) .La coutume veut que le temps de l'artiste ne compte pas (ce préjugé nobiliaire qui fait que l'artiste ne doit à aucun moment se donner l'allure d'un banal artisan pfft !!mais en même temps se comporter comme un commercial de ses productions , consumérisme oblige., débrouillez-vous avec ça. . Je passe sur l'impossibilité qui existe à évaluer des arts pas jugés Beaux-arts ... qui comme le mien ont le cul entre deux chaises . On créée des oeuvres uniques, jaillies d'une imagination, par les moyens d'un medium et de diverses techniques, mais le medium déjà les déclasse. . et les évaluer devient parfois kafkaïen comme expliqué ici . Lien vers pourquoi je reste amateur
8-Refuser de participer ou d’être volontaire lors de manifestations concernant l’art.
NB - Faut déjà qu'on y accepte votre art . Avec un des miens, c'est pas gagné ! Il ne figure dans quasi aucun appel à candidatures.
Lesquelles ? L'art conçu comme une participation au "social" quoi .? L'artiste englué dans son temps ou l'artiste intemporel ? Moi j'ai choisi . De plus j'ajouterai que la récupération des malheurs de notre époque, des "causes" au profit de son oeuvre pour se montrer militan , généreux, compatissant, bien inclus dans les "problématiques" de son temps etc. dans la mêlée -apparemment- pas narcissique trop, quoi, je veux bien. J'aime mieux quand ça va jusqu'à vendre ses oeuvres au profit des grandes causes qu'on dit illustrer ou défendre ...Bref si les actes et les professions de foi coïncident. si on est sincère, ça passe, mais passera aussi la mode de ce sujet sociétal-là et dans dix ans voire moins on se demandera parfois pourquoi, le lien sera imperceptible.... .On peut aussi centrer son oeuvre sur des sujets moins connotés contemporains socio-politiques et tous les marronniers qui fleurissent à cet égard (c'est aussi une merveilleuse source d'inspiration pour qui est à court d'idées personnelles ) et aider à côté là où besoin est d'une autre manière. On peut être un artiste "art pour art" et un humain engagé .. aider ailleurs.et autrement; et même discrètement . Et si je ne l'avais pas fait je ne sentirais pas le droit de le dire.NB : je ne refuse pas, en ce qui me concerne quand ..je me sens moi, concernée mais ma liberté d'abord. Du reste je sais pas créer sur injonction. La broderie de Philomèle qui illustre cet article notamment a été conçue pour illustrer un article de revue protestant contre les violences faites aux femmes. Mais je l'aurais faite un jour ou l'autre... ce mythe me tenant à coeur!
9-Eviter le monde du business et les évènements des réseaux artistiques.
Plongez-y à fond donc. Je vous observerai depuis le rivage; S'il vous reste ensuite assez de temps d'energie et de concentration pour, revenu de cette foire aux vanités, créer vraiment une vraie oeuvre (pas un produit !) vous me direz !! Il n'est pas sûr du tout que par ce moyen vous ayez plus que le quart d'heure de gloire dont parle Warhol, ce qui certain c'est que pris par le courant des inévitables mondanités et snobismes et' ce qui se vend et qui plaît, .vous risquez bien de passer à côté de votre oeuvre , la vraie, l'authentique celle qui vous correspond et émane de votre être profond pas des sirènes du monde du buisness qui, on le sait corrompt tout ce qu'il touche puisque c'est le profit , la rentabilité ses axes de vie; pas le diable ; certes, mais qu'on s'en serve pour vendre du papier toilette alors pas des oeuvres d'art. C'est mon avis net et là je ne fais pas dans la dentelle ! Pardon si je choque.
Cela posé oui il vous faut un réseau si vous voulez montrer et vendre , mais l'amical et celui par affinités dites électives et sélectives aussi parfois, s'il ne procure ni gloire, ni cote est, je peux en attester tellement plus enrichissant (y compris pour votre oeuvre . par les rencontres et partages desintéressés niveau fric mais intéressés et intéressants niveau démarche.. ).10-Ne pas continuer à se former sur les techniques artistiques et sur la commercialisation de son art.-
Les techniques OK, et celles du passé aussi Il est bon de suivre ce qu'il est convenu d'appeler "innovation" -et qui en sont rarement, du reste- mais quel rapport entre les techniques et la commercialisation ? L'art conçu comme du high tech ? Seul ce qui serait commercalisable vaudrait ? c'est là que je m'écrie comme Philaminte : "Mon Dieu que cet esprit est d'un étage bas !"Soyez plutôt comme Janus un oeil tourné vers le passé-on a créé dans votre art avant vous- et l'autre vers l'avenir en connaissance du présent mais pas forcément pour suivre. Ne suivez jamais les autres, mais vos instincts à vous, vos envies vos appels ! Sauf évidemment si ça coïncide ...Cela vous fera un joli prétexte !
11 -Négliger de mettre à jour son site web avec ses dernières créations.
Rien à dire voir réponse au 4
12-Trouver des excuses pour dire que son travail ne se vend pas et les mettre souvent en avant.
Là je ris dans les expos où je suis invitée, il arrive que je refuse de vendre . D'ailleurs ça vous rend désirable, si vous saviez ! Et j'ai vendu un tableau à ma première exposition à Paris en galerie d'art . Vous voyez je ne prêche pas "pour ma paroisse" tout à fait. et je parle ni en aigrie ni en amateur qui ne e serait jamais frottée au vrai monde de l'art. Mais je ne crée pas "pour vendre" .Je crée pour faire exister quelque chose sous cet aspect-là, et qui sans moi n'existerait pas, analogue certes à d'autres oeuvres, mais singulier par mes choix propres . . et c'est un droit absolu que je revendique. Je le paye et de la difficulté à montrer mes oeuvres, - du mépris de certaines "arrivées" , de l'indifférence, d'un certain nombre d'incompréhensions . qu'on a pour l'amateur quand on se dit "pro" etc pour la non contemporaine et la non conceptuelle que je suis aussi. . Je rappelle aussi que j'ai demandé qu'après moi tout ce que mes enfants ne voudraient pas garder soit vendu au bénéfice de personnes qui en ont plus besoin que moi . choix fait aussi ya lontemps étant donné qu'aucun lieu de conservation ne s'encombrera des chiffons d'une quasi inconue . . La seule raison qui me pousserait à me promouvoir pour donner valeur marchande à ce que je fais serait celle-là : avoir plus d'argent pour ceux qui manquent du nécessaire. . Naturellement, on n 'en croit rien quand je le dis, mais pourtant, c'est ainsi .
13-S’excuser pour son art – dire que vous n’êtes pas réellement un artiste.
Oui mais si vous dites que vous en êtes un ou une on vous dira "auto-déclaré" ou outrecuidant ; J'ai testé. Si vous être amateur, surtout suivez ce conseil : affectez une fausse modestie. Vous pouvez aussi expliquer que ce n'est pas un titre de noblesse ni une plus value et qu'il vaut mieux être bon artisan que mauvais artiste ! Vous pourrez aussi -et c 'est ce que j'ai fait- attendre que des personnes autorisées vous "adoubent" . Ces choses-là fonctionnent par cooptation interne!Vous ne ferez pas l'unanimité, mais ça garantira votre modestie officielle! Du moins le temps que les critères ayant présidé à votre adoubement sont en vigueur. C'est pas garanti à vie.
Soyons sérieux; c'est quoi un artiste ?
14-Qui a besoin de marketing ? Vous n’êtes pas commercial !
Non précisément, mais l'auteur de ces conseils, lui l'est. Le but est de vous persuader que vous avez besoin de lui pour vous vendre. et il a raison si vous voulez vous vendre hélas vous êtes dans la spirale du consumérisme. Peu ou prou !
15- Critiquer les personnes qui ne comprennent rien à votre travail.
Ne les critiquez pas;. Soupirez. Personne de toutes façons ne vous comprendra jamais, même vous-même ! Non sans blaguer le monsieur a raison là . Expliquez, montrez et acceptez d'entendre le contraire de ce que vous aimeriez qu'on vous dise. et même si on veut acheter un livre d'art textile brodé main en soie et tissus fragiles pour en faire un doudou pour un bébé -ça m'est arrivé- souriez, ne vous fâchez pas . ça part d'un bon sentiment (ceux dont l'enfer est parfois pavé mais c'est une autre histoire) . Du reste si vous créez surtout pour vendre, à quoi diable vous servirait d'être compris ? On ne peut pas tout avoir , non plus!
16-Avoir un atelier désorganisé et désordonné.
et Bacon alors ??Là je suis morte de rire. On peut être artiste et aimer le bordel organisé. Moi dans l'ordre je ne crée rien je me sens dans un cimetière ou une clinique. . Vient-on voir un atelier en bonne ménagère ? Ou en respect des modes de créer de l'artiste ? J'en sais de très grands (quoique pas universellement connus) dont l'atelier est un géant foutoir organique sinon organisé ! Rangez au millimètre si c'est votre nature , laissez du bordel si ce n'est pas . le cas. Vous êtres maître chez vous et vraiment on juge votre oeuvre à cela, je dirai jugez , vous, les critères de ce jugement inadaptés voire mesquins et étriqués !
17-Accepter l’échec – vous convaincre que votre art est un échec.
C'est quoi l'échec ?
Il y faudrait une dissertation et relire Beckett , aussi.
Un échec parce que vous ne vendez-pas ? ce fut le lot de tant de grands ..on sait bien quand même que l'échec commercial n'est que ce qu'il est : commercial. Le succès quantitatif n'est une preuve de rien, des oeuvres plébiscitées à un moment tombent dans l'oubli le plus total le lendemain .
Si l'échec en revanche veut dire : avoir le sentiment que ce que vous faites est médiocre, que vous n'arrivez jamais à ce que vous voulez ... le doute perpétuel a saisi les plus grands qui du reste n'étaient pas forcément des tiroirs-caisses (enfin , pas tous!!) . le sentiment qu'on peut toujours aller plus loin sinon faire "mieux" approcher de ce qu'on voudrait vraiment et qu'on n'atteint jamais -parce que c'est comme l'horizon ça recule au fur et à mesure ça peut être très stimulant aussi , acceptez et accueillez cet "échec-là".
La réussite d'une oeuvre par apport à votre visée, à vous, n'a rien à voir ni avec l'accueil qu'elle pourra avoir, ni avec le fait qu'elle se vende ou pas. Savoir ce qui vous conduit : avoir des compliments, voire des papiers de critiques , ête hypersollicité là où ça expose dru en ce moment , là où c'est prestigieux, ou encore approcher sinon atteindre votre "inaccessible étoile !" . Si vous étudiez par exemple l'art au XIX° siècle celui où les marchands d'art ont commencé à se manifester, vous verrez qu'il ya des carrières très réussies à l'époque d'artistes ayant pignon sur rue et qui aujourd'hui sont complètement oubliés dont on juge les oeuvres accessoires .. D'autres qui galéraient sont devenus célèbres après leur mort. On trouve tous les cas de figures possibles. Donc cette notion d'échec, il est important de réfléchir à ce qu'on entend par là et croyez-moi c'est une spécialiste de l'échec réussi qui vous parle et qui a eu le temps d'y réfléchir en 40 ans de pratique. Echec sociétalement et dans son siècle (et surtout dans a corporation!) mais épanouissement dans son oeuvre protéiforme. Et honnêtement je préfère mille fois cela à l'inverse. si on a les deux, tant mieux, j'applaudis bien volontiers. Mais pour moi ce n'était pas possible et je l'ai toujours su. Voyez si ça l'est pour vous.
18-Ignorer les délais.
Là d'accord, s vous avez pris un engagement tenez-le. Dans tous les métiers du reste et même dans la vie de tous les jours.19-Laisser tomber trop vite.
Je suppose qu'on veut dire "à tenter de se vendre et de se faire une place sur le marché" , on peut aussi voir les choses autrement ...
D'accord, il ne faut jamais renoncer mais ..à créer par découragement justement de pas "se vendre" ., de ne pas "plaire" à suffisamment de monde . A l'à quoi bonite, quoi . C'est inutile de le dire à qui crée par amour de son art, c'est une vocation si impérieuse ,une nécessité si profonde quu'il le fera; mais il faut s'entendre sur ce qu'on "laisse tomber". Pour ne pas laisser tomber l'essentiel, il faut mettre à l'écart tout ce qui pour vous, ne l'est pas.Ce que je vous dirai c'est que lorsque d'entrée on renonce à cela : se promouvoir, on a une liberté si précieuse et totale qu'elle vaut, si on se place hors optique commerciale, justement ,tous les prix, les ventes les évaluations et que de plus ça n'empêche pas d'être au moins un peu reconnu. Reconnu c'est à dire compris, senti, apprécié pas parce qu'on dit que ça vaudrait mais parce qu'on aime , tout simplement qu'on se sent en accord en harmonie avec votre oeuvre, et non d'être aimé pour votre renom, dans l'ignorance totale ou presque de votre travail de ses visées et démarches; songez que les très célèbres n'ont pas toujours cela qui pour moi compte tellement .que je ne l'échangeraisi au prix de nulle gloire ou gloriole fugitive. Quelqu'un qui est très riche ne saura jamais si c'est lui qu'on aime ou son argent, un artiste qui perce ignorera toujours ensuite pour peu que ça dure (ce qui n'est pas non plus certain) si on l'aime parce que ça fait bien d'en parler et de le connaître (de faire semblant de..) que d'approcher ses oeuvres pour elles-mêmes en oubliant tout le reste. Idée que j'ai bien du mal à partager, mais à laquelle je tiens même si elles est si contraire aux moeurs de notre temps, et très paradoxale .Et que même on croit que je triche quand je la dis. Mais moi je sais que je suis sincère. Pas naïve. Sincère.
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Modèles: une expérience de créatrice
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 28/09/2022
- Dans présentation
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Je voudrais évoquer ici une expérience en liaison avec l'article précédent Modèles.
Ma première phrase sera pour regretter que dans notre pays, réaliser des modèles pour des revues de loisirs créatifs soit se déconsidérer, trop souvent, au plan artistique.C'est vrai ça ne fait pas très intellectuel, ni prestigieux , ça ! Les vrais artistes textiles, souvent plasticiens de mixed media ne s'abaissent pas à cette sorte de transmission permettant la reproduction de leurs oeuvres A la rigueur ils organisent des stages, ou écrivent des livres. pour livrer quelques "recettes"censées rendre "créatif" . Quelque chose qui peut se "reproduire" n'est pas à leurs yeux digne du titre d'oeuvre d'art (c'est oublier les faussaires ! et tous ceux qui imitent pour s'entraîner ! ) mais chut ne mélangeons pas une fois de plus torchons et toiles de maître , l'ouvrage dit de dames et les Beaux-arts.
J'aime bien , on le sait, titiller les préjugés ordinaires et universellement admis, lorsqu'ils me semblent non justifiés.
Ce n'est pas le cas aux USA ou au Royaume-uni où il n'est pas rare dans les revues on voit passer le nom d'une artiste reconnue (et qui expose parfois en galerie ou musée ) .Il n'y a pas ce clivage, ou du moins pas autant. La remarquable revue de broderie britannique Stitch à laquelle je fus longtemps abonnée est un modèle du genre qui allie aussi tradition et modernité . Un autre esprit!
J'avais déjà donné à la revue Les Nouvelles du patchwork -dès 1992-une petite dizaine de modèles , mais là je fournissais juste les photos et les rédactrices se chargaient du travail explicatif et des schémas. Et ces modèles étaient fournis gratuitement, tout le monde étant bénévole. Et puis, on a mis huit ans pour publier mon quilt Patience dans l'azur et j'ai compris à mi-mot ("les temps changent" m'avait-on dit ) qu'on n'en voulait plus, là que j'étais has been, sans doute . La mode ne m'intéressant pas en art ni en littérature, j'ai suivi mon chemin .Fin 2007 quand la revue Creation patchwork m'a demandé des modèles , comme pigiste, j'ai un peu hésité .D'autres relations contactées aussi, ont refusé pas assez prestigieux pas assez remunéré. On a même parfois sous entendu qu'on recrutait vraiment n'importe qui. Sympa pour moi ! On n'évite pas ces rosseries un tantinet mesquines.
Et puis je me suis rappelée que j'avais appris à broder et à coudre des robes grâce à des magazines. puis le patchwork non pas en copiant les modèles des autres mais en y apprenant les techniques et en m'imprégnant aussi de ce à quoi j'avais alors accès.
J'estime que lorsqu'on brode, il vaut mieux savoir maîtriser les points de broderie et explorer tout ce qu'on peut exprimer avec eux. Mais pas forcément dans une optique de perfection normée , mais d'expression personnelle. Mais pour explorer un point il faut en connaître l'existence et savoir d'abord le faire ordinairement, si je puis dire, avant de tenter d'en faire autre chose, c'est même à mes yeux ce qui fait la différence entre un(e) artiste qui sait son art et en joue , et un(e) autre qui fait du salopé ou du maladroit parce qu'elle ne sait pas faire autrement.(il est vrai si ça colle à ce qu'il ou elle veut dire, rien à reprocher, je ne fronce les sourcils que lorsque cela semble donner une plus-value ) , De même quand j'écris, j'aime disposer et d'un vocabulaire précis et riche (même si je n'en use pas toujours!) et maîtriser suffisamment les subtilités syntaxiques de notre langue . Pour écrire si j'ai beaucoup appris de l'imprégnation par la lecture et l'analyse d'oeuvres littéraires, une connaissance pointue de l'étymologie , de la phonétique du français, de la grammaire et de la conjugaison ne m'ont pas semblé inutiles. Qui peut le plus peut le moins, mais pas souvent l'inverse . Même s'il faut parfois savoir oublier ce qu'on sait , pour ne pas avoir l'esprit trop encombré. Or les points de broderie,c'est dans les revues et quelques manuels édités par lesdites revues que je les ai appris au fil de ma vie . C'était une transmission hélas féminine et populaire. Hors champ de la culture pour intelligentsias qui plus est . Sauf quand un grand nom de la littérature, je songe à Régine Desforges, vient mettre le phare sur le point compté. Si c'est Madame Lambda evidemment, le regard ne sera pas le même.
Alors je me suis dit que je pouvais tenter l'aventure. Mes grands enfants étaient étudiants, ça me faisait aussi un peu de sous pour leurs études. surtout comme je venais de prendre ma retraite ça me rendait un rôle "actif" dans la société, même si on peut trouver ce rôle ridicule et dérisoire. J'avoue que lorsque pénétrant chez mon marchand de journaux, je voyais une de mes créations sur la couverture (et parfois plusieurs) , j'ai éprouvé comme une naïve fierté .
En patchwork géométrique, je n'ai pas vraiment créée de modèles exprès pour la revue ,je proposais ce qui était déjà fait vu le temps qu'il me faut j'ai donné le mode d'emploi pour avoir un objet ressemblant. Pas semblable, c'est impossible. Le but n'était donc pas dans mon esprit d'inciter à une copie sans interprétation personnelle. Ainsi les rares fois où j'ai pu voir ce que d'autres en avaient fait, j'étais heureuse de voir que c'était des adaptations, des interprétations.
Ces quilts avaient été créés le plus souvent non pas pour la revue, mais comme toute oeuvre d'art unique pour exprimer ce que je voulais dire avec ces tissus -là dans cette surface-là. En les publiant comme "Modèles" je leur aurais enlevé, semble-t-il, leur statut d'oeuvre unique, non reproductible etc. En donnant un tutoriel, je les dévaluais , selon l'opinion admise.. Je demeure persuadée que toute oeuvre peut en décomposant chaque étape être l'objet d'un tutoriel (plus ou moins complexe) . Vrai aussi que lorque je créais ces surfaces, il entrait dans ma composition beaucoup d'instinct et d'improvisation, mais après coup on peut toujours tout decomposer pour expliquer au moins dans les grandes lignes. Le détail appartient à la "patte" de l'artiste ! Et si on songe qu'en cet art c'est le détail qui donne sa vibration, son sens, sa tonalité, son expresion à l'ensemble, mon oeuvre resterait donc "unique".Ainsi ce jardin de l'abeille -un des modèles les plus complexes à expliquer où chaque hexagone ou presque est différent des autres et signifie, pour moi quelque chose par sa couleur et ses motifs.
Le jardin de l'abeille
Donner la possibilité de reproduire n'était donc pas vraiment permettre de copier ou de démarquer de trop près .
Le vrai travail, celui qui était rémunéré en droit d'auteur (et non d'artiste!), était un travail de pigiste technique .Ce sont même les droits d'auteur "écrivant" les plus élevés que j'ai jamais perçus (la littérature ne nourrit que rarement son homme, et on en est presque à payer pour être édité!) . J'ajouterai perfidement et très immodestement que si tout le monde peut écrire et considérer que c'est original et génial - puisque de soi -moi y compris ! -, rédiger de telles piges exigeait un certain nombre de compétences spécifiques. nonobstant celles d'être capable de créer les oeuvres originales (qui ne sont pas le modèle, à elles seules!)
Il fallait d'abord évaluer le matériel nécessaire, ce qui n'est pas simple quand on use de 2000 tissus différents ou qu'on mélange les fils ... récupérés un peu partout. Ensuite il y fallait des explications, claires, si possibles -c'est là où trente ans d'enseignement ne sont pas tout à fait inutiles- et surtout des schémas conçus à l'ordinateur, et la maîtrise du logiciel quilt- pro, inégalable pour montrer comment monter les morceaux s'est révélée indispensable. Ce qui donnait des pages comme ça dans la revue (après travail de la maquettistepour la mise en page) . Je ne les regarde jamais sans une obscure et vaniteuse satisfaction . (je ris!) :
S'ajoutaient les photos dites d'ambiance. Celles-ci étaient parfois réalisées par moi parfois par la directrice de la revue ce qui exigeait des envois risqués. J'y ai perdu ainsi un couvre-livre . Sans proposition d'indemnisation , bien sûr. Et les frais d'envoi à l'aller étaient aussi à ma charge. Et même si je garde de cette expérience (qui dura jusqu'en 2012) un excellent souvenir, il y eut forcément les hiatus et les bémols , comme dans tout parcours humain ! Par exemple les titres changés , sans doute pour être plus "accrocheurs", ou bien les photos déformées sur une couverture où mon quilt Noctambule est passé au miroir déformant .. Les problèmes de résolution (nombre de pixels par centimètre ou de points par pouce. ) La difficulté d'obtenir la mention "création"et non réalisation" sur ce qui pourtant en était quand on l'attribuant d'office à d'autres , sans doute mieux cotées que moi , même quand je partais d'un dessin original . Mais j'étais toutefois plus chanceuse que les créatrices des années 60 -70 dont le nom n'était même pas cité. Il y avait eu un progrès. Plutôt que "réalisation" j'aurais aimé parfois le terme interprétation surtout en broderie où l'essentiel n'est pas, mille fois non, dans le dessin. Je tiens aussi à la rigueur des mots, et de leur sens. Ce qui me rend très chiante, je le sais.
Les crazys quilts que j'ai créés à cette époque l'ont été à la demande souvent en accord avec un thème : Noël pour cette étoile des neiges :
ou le thème Les cérémonies pour Célébration, quilt conçu comme cadeau de mariage.
Pour les crazys quilts, je n'ai jamais donné de patron de détail , juste le plan d'enemble, car pour moi l'esprit crazy d'origine, tient aussi à la forme irrégulière de morceaux à sauver et à ennoblir par la broderie dans leur forme pour en perdre le moins possible. Et trop tenir la main (ou le pied?) dans ces "pas à pas" c'est bloquer toute initiative personnelle.
Un peu plus tard la revue Broderie d'art s'est créée et j'ai été aussi du voyage !
Travail un peu différent, pas de schéma de montage, sauf en la partie couture, mais des photos décomposant chaque étape d'un point :
et évidemment l'explication de la répartition des points et des fils par zone ou détail. C'était très long pour les créations complexes. Il fallait donner pour chaque détail une photo vierge d'indications et la photo "fléchéé" plus la légende correspondante (trois documents donc pour un détail !) ,On imagine quand il y avait ue bonne vingtaine de photos (parfois plus) la maquettiste se chargeant de remodeler cela de manière plus esthétique.
Les modèles de broderie, eux , ont tous été créés -sauf un- selon un cahiér de charges , lequel indiquait souvent une technique , et un objet dans lequel la broderie devait s'inclure. la France a la passion de l'objet d'art décoratif , tandis que dans les revues du Royaume-Uni on voit beaucoup plus de broderies encadrées. il m'est arrivé de refuser de créer des maniques en broderie fine . Car si c'est pour servir vraiment de manique on n'use pas d' un ouvrage unique et fragile qui va être abîmé aux premières utlisations, et si c'est pour le décor fût-ce celui d'une cuisine autant alors encadrer l'objet et le protéger.
L'objet était imposé , la technique ou le style parfois (précieux, rustique ) mais j'étais libre du reste -ce qui est pour moi l'essentiel; J'ai usé parfois de dessins existant dans les vieilles planches d'ouvrages (toujours en le signalant) mais le travail de brodeuse était ma création : point couleurs, matières. (et ce n'est pas rien !) .
Coussin rustique, desin emprunté , mais choix personnel de tout le reste.
J'ai aussi usé de dessins personnels :
Ou de photographies personnelles ou données par ma famille :
Jardin à Madère sur une photo de Michèle Lefebvre
J'ai ainsi fait un cetain nombre de sacs et de coussins ,écharpes, châles, quelques tableaux aussi , des pochettes... En simplifiant ce qui relevait de la couture, je ne suis pas une bonne finisseuse d'objets complexes ! Cette expérience m'a appris à broder plus vite, à adapter mes points et leur régulaité à la visée de ce que je voulais obtenir. Quand les commandes arrivaient, j'acceptais ou je refusais, et je m'établissais un planning , il fallait tout envoyer à la date fixée (ah ! l'enfer des x fichiers à télécharger ) . la pensée me vient souvent que de tout ce que j'ai créé il ne restera pour un public large que ces créations dans quelques revues . Beaucoup vivant dans l'instant, trouvent que c'est vaniteux de vouloir une conservation des oeuvres textiles de la sorte, autre et digne du temps et de l'imagination qu'on y déploie .Mon avis est inverse . C'est un art aussi qui est à revaloriser, dans toutes ses facettes, pas juste celles qui ressemblent aux Beaux arts ou qui sont exercés par des plasticiennes. Pas que mes chers chiffons personnels . J'ai même rêvé d'une étude autour de tous ces créateurs et créatrices de l'ombre, d'abord anonymes, et aujourd'hui méconnus encore et ce n'est guère aisé justement . Si j'étais historienne de l'art, je crois que je me pencherais sur cet aspect-là .
Et puis un jour, on ne m'a plus passé de commandes et j'ai compris que mon "emploi" n'existait plus .J'ai constaté ultérieurement que la même pige (c'était prévu au contrat) était repassée dans d'autres numéros, voire des livres de "synthèse" sur un thème . C'est ainsi et c'était aussi bien !
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40 ans d'art textile : L'oeuvre cachée, la part de rêves.
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 16/06/2022
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Il y a quarante ans quand j'ai commencé mon premier patchwork-qui n'était pas un quilt - je n'avais pas idée de la place que cette activité prendrait dans ma vie. comme beaucoup je l'ai pratiquée tout au début, comme un simple loisir et avec un but utilitaire. J'espérais pouvoir adopter mon premier enfant (ce qui fut fait en 1983 ) et la rencontre avec le coussin et ce fameux : "je veux assembler des tissus" si impérieux laissaient pourtant présager que ce deviendrait pour moi, très vite,tout autre chose. Pas de l'occupe doigts donc , mais un appel impérieux vers une activité qui me semblait passionnante et apte à "dire" ce que j'avais à exprimer avec cela. Un medium, des couleurs des motifs , des formes. Il est à noter que ces premières couvertures faites sans aucun modèle étaient donc stricto sensu des créations . De l'art sans doute pas encore il est un début à tout. Et très vite, j'ai senti que ce n'était plus seulement faire de jolies couvertures dans mes moments de loisir, mais quelque chose d'aussi important pour moi que l'écriture. Et même pendant une période de multiples occupations et préoccupations professionnelles et familiales, cet art, où la géométrie m'a d'emblée attirée dès que j'en ai eu connaissance , me permettait de créer par fragments (ce que du reste j'ai toujours fait aussi pour mes récits longs . écrivant sur des post it les phrases, pensées, idées qui me venaient à l'esprit .)
Dans ma vie d'être humain, née de sexe féminin , je ne me suis pas une fois sentie inférieure au seul fait d'être une femme, Je me sens inférieure en compétence, parfois- souvent ! quand je le suis, dans un domaine précis, mais en tant que femme , jamais.Ni supérieure ni destinée à tel art plutôt que tel autre . J'entends par là que j'ai choisi librement , même si j'ai le sentiment d'avoir plutôt été choisie (je crois à la vocation, à l'appel vers une activité) . Les images numériques ou la poésie ne sont pas non plus des arts connotés "féminins". Je n'ai jamais considéré non plus que l'acte de création quand il est surtout exercé majoritairement dans un domaine par des femmes était , donc, inférieur de ce fait . . D'exercer un art classé d'office féminin mais où le moindre artiste homme est forcément distingué(et avec l'aval d'une majorité féminine!) , ne m'a pas dès l'abord préoccupée. Pour moi c'était un moyen d'expression personnelle qui m'appelait , et j'y entrevoyais d'infinies possibilités . Je n'ai donc pas eu envie d'en faire quelque chose où je devrais "faire comme les hommes" pour avoir l'illusion d'exercer un vrai art . Et comme je ne savais pas grand chose de la hierarchie entre les arts avec les Beaux-arts au sommet, je l'ai abordé , d'entrée ou presque comme si c'était un art classé Beaux-arts mais sans le faire ressembler à ce que pour moi, il n'est pas. et je n'ai pas eu conscience tout e suite du préjugé dont il était victime .
Je n'ai donc pas percu le patchwork comme une sorte de sous-genre dont le nom, qui plus est, fait toujours ricaner, L'exercer ainsi ne me serait même pas venu à l'idée j'étais déjà très attirée par l'abstraction en peinture (j'étais aussi bien avant ma découverte des quilts , fascinée par l'op art ) mais je sentais dans les abstractions géométriques du patchwork quelque chose de tout différent qui me convenait, qui correspondait à quelque chpse de fort en moi . L'amour des tissus , particulièrement des imprimés, créés par d'autres humains et leur mise en relation , donc. Je suis partie directement des tissus et de ce que j'apprenais d'un art en ce qu'il me semblait justement différent des autres. Si j'avais voulu peindre sur les étoffes, Je serais devenue peintre,, pas assembleuse d'étoffes. Mais des tissus découpés et rassemblés qui donc mettaient en oeuvre une composition des formes et des couleurs. comme la peinture ? Non pas tout à fait . L'art n'est pas le même du tout, du moins, comme j'aime à l'exercer.
Mes carnets de travail ne ressemblent pas donc à ce qu'on voit dans les livres sites et revues "branchées"de magnifiques carnets d'esquisses aquarellées qui débouchent sur des oeuvres txtiles . J'ai toujours souri devant les conseils de découper du papier ou partir d'une photo qui serait plus "artistique" que de partir des tissus. J'ai aussi dessiné mes plans de quilts à la main , mais j'ai dit combien l'usage et la maîtrise (pas si facile à acquérir) des logiciels de patchwork m'avait libérée Cf l'article composer ou dessiner .
On peut y ajouter les cahiers d'élaboration dits "de la femme aiguille" qui eux sont élaborés après coup, quand l'ouvrage est terminé Mais eux concernent l'oeuvre achevée pas cette oeuvre secrète., intérieure, sous jacente ou en cours..... d'inachèvement !
Je travaille sur énormément d'ouvrages à la fois et souvent le même ouvrage m'occupe un temps très long avec des reprises et des abandons lesquels peuvent durer des années. Et pour ne pas m'y perdre je tiens des sortes de journaux où je note aussi les idées qui me viennent des réflexions sur l'art textile , des démarches , des recensions de livres .... mes humeurs et mes états d'âme aussi mes espoirs et mes crises d'à quoibonite !
Au début des années 2000 , j'ai commencé ce que j'appelais des "carnets de rêves" :
Je décalquais et/Ou redessinais nombre de moifs, l'idée était de m'en servir pour refaire ensuite quelque chose de textile que ce soit une broderie ou un patchwork ou un mélange des deux . .Les calques numérotés et amovibles sont ainsi rangés après utilisation éventuelle ) .Certains ont servi aussi pour des séries d'images numériques.
J'ai développé ensuite ces inspirations dans plusieurs autres recueils tissus collés motifs retracés suggestion d'interprétation et je continue sur ces grands cahiers en papier kraft où j'ai collé des fragments d'étoffes et des suggestions -qui à présent sont moins pour moi que pour une éventuelle descendance" qui aimerait à en user après moi . Et si ce travail reste oublié et inconnu (probable que celui qui est achevé aussi !) il nourrit tout de même mon inspiration présente: ce que je nomme mes "envidées."
Lesquelles peuvent jaillir de tout autre chose et le plus souvent en revenant au fondamental numero 1 : l'envie de mettre ensemble tels tissus dans une surface .Les mêmes cahiers craft servent à réunir les dessins dcoupés ans les cahiers " journaux" où je les ai récemment regroupés , j'y adjoins ce que je retrouve ça et là sur des bouts de papier , et j'y griffonne parfois pour le plaisir des motifs trouvés un peu partout. mais la plupart sont des gribouillages personnels . Parfois un dessin émerge et aboutit à une création , la plupart n'ont pas été réalisés, mais j'ai besoin de ce vivier-là où parfois je me promène.
Cet attrait puissant pour tous les modes d'assemblages et aussi pour les motifs à la fois sur les étoffes mais aussi comme possibiltés d'interprétation en broderie, couplé à la recherche d'une variété toujours plus grande de textiles divers faisait que j'étais prise d'innombrables envies , et d'idées qui me traversaient . Influencées, certes aussi par la lecture des livres et les oeuvres des autres (j'ai aussi des carnets où je stocke des photos d'ouvrages qui m'ont attirée ), il ne s'agit pas là de les reproduire mais souvent tout cela s'infuse se mêle donne envie d'essayer ... Mon imagination se nourrit aussi de l'admiration que j'ai pour ce que créent d'autres artistes. et si j'emprunte quelque chose de particulier , je le signale. Mais je ne me sens pas tenue à signaler le moindre usage d'une forme simple ....
J'avais aussi cette particularité de mettre énormément de surfaces ou ouvrages en route , je devais (et dois encore davanatage aujourd'hui où le temps m'est furcément plus compté qu'à 32 ans) me freiner. J'ai bien essayé le système raisonnable qui consiste à ne mettre en route que deux ou trois ouvrages au plus, ou même un seul qu'on termine avant d'en entamer un autre. ça ne fonctionnait pas : j'étais à l'arrêt total.. Je mets douc en route à peu près tout ce qui me tente . Mais quand on est beaucoup tentée et rraversée de dix idées à la journée, ça finit par faire forcément un stock de "débuts" considérable. il fut un temps où j'en concevais comme un remords, une sorte de culpabilité (tout ça gâchait du tissu parfois de belles matières et ne servirait à rien, ni personne) . J'ai imaginé la série "les rogatons" et quelques livres comme "en vert et avec tout) pour tenter d'éponger le stock fou de sachets d'inachevés ou de restes de quilts finis (les blocs en surplus) .. périodiquement je retrie, parfois je défais, je note des suggestions de réutlisation , Il arrive aussi que j'en associe deux ou trois .. du patchwork d'ouvrages en quelque sorte. Composition en abyme.. Je me dis que somme toute ces inachèvements constituent une oeuvre parallèle certes plus encombrante que les carnets , mais qui sert de point de départ elle aussi à autre chose. Et ce qui ne sera pas utilisé de mon vivant, j'aimerais en faire don à quelque association qui saura en faire des objets à vendre. Pour l'heure ils dorment là en attente .J'en réveille un de temps à autre.
et que si tout ça fnit dans une déchetterie le monde n'en sera ni meilleur, ni pire même si cette pensée m serre forcément le coeur. . Chanceuse serai-je si un peu de ce qui est terminé échappe au retour aux chiffons . Reste la solution d'en faire des projets vagument "conceptuels" où j'expliquerai que l'inachevé c'est une manière innovante de finir ou autre subtilité de discours adéquate à justifier tout et n'importe quoi . La capacité ne m'en manque pas, la conviction, si . Si je m'y résous un jour ce sera par jeu, avec un brin de provocation et d'humour. Qui sait ?
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Jeux d'étoffes : impressions expressions Traditionnel ou géométrie ?
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 20/03/2022
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Avat propos
J'ai décidé , pour fêter ce quarantième anniversaire en assemblage d'étoffes, de publier les introductions aux grandes parties de mon livre paru en 2010 Jeux d'étoffes, impressions, expressions .
La préface de Jean Paul Gavard Perret est déjà lisible ici .
Il est évident que ce livre est bien plus "riche" que ces extraits (200 pages en couleur ) mais je ne peux pas le republier en version "augmentée" sauf si un éditeur l'acceptait tel quel en se chargeant de la maquette (on peut rêver !) -
Ces introductions étaient suivies de présentation d'ouvrages où j'expliquais mes "stratégies" et démarches . Je suis une coloriste et une assortisseuse ,Pour moi l'association des étoffes surtout imprimées est LANGAGE , e je pense aussi à certains , qui ont su voir émerger autre chose que de jolis petits quilts pas trop mal faits ...
La géométrie fait toujours partie de mes points de départ ... mais pas exclusivement et ce livre evidemment le montre. et si mes sources sont citées, une source n'est pas un "modèle" qu'on décalque, un motif en noir et blanc qu'on utilise et avec lequel on compose suffit hélas pour qu'on sout taguée "traditionnelle" et donc son corollaire "sans imagnation" , les vraies artistes textiles c'est .. tout le reste.
Pour la différence entre patchwork et quilt un patchwork textile est un assemblage de tissus -qui n'est pas forcément matelassé, le matelassage se fait un quilt (qui n'est pas forcément assemblé) . Mais l'usage confond assez souvent les deux et il ya un diktat du matelassage "obligatoire" pour tout ce qui est inspiré de la géoméotrie , auquel je ne souscris nullement .J'y reviendrai.On peut établir sans trop se tromper que tout motif existant est forcément géométrique puisque possible à tracer à l’aide d’une équation mathématique plus ou moins complexe.
Mais quand on parle géométrie en matière de patchwork ce n’est pas ce qu’on entend. On y regroupe toutes les surfaces élaborées :
-à partir d’une ou plusieurs figures simples aisément reconnaissables : carré, triangle, rectangle,losange, trapèze, polygones divers, cercle…
- à partir des recueils de carrés –le plus souvent- dans lesquels s’inscrivent des lignes géométriques, appelés « blocs » et généralement attribués à la culture américaine. Il est bien évident que pour beaucoup ces motifs existaient ailleurs, et ce, depuis la nuit des temps parfois, et que ces anthologies ne sont pas exhaustives : on peut toujours tracer tout ce qu’on veut même à l’aide de simples lignes droites à l’intérieur d’un carré(ou d’une autre forme) prédéfini(e). Mais les américaines qui ont utilisé ces géométries les ont développées, nommées, codifiées, classées et associées à leur vie et leur histoire, aussi quand j’utilise un de ces carrés ou bloc, c’est à cette culture que je me réfère, comme on le fait d’ordinaire.
Quand j’ai assemblé mes premiers morceaux d’étoffes cependant, j’ignorais absolument tout de ce qu’on appelle le patchwork américain traditionnel. J’ai pourtant, naturellement, utilisé des formes géométriques tout simplement pour leur facilité d’assemblage. Je n’ai d’ailleurs découvert la tradition « américaine » que six ans plus tard, et je voudrais dire que si j’ai adopté assez vite, mais pas exclusivement, la structure en blocs, c’est pour deux raisons. La première était pratique : à l’époque, mes enfants étaient petits et je trouvais plus facile de travailler une surface par fragments, étant très souvent interrompue dans mon travail, la deuxième étant esthétique. Comme j’aime utiliser énormément de morceaux différents par leurs couleurs et leurs imprimés dans une surface, beaucoup plus que la majorité des quilteuses, j’ai saisi assez vite que la rigueur de la géométrie d’une part, la régularité de la répétition d’autre part donneraient à mes quilts cette structure forte qui me permettrait toutes les « fantaisies » dans mes choix d’étoffes et de couleurs.
Faisons un sort à la monotonie et au manque d’imagination qui seraient les corollaires de ces « géométries ». Je dirai simplement que ce n’est qu’un moyen d’expression comme un autre que je pousse d’ailleurs parfois jusqu’à la redondance voulue; c’est aussi un élément de stabilité et de « pacification » de mes surfaces, une sorte de halte proposée au regard quand il y a des centaines de tissus différents à appréhender, à la fois unis et dissociés selon qu’on les percevra d’une façon ou d’une autre, en composition avec leurs voisins immédiats ou en relation avec d’autres éléments plus lointains.
C’est le « carcan » qui me procure la plus extrême liberté. Sinon la confusion la plus totale règnerait. Je ne l’évite d’ailleurs pas toujours.
Et lorsque j’ai testé d’autres moyens d’assembler les tissus, si je suis restée fidèle pour toute une part de mes ouvrages à cette géométrie, ce n’est pas par obédience à une quelconque tradition, mais parce que je n’ai toujours pas fini d’en exploiter les infinies possibilités d’expression. Je ne m’inscris absolument pas dans la tendance qui voudrait que les quilts fondés sur des blocs répertoriés soient des ouvrages artisanaux bons uniquement pour un usage utilitaire ou ramenés à leur valeur historique de « copie d’ancien » pour perpétuer un art, dans une optique de transmission d’une certaine perfection technique et un respect absolu de ce qui nous a précédés. C’est une noble-et difficile- entreprise que je salue, mais qui ne m’attire aucunement.
L’aide des logiciels spécialisés permet d’explorer les infinis de ces géométries, et il ne s’agit pas seulement de juxtaposer et de colorier, mais de composer à l’aide d’éléments et de manière parfois très complexe, des surfaces expressives et singulières. Ces dessins ne sont évidemment pas de l’art textile, avant d’être transcrits en tissus, mon regret est souvent que ces centaines de schémas que j’ai créés en plus de dix années de recherche ne donnent pas naissance, chacun, à un ou des quilts. Cependant c’est un vivier, pour moi-même et quelques autres qui n’hésitent pas à y puiser.
La géométrie n’est pas non plus à mes yeux un stade par lequel on commence, et auquel, si on veut être artiste, il faudrait obligatoirement renoncer .On n’y reviendrait que pour des objets pratiques ou comme il m’a été dit souvent « pour se délasser » après s’être confrontée aux affres de la « vraie » création, car on le perçoit presque toujours comme une « facilité ». Ce serait dire que pour être écrivain, il faut renoncer à la narration si on veut se mettre à écrire de la poésie ou l’inverse. Et que la poésie c’est plus « facile » que le roman, ou l’inverse. On voit bien que c’est absurde.
Pour moi la géométrie n’est pas uniquement de la tradition, pas plus en tout cas que les paysages ou les quilts figuratifs qui sont en ce moment en plein essor, même si elle repose forcément sur des poncifs et des schèmes rebattus, elle est un « genre » textile parmi les autres et je regrette profondément une évolution qui tend à la nier en tant que moyen d’expression vivant et continuant à se transformer. Ce n’est « figé » que dans l’esprit des personnes qui ne la pratiquant pas ou plus ignorent son devenir et ses possibilités.
J’admets que ses structures fortes et répétitives puissent ne pas parler à certaines sensibilités. D’autres au contraire s’y attachent comme étant la marque du « vrai » patchwork. Clivage si perceptible qu’à de rares exceptions près, la plupart des personnes qui regardent mes ouvrages « me » coupent en deux, les unes attirées par mes géométries où elles voient soit de la virtuosité technique, soit justement, ce respect raisonnable et rassurant d’une tradition, les autres par mes abstractions plus informelles et presque personne n’établit entre les deux de lien. Aussi un des buts de ce livre sera peut-être de recoudre les parties d’un ensemble qui me représente tout autant dans une tendance que dans une autre. Ou du moins le tenter.
Je n’ai jamais cousu de quilt vraiment « traditionnel » au sens où on achète des étoffes en vue d’une harmonie préétablie, et ou on coud trente fois les mêmes tissus-ou des tissus très ressemblants- aux mêmes endroits. Je n’ai jamais de ma vie cousu deux fois exactement le même bloc. Je ne veux pas ajouter l’unité à la répétition dans un but décoratif, comme pour un motif de papier peint, par exemple. Je trouve plus passionnant d’introduire, dans mes surfaces, autant de variété que possible, frôlant la confusion, parfois. Si j’y parviens, j’incite l’œil à regarder de manières diverses et surtout en s’appuyant sur des points de départ différents. Il n’y a dans beaucoup de mes surfaces ni début, ni fin, et où que vous les preniez vous pouvez toujours du regard reconstituer vos propres assemblages, et pas seulement par ce qu’on appelle les effets secondaires, c’est à dire ces dessins qui effaçant le carré de base en proposent une autre lecture et qui restent aussi un « poncif » de la tradition des quilts. Ces motifs-là le primaire –celui du bloc et le secondaire- restent « imposés ».
Ce que j’aime à obtenir, c’est que le spectateur construise ou reconstruise le quilt tout autant que moi. Et, cette « interactivité » la géométrie, m’aide à la mettre en œuvre, en raison, paradoxalement, de ses lignes nettes. L’œil qui les suit va un moment les perdre, en raison du jeu sur les couleurs et les étoffes, puis les retrouver et ainsi de suite, mais une autre fois, ce sera un autre parcours. Sans compter que le jeu sur les valeurs crée aussi des reliefs, et des effets de luminosité,
même si les étoffes sont toutes mates. Et, même si je regarde pour la centième fois le quilt qui me fait face sur le divan du salon, je ne vois jamais exactement la même chose. Pour moi, un quilt est réussi quand il possède ce pouvoir de fascination, de métamorphose infinie. Je ne dis pas que j’y parviens, mais que j’y tends.
Ainsi suis-je toujours frustrée d’un regard, malheureusement très fréquent, qui assimile mes surfaces (et pas seulement les miennes) à ce qu’on nomme avec quelque mépris dans notre corporation des « resucées » de traditionnel au mieux du traditionnel renouvelé ou relooké.
Ce que je bâtis, dans tous les cas c’est une surface textile, où je tente de capter quelque chose de mes émotions et de les transmettre. Pas de faire un quilt en rouge et bleu sur le bloc « la patte de l’ours ». Ou de renouveler le dit bloc en utilisant la gamme de tissus à la mode que viennent de sortir les créateurs en tissu spécialisé, des couleurs insolites, ou une disposition inhabituelle. Je sais bien que d’une certaine façon, on n’y voit aucune différence, surtout si on veut réduire toute œuvre à son genre. Je ne cherche à y mettre ni du nouveau, ni de l’ancien, je me sers des structures géométriques comme d’une base graphique.
L’essentiel pour moi est dans le choix et le nombre des tissus mis en œuvre comme un vocabulaire, pour exprimer quelque chose de particulier, il faudrait donc regarder aussi dans l’idéal chaque « tesselle » de tissu une par une et se demander : pourquoi ce tissu-là à cet endroit-là ? Car ce qui est important pour moi, c’est à la fois l’ensemble, saisi dans sa globalité (un quilt dit-on se regarde de loin), mais aussi le détail, en sa signifiance, et entre les deux les amalgames plus ou moins étendus de surfaces qu’on peut saisir. La mode actuelle est de travailler sur des « couches » de matériaux successifs qu’on superpose sur une étoffe, je cherche plutôt à obtenir des profondeurs en restant en surface, en établissant des niveaux de « visions » différents.
Il y a toujours plusieurs temps dans mon travail ; souvent c’est l’idée des couleurs qui prédomine, se réveiller en se disant « quelque chose en jaune et gris ». A ce stade il n’y a pas encore de forme, mais ça peut être aussi bien « où intégrer cet écossais » ou « ce tissu « vert à pois gris » . Ça peut être une vision plus ou moins nette d’un dessin ou tout au moins d’une structure ; la vision est toujours floue, à ce stade, c’est ensuite que de proche en proche elle s’organise. Floue au sens que je ne pourrais pas la dessiner, mais exacte au sens que je ressens au fond de moi ce qui, dans mon travail, va m’en éloigner ou m’en rapprocher, et c’est là qu’intervient ce que je nomme l’instinct ou si on préfère l’intuition. Une œuvre construite au hasard c’est quand on prend tous les tissus sans contrôle aucun, comme ils viennent c’est l’optique de ce qu’on appelle les « scrap quilts »ou quilts faits comme beaucoup des miens avec une multiplicité de chutes variées. D’autant que beaucoup de scraps quilts traditionnels sont construits sur un fond blanc ou écru justement pour que le dessin apparaisse nettement ce qui n’est pas toujours ce que je veux obtenir. Une œuvre qui s’élabore par instinct, c’est quand la main et l’œil guidés par le travail intérieur que j’ai évoqué, par cette vision à la fois nette et fluctuante de la surface à atteindre, vont déterminer le choix, repoussant ceci, pour élire cela, déconstruisant et reconstruisant, jusqu’à s’arrêter à ce qui paraît le plus proche de la vision initiale, laquelle, évidemment, si la réalisation s’étale dans le temps , se métamorphose. Il n’y a rien de figé, de prédéterminé dans ce cheminement, sauf peut-être ce que je nomme la stratégie de départ. Encore souffre-t-elle des dérogations.
Le dessin, le plan sont pourtant nécessaires, mais souvent ce n’est qu’une cartographie dont on peut s’éloigner. Il est très rare que des modifications n’interviennent pas, et le plan qu’il soit en noir et blanc ou en couleurs, n’est qu’un dessin sur du papier. L’essentiel du travail ne sera jamais là, mais dans un choix précis d’étoffes et de nuances, où chaque chose doit paraître à sa place et que, même s’il avait été possible d’intervertir les éléments, tout aussi esthétiquement et légitimement, le regard justifie les décisions prises. Il faut de plus, travaillant par fragments sans cesse anticiper dans son esprit l’aspect final. Beaucoup composent après coup en agençant les blocs sur un mur avec du recul. Je procède parfois ainsi, mais le plus souvent je construis des rangées et je couds l’une avec la suivante sous les yeux et ainsi de suite. Arrivée au bout, il peut se produire que j’intervertisse l’ordre premier, que je déplace tel ou tel élément, mais c’est plutôt rare, parce que précisément, le « dessin » principal est en moi, beaucoup plus que sur le papier. Il est en moi déjà, dans l’élaboration de chaque élément. J’ai coutume de dire que si chaque bloc s’équilibre au niveau des couleurs, des valeurs et dans le choix des étoffes, l’ensemble -sauf accident- sera aussi équilibré, harmonieux et signifiant.
Et surtout, le dessin géométrique n’est pas l’essentiel il n’est que l’élément structurant d’un ensemble complexe.
Il faut y ajouter les couleurs bien sûr, dont le choix totalement libre et dépourvu de tabous non pas par désir de provocation ou de pseudo-originalité, mais par liberté que je m’accorde. J’aime à représenter la même nuance par un maximum de tissus différents, ce qui n’est pas si simple qu’on peut le penser : les nuances doivent être assez proches pour que l’effet d’ensemble ne se perde pas totalement, mais suffisamment variées justement, pour permettre à l’œil d’autres lectures que celles d’un quilt où le rouge est toujours représenté par la même étoffe ou tout au plus par une presque identique. Il faut jouer sans cesse entre l’effet d’unité et l’effet de dispersion.
Au dessin de la cartographie première, vont s’ajouter le relief et la profondeur donnés par le choix des valeurs (clair-moyen-foncé), on pourra procurer l’illusion de la profondeur ou au contraire de l’avancée, on pourra aussi choisir de gommer le relief par un choix de valeurs proches avec toutefois des dérogations. Ceci ne m’est bien évidemment pas particulier et nombre de quilteuses jouent avec ces possibilités, mais chacune le fait à sa manière.
Et ce qu’il y a de plus particulier à notre art, c’est bien précisément le choix des tissus.
Les tissus unis, ou sans motif trop marqués, accentuent à la fois la géométrie et l’effet de relief.
C’est un choix respectable, surtout si on songe aux merveilles produites par les Amish, mais ce n’est pas le mien.
A ce stade on est encore très proche d’un dessin qu’on pourrait peindre et la part du tissu en ce qu’il a de particulier n’est pas primordiale; et pour moi, ce le tissu a de plus particulier en dehors de sa texture (que j’aborderai plus tard) et de sa couleur dominante, ce sont ses motifs.
Associés à la géométrie, au travail sur le dessin et sur le relief, ce sont eux qui en dernier ressort guident l’œil d’un fragment à un autre. Ainsi y aura-t-il toujours, des rappels de couleurs qui forment un « chemin » parfois interrompu, mais aussi des rappels de formes, aussi bien dans le carré basique qu’on appelle bloc que dans l’assemblage des blocs en zones, puis en rangées, puis en surface. Il y aura des zones plus ou moins saturées en couleurs, plus ou moins compactes, plus ou moins brouillées par les motifs. C’est une construction progressive, où rien n’est au départ figé et préétabli mais où rien non plus n’est l’heureux effet du hasard.
Ce travail dont on dit à tort qu’il est plus facile « parce que les erreurs se verraient moins » est presque toujours chez moi une lutte entre le « trop » et le « pas assez », c’est pourquoi, je m’impose au départ des règles. Je ne les détaillerai pas ici, car elles sont expliquées sous chaque ouvrage, mais on peut en donner un exemple « rien que du bleu » mais s’accorder le droit à toutes les nuances de bleu y compris celles qui tirent sur une autre couleur (et c’est là que le classement élaboré au chapitre précédent se trouve précieux) les bleus tels que moi, je les vois et que d’autres verront peut-être gris ou verts…et autour de ces bleus une géométrie stricte qui va permettre de savourer le jeu sur les étoffes .
J’ajoute à cette variété et à la rigueur des structures, un penchant pour la miniaturisation. Plus un morceau d’étoffe est petit moins j’ai envie de le jeter et tant qu’il est assez grand pour être assemblé avec des marges de coutures, il n’y a aucune raison pour moi que de pas tenter de le coudre ; cette miniaturisation, à l’égal de la géométrie m’autorise le choix d’un plus grand nombre d’étoffes et me permet de travailler mes fragments en les nuançant autant que je le juge nécessaire, mais en plus de cette notion esthétique, il y a l’idée d’une alchimie du « rien », ce que tout le monde jetterait, j’éprouve une joie indicible à lui donner droit de cité, plus un morceau est petit et négligeable, plus j’ai envie de lui trouver sa place. J’ai beaucoup plus de plaisir à ces minutieux assemblages qu’à découper le plus vite possible une dizaine d’étoffes assorties pour en faire une composition « classique », il est certain que construisant cette surface d’étoffes, je construis ou reconstruit quelque chose en moi et à l’extérieur de moi. Il faudrait lire aussi mes surfaces géométriques comme un tout-qui serait emblématique de ma vie- et non comme des ouvrages différents, une série de « jolis » petits quilts, comme on me dit si souvent. Une surface composée de surfaces.
Ps- on peut en voir quelques-unes sur la ligne suivante , mais se promener dans l'index les montrera mieux comme j'aime: faisant partie d'un tout . En égale importance pas en "occupe-doigts" . ou en stade "bon quand on débute ..."
Sur les géométries, on peut lire aussi des articles rédigés ultérieurement :
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Féminisme et écriture inclusive
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 02/12/2021
- 0 commentaire
Je voudrais aborder ici un sujet qui agite souvent les réseaux sociaux, où il n'est pas toujours facile de se faire comprendre.Et clarifier ma position.
Ce blog signale sur bien des pages l'injustice faite aux femmes dans leur reconnaissance artistique. Et pas seulement en art textile. Je rappelle cette citation de l'historien de l'art Roger Dunn dans le livre Stitching resistance , dont j'ai fait le compte rendu.
" "de tels arts utiles sont devenus connus comme "arts mineurs" "arts décoratifs" ou simplement "artisanat" avec le corollaire qu'ils valaient moins que la peinture, la sculpture ou l'architecture, les ouvrages en textiles sont rarement inclus dans une philosophie de l'esthétique ainsi que dans l'histoire et la critique d'art"
Les mots .sont aussi ma matière. je rappelle que j'ai fait des études de Lettres Classiques, certes je ne suis ni docteur, ni agrégée, mais j'ai choisi d'enseigner en collège à un niveau où la pensée se forme et où le langage -et sa maîtrise sont primordiaux. et je prétends connaître un peu ce que je nomme le système de langue. pas la linguistique absconse, non . La pragmatique, celle qui aide les élèves à s'exprimer clairement et sans trop d'erreurs. J'ai étudié le grec ancien, le latin, l'ancien français, leurs linguistiques. J'ai certes sans doute beaucoup oublié mais pas les fondements, pas ce qui structure. J'ai appris à user de l'étymologie pour goûter la saveur d'un mot.. par la racine. J'ai appris à mes élèves à le faire. Quand on écrit une phrase en sachant pourquoi on l'écrit ainsi, on est aux sources de sa langue maternelle (vous remarquerez qu'on ne dit pas langue paternelle si machiste que soit notre langue) J'ai écrit un livre poour aider à la maîtrise des difficultés du français en partant des erreurs non pour les fustiger mais pour comprendre pourquoi on se trompe, pourquoi on écrit ainsi . Car oui presque tout peut s'expliquer si l'enseignant possède lui-même des bases solides pour le faire. J'ai eu la chance d'étudier à une époque où c'était possible. J'ai complété par moi-même et je continue d'apprendre.
Je voudrais d'abord affirmer haut et fort qu'être contre le point médian et les pronoms personnels artificiellement inventés ce n'est pas être anti féministe, tout au contraire. Si on y réfléchit ce que les femmes ont gagné de droits depuis plus de 100 ans, n'en a pas été empêché par le machisme (parfois réel) de quelque langue que ce soit. Nous avons agi au niveau des droits et des lois, dans un état de langue qui serait redevenu machiste après l'avoir moins été (selon les thèses à la mode) . Et on se fait traiter de boomer (le mot ringard est ringard ) quand on refuse l'inclusive par des jeunes femmes qui tombent dans l'âgisme ce qui n'est guère mieux que le sexisme .
L'idée de modifier les mentalités par le langage est à proprement parler ubuesque; on pourra peut-être imposer un usage par matraquage intensif , mais on ne forcera personne à penser ce qu'il n'a pas envie de penser. Un macho forcé d'utiliser des points médians ou de les lire s'ils envahissent tout, consacrant un usage imposé, restera macho et peut-être encore plus par réaction Donc c'est défigurer la langue sans autre profit que le buzz autour de quelques excitées à qui j'ai envie de dire d'apprendre d'abord les régles de la morphologie et de la phonétique. Pour métamorphoser il faut connaître ce qu'on veut changer et ce n'est absolument pas le cas. On coupe les mots hors syllabes et hors radical, déjà , signe qu'oon ne sait pas comment un mot est formé (morphologie) . Or, c'est capital dans les apprentissages de base. Et la manière dont on lit, aussi.
Il serait plus oppportun de défendre les droits réels gagnés par nos anciennes et nous-mêmes, parce que, comme l'a souligné Simone de Beauvoir, il suffit d'une crise , d'un gouvernement (réellement) réactionnaire voire autoritaire ou totalitaire pour que ceux-ci soient en danger. et régressent c'est le principe même de la "réaction" . On le voit à l'oeuvre dans nombre d'autres pays. Et ce n'est pas en "déconstruisant" notre langue qu'on va améliorer cet état de choses. Ni en tirant les faits dans le sens de ce qu'on veut imposer, ce qui semble aussi une tendance de certains neo-historiens. Certes ce qu'ils disent est vrai, mais partiellement et surtout partialement .Et ce sont parfois les mêmes qui accusent l'histoire "officielle" de propagande. Qu'on balaie donc d'abord devant sa porte .
Ce qui m'amène au livre Madame Eliane Viennot beaucoup cité dans cette polémique, ouvrage qui démontrait qu'il y aurait eu une "masculinisation' de la langue au XVII° siècle , notamment , s'appuyant sur les noms de métiers au féminin qui auraient disparu et ce qui serait la preuve qu'à des époques antérieures on respectait mieux les femmes puisque ces noms de métier au féminin existaient (ce qui reste à établir plus complètement, parce que pour la condition de la paysanne analphabète j'en doute très fort !) .
Ce fameux masculin qui l'emporterait ensuite et qui donc aurait fait régresser sous la poussée de méchants académiciens et grammairiens . Je schématise mais c'est ce que la plupart en ont retenu. Il fallait donc partir en croisade pour venger ces pauvres femmes que la langue, en regression supposée, "invisibilise" sic ! Il existe sur internet beaucoup plus d'articles pour prendre ce livre comme catéchisme et vérité "indiscutable", le titre universitaire de l'auteur faisant autorité que d'articles examinant ce qui y est affirmé, en recoupant avec d'autres faits de langue et historiques et la linguistique comparée. .Et qui suis-je donc moi qui ai moins de diplômes pour oser contester cette nouvelle Bible féministe ?
S'il faut un titre universitaire pour être crédible qu'on lise alors cet article, qui reprend tout point par point, triant ce qui reste fondé de ce qui été "forcé" ou biaisé . Et ce qui l'a été n'est pas négligeable. .Lien vers l'article d'Hélène Merlin-Kajman sur le livre d'Eliane Viennot.
A lire absolument pour éviter le célèbre "biais cognitif".
J'ajouterai encore : acceptons que le le livre de Madame Viennot soit entièrement fondé et objectif , pas du tout militant ni orienté cela ne voudrait pas dire qu'il faille approuver le point médian et la création de pronoms personnels bricolés encore moins à tenter de l'enseigner ou de l'imposer dans certaines instances universitaires . Le savoir comme la langue n'a pas à être confisqué par un groupe militant . c'est une étude, et il en existe d'autres , contradictoires. Comme expliqué ici dans une interview par le regretté linguiste Alain Rey qu'on ne peut accuser de conservatisme et qui connaissait l'histoire de la langue frnçaise tout de même un peu ! Si mon savoir est contestable le sien ne l'est pas.
Lien, vers l'opinion d'Alain Rey sur la question
Je nuancerai son propos : ça dure depuis plus de six mois et ça gagne du terrain pour la raison simple que cette évolution fait son lit dans l'ignorance même des bases du français et de la manière dont il s'est formé. Et c'est un mouvement plus vaste et international . Ne pas se tromper la culture dite "woke" à laquelle ce courant s'apparente est une vraie machine de guerre qui utilise internet comme arme. On sait que l'usage repose sur le nombre, mais là il s'agit d'un nombre apparent qui vient non de la quantité réelle de personnes convaincues du bien fondé de ces changements., mais du nombre de publications abondant dans ce sens. L'idée c'est que les gens passant leurs vies sur les écrans c'est là qu'il faut imposer ces transformations catapultées d'un groupe vers l'ensemble et non venu de l'ensemble , sous l'effet d' un besoin collectif réel quant à la langue, d'un "manque". Ce n'est pas l'usage de l'ensemble des usagers mais d'un fraction militante et .. sur écran . Or une langue se PARLE aussi . Vouloir modifier un usage, juste à l'écrit et accepter que l'oral soit différent, donc, ne me semble pas logique et complique inutilement un "état de langue".
J'ajoute je n'ai rien contre la féminisation actuelle des noms de métier exercés par des femmes, si ce n'est que je n'ai pas constaté que cette féminisation influait en quoi que ce soit sur le regard social envers les femmes qui exercent ce métier, sauf àfaire remarquer ingénument qu'elles aussi le peuvent, ce qui devrait devenir une évidence. .Il y a des hommes "sage-femme" . Je ne sais s'ils ont revendiqué qu'on masculinise leur nom de métier .
Sur ce masculin et sur les genres et la langue maints articles ont paru et les conséquences plus que fâcheuses de l'écriture inclusive .Je ne cite que celui-ci qui signé par trente -deux linguistes . Il résume clairement ce que j'en pense. Je ne ferai pas mieux .
lien vers l'article du Journal MarianneEt on peut lire une contre argumentation-là (qui ne me convainc nullement) lien vers la contre argumentation
On s'est moqué de L'Académie Française qui parlait du danger pour le français ( évidemment avec l'âgisme habituel) , ses arguments sont pourtant plus pertinents que les quelquues-uns ci-dessus. On peut lire sa position ici
Le danger signalé par l''Académie n'est pas le seul et non il n'est pas exagéré. Quoi tout ce foin pour un point médian ? Pour un néologisme (sauf que jusqu'alors les néologismes concernent les mots lexicaux comme noms verbes et adjectifs) et non les mots grammaticaux comme les pronoms personnels. les accords de genre font partie de la syntaxe, non du lexique.
Admettez et ce n'est pas si surréaliste, en l'état de mentalité présent, que demain chaque groupe disposant d'une particularité qu'il juge "invisibilisée" (être femme en est une mais à être vieux ou handicapé ou de telle ou telle couleur de peau, religion, région, parti poltique en sont d'autres tout aussi importantes . Est important pour un individu donné ce qu'il vit comme important dans cette fameuse sensibilité qu'il faut sans cesse ménager (celle des animaux aussi à présent puisque des groupes de véganes extrémistes ont voulu interdire les insultes style "face de rat" si si je n'invente pas ! Vous comprenez les rats qui sont d'une utililité manifeste surtout comme vecteurs de maladies on ne sait pas si ces pauvres bêtes en souffraient dans leur ego bafoué !Et un porc auquel on ose comparer un homme un peu grivois sans doute en a sa sexualité de suidé bouleversée ?
Quelle époque vit-on donc où on peut accorder crédit à des revendications aussi ridicules que radicales alors que des enfants meurent encore partout et que la pollution détruit la Nature et que les vraies épidémies sévissent ?
On aurait alors des mots à rallonges avec une kyrielle de points médians ? de mots bricolés? De mots supprimés parce qu'ils offensent tel ou tel groupuscule en mal de visibilité sur le web ? Et dans la vie n'ont-ils pas de moyen de se rendre visibles, utiles, actifs ? Il ne manque pas de causes qui manquent soit de bras, soit de fonds . Y compris les centres d'accueil de femmes battues ...
Soyons sérieux certes le français a des variantes il n'est pas monolithe, on ne parle pas tout à fait à Marseille comme à Bordeaux ou à Lille ni à 70 ans comme à 18. Ni comme au XVI° siècle mais il existe moins de différences grammaticales et lexicales entre un texte littéraire du début du XIX° siècle et du milieu du XX° qu'entre ce que j'écris ici et ce qui s'écrit sur certains blogs ou sites rédigés par des personnes nées au début de ce millénaire. Ce n'est plus une évolution, c'est une autre langue Où est notre langue commune -et non figée - , celle dans laquelle notre littérature reste écrite ? Celle que les étrangers apprennent (encore, pour le moment )Et si elle a été fixée tard (argument qu'on avance pour tout changement artificiel) c'est je le rappelle pour qu'on n'ait pas besoin d'un interprète pour se comprendre, pour unifier les habitants d'un territoire reconnu comme commun d'où qu'ils viennent, quel que soit leur milieu social et.. leur âge, leurs opinions, leur sexe . La langue est un outil de pensée pour tous, pas un territoire à conquérir pour quelque"bonne cause" que ce soit.
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quand une brodeuse fait une mise au point
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 07/05/2021
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L'article publié hier a suscité surtout sur les réseaux sociaux quelques réactions , où je sens bien encore que cet art de broder même quand on l'admire , on ne le comprend pas comme je l'exerce (je et beaucoup d'autres qui me dit-on, ont la sagesse de se taire et de pas s'occuper de ce qu'on en dit) .
Je ne me tairai que lorsqu'il y aura des patchworks et des broderies de création contemporaine ou pas, témoignant d'une expression personnelle, de l'inviduailité (ou du collectif) qui la signe dans musées, et galeries d'art généralistes, pas juste comme témoignage d'un merveilleux savoir-faire etc. On est là à contresens sur ce que je veux dire et faire , bref quand on sortira enfin des préjugés et des ornières, des exclusions, des bornages des à peu près, je me tairai.
Et si nous, nous le disons pas comment nous élaborons, personne ne le dira à notre place, croyez-le bien. Donc on se tait et on manque l'occasion de faire changer le regard collectif sur ce que nous créons (et non : faisons). Je sais beaucoup travaillent en clubs dans un entre soi qui leur suffit mais je suis un esprit indépendant , défaut ou qualité je ne vois pas en quoi ça rendrait mon avis caduc, ni mes ouvrages sans valeur.
donc ma mse au point (c'est le cas de le dire)
"Ce travail des brodeuses professionnelles sur linge à visée utilitaire ou décorative est certes admirable je collectionne les pièces, mais ce n'est pas tout à fait non plus ce que je fais aujourd’hui .(et le patchwork n'est pas non plus de la broderie il y a donc deux arts au moins dans mon art textile ) .Du reste ma vue ne me le permet plus, même si à 20 ans je faisais cela avec la même perfection au point qu'une brodeuse pro m'avait dit que je devrais en faire mon métier . J'ai même gagné un peu de sous en brodant des initiales sur des draps pour des mariages . Pour moi actuellement l’expression prime la perfection et c'est en cela que c'est pour moi sinon un art ..mais une création personnelle où le choix des motifs, ces points, -il en existe des centaines!- des fils (même chose!) des nuances pour créer des textures qui viennent de moi, pas d'un modèle de revue ( même si j'y ai appris les techniques) . J'aime que mon tempérament se voie dans les points que je brode ou couds. Ce n'est pas une simple "activité manuelle" . Mes mains toutes seules sans l’imagination qui a conçu ne feraient rien il y a le désir de faire exister quelque chose qui n'existe pas déjà sous cette forme qui dépend de mes choix et décisions personnels et d'une vision que j'ai en moi de ce que je veux obtenir (et pas seulement l’exécution parfaite avec points mesurés d'un dessin qu'il soit de moi ou emprunté)-. Que ce soit raté est possible ou moche j'accepte qu'on me le dise, je me le dis plus d'une fois (j'ai de boîtes à ratés qui débordent !!) mais qu'on me mette sur le même plan que quelqu'un qui ne fait pas du tout ce travail de conception me blesse. Je suis incapable d'exécuter le modèle-(le modèle n'est pas le dessin mais les explications de réalisation qui vont avec ) de quelqu’un d'autre ça m'ennuie, ça existe déjà. Je sais comment ça va être, plus de mystère plus de suspense plus de "voyage" .Et ce n'est pas en mettant du bleu à la place du rouge que je me surprendrai ou en changeant de point de base . C'est quand même un peu plus que cela Même avec un dessin en noir et blanc emprunté je recompose Recomposer entièrement n'est pas changer quelques détails pour "personnaliser", là c'est à peu près impossible à faire saisir . . Je ne suis pas mue par l'envie de posséder un bel objet identique ou ressemblant à celui vu dans livre ou revue, mais comme toute personne qui crée de dire quelque chose avec ces matières-là, disposées et employées ainsi. Si on regarde -vraiment- mon index textile, on comprendra peut-être la différence entre ce que je fais et un drap brodé même plus superbement que je ne saurais jamais le faire,-même si je l'ai fait il y a bien longtemps- cette virtuosité-là que j'admire n'est pas ce à quoi j'aspire. Aucune de mes broderies actuelles n'est parfaite j’espère que quelques-unes sont expressives,sont de moi sont "moi" autant que mes poésies, pas juste jolies et bien faites. .Outre que mon travail textile est lié étroitement à celui d'écriture et ce bien avant que "texte et textile" ait été récupéré par les brodeuses contemporaines. "
Vague à l'âme
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Le bonheur en lisière -4
- Par FISCHER JACQUELINE
- Le 04/02/2021
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Au cours des années 90, j'ai commencé ma collection de livres américains achetés chez Brentano's, le plus souvent , puis diffusés par les commerçantes- artistes quilteuses de l'époque , si on voulait vivre de son art, il fallait déjà en passer par là , vendre des modèles, des kits, des tissus, organiser des stages. La machine commerciale était en route. Point trop de salons et un art pas encore vendu aux marchands du temple, cependant. Ma première grande influence fut l'artiste Nadine Rogeret à qui j'achetais mes premiers tissus américains . Ce furent longtemps, les seuls. J'aimais sa façon de créer en mélangeant dans ses oeuvres une inspiration qui venait de la géométrie et des compositions tout à fait personnelles. On voit nombre de ses oeuvres dans le livre de Claude Fauque Le patchwork ou la désobéissance . Si une me fut exemple, dans mes débuts en mosaïque de tissus, ce fut elle et je la salue au passage .
Je m'intéressais donc à cette géométrie dite traditionnelle et américaine , parce qu"elle coïncidait, en moi, à mille manières de construire avec des tissus. J'ai toujours aimé mettre beaucoup d'étoffes différentes dans ce que je fais , parce que pour moi c'est une sorte de richesse de vocabulaire. A mes yeux, c'était de la mosaïque, de la marqueterie, arts qui m'ont toujours fascinée et dont je n'ai jamais compris qu'ils soient jugés comme décoratifs et mineurs sauf quand un grand nom s'en empare , que la peinture s'en inspire ou qu'un mouvement d'arts plastiques en vogue les récupère. J'ai expérimenté évidemment, depuis, d'autres voies et certaines de mes créations actuelles sont toutes différentes, mais cette variété est la pierre angulaire de ce qu'on me pardonnera d'appeler ma démarche. Or, mettre énormément de tissus, de motifs et de couleurs venus non de chez un marchand qui vous les a assortis mais des découvertes et trouvailles un peu partout - neuf et ancien mêlés - exige pour équilibrer une rigueur que la géométrie des blocs et leur répétition me donnaient . La miniaturisation des morceaux aussi.
J'en étais donc là, à prospecter dans ma collection de tissus et les différents dessins issus de ce qu'on nomme "tradition" - J'envoyais en guise de voeux à l'association une photo d'un de mes patchworks, , on était début 92 et à ma grande surprise la directrice de publication Suzanne Lambert me répondit , et m'encouragea. Elle fit mieux elle publia comme modèle ce premier quilt réalisé d'ailleurs bien des années avant d'après un bloc trouvé dans une revue. Ce fut pour moi un puissant déclencheur, le geste qui me donna confiance . Mon livre lui est dédié. Sans elle, je n'aurais pas cru en moi. Je croiserai plus tard d'autres personnes (et aujourd'hui encore!) qui m'aideront à dépasser mes doutes, à continuer, car seule et souvent à contre-courant , ce n'est pas si facile. Je veux saluer celle qui fut pour moi à l'origine de ce que je nomme ma seconde vocation (la première, comme on le sait, était l'écriture ). et je préfère oublier les réflexions inévitables du genre "on te l'a pris parce qu' à l'époque, 'on manquait de modèles". Car oui , c'est ce qu'on entend au sein de notre corporation. (à suivre)
Pour Guillaume -1990- parution 1993 Nouvelles du Patchwork
tissus américains et de récupération